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Délit d’homicide routier: une coquille pas si vide

S'il ne change pas grand chose sur le fond, le futur délit d'"homicide routier", qui fait aujourd'hui l'objet de discussions à l'Assemblée nationale, a le grand mérite de chercher à mieux frapper les consciences.

Délit d’homicide routier: une coquille pas si vide

C’est aujourd’hui que sera discutée à l’Assemblée nationale une proposition de loi visant la création d’un « délit d’homicide routier ». Cette appellation remplacerait celle d’« homicide involontaire avec circonstances aggravantes », avec pour ambition de viser plus large. Seraient ainsi concernés les cas de conduite sous l’emprise de l’alcool, de stupéfiants, en excès de vitesse (le grand excès de vitesse en ce cas passerait de 50 à 30 km/h), avec usage du téléphone au volant, ou bien encore de conduite sans permis, phénomène qui concernerait 800 000 personnes en France. La non-assistance à personne en danger serait aussi prise en compte.
Des évolutions dont le principe est salué par les associations de victimes. Selon la Fédération nationale des victimes de la route, cette nouvelle qualification permettrait de « faire évoluer les mentalités et les comportements. ». Quant à l’association Victimes et Avenir, elle salue la « prise de conscience supplémentaire » qui en résulterait, notamment pour tout ce qui a trait à la consommation d’alcool (un conducteur alcoolisé est impliqué dans 30% des accidents mortels, chiffre qui grimpe à 48% la nuit) ou de drogue (20 % des accidents mortels, part qui atteint 29 % la nuit au cours du week-end).

Jusqu’à 10 ans de prison et 150 000 euros d’amende

« Le droit de la sécurité routière a déjà évolué quand on a durci les peines encourues pour l’homicide et les blessures involontaires au volant dès qu’il y avait alcool, drogue, grand excès de vitesse, etc.. Et ce durcissement a fortement contribué à la baisse de l’insécurité sur les routes ces vingt dernières années », commente l’association Victimes et citoyens. « La création d’un homicide routier et d’un délit de blessures routières dès qu’il y a une ou plusieurs de ces circonstances aggravantes confirmerait donc logiquement cette évolution du droit. »
« Même si l’homicide reste involontaire, nous voulons que le droit pénal prenne mieux en compte le côté délibéré du conducteur qui s’est volontairement mis dans une situation de circonstance aggravante », résume la députée Renaissance du Rhône Anne Brugnera, co-rapporteuse de cette proposition de loi transpartisane, citée par Le Monde.
Reste en effet à savoir quelles sanctions seraient réellement appliquées, sachant que celles qui existent, déjà lourdes - jusqu’à 10 ans de prison et 150 000 euros d’amende en cas de cumul de plusieurs circonstances aggravantes - sont rarement appliquées. De fait, plusieurs avocats spécialisés en droit routier pointent l’inefficacité réelle d’une telle évolution juridique. « Cette loi est un pansement sur une jambe de bois », cingle par exemple Me Antoine Regley, avocat au Barreau de Lille. « Moins de 10% des conducteurs qui tuent vont en prison. La plupart a un aménagement de peine avec un bracelet électronique Il faut que la loi fasse peur si on veut vraiment faire changer les choses. […] Risquer de s'endetter à vie en commettant un accident, ça ferait peut-être réfléchir les conducteurs avant de prendre le volant".

Manque d'accompagnement

Et le même de regretter le manque d’accompagnement des proches de victimes de la route, dont avait notamment particulièrement souffert Yannick Alléno quand il avait perdu son fils Antoine, mortellement percuté par un chauffard ivre et sans permis dans les rues de Paris en mai 2022. "Quand on vous dit que votre enfant est parti de façon "involontaire" un dimanche soir, alors qu'il rentrait du travail, alors que la drogue, l'alcool, voler des voitures et rouler trop vite en milieu urbain font partie d'un acte volontaire. On choisit de se droguer, on choisit de boire volontairement et ensuite de mettre la vie d'autrui en danger. Et c'est cela qu'on essaie et qu'on va obtenir", explique-t-il sur France Info.
Et le chef étoilé d’ajouter qu’il croit  « beaucoup en l'effet pédagogique de cette loi, au sens où quand on donnera aux jeunes Français le permis de conduire, on pourra leur dire : "attention, tu vas avoir une sanction très importante" si tu tues quelqu’un. Ça changera la donne. Les gens qui prendront leur voiture auront ça en tête et auront d'autres réflexes, et je pense que la courbe des décès de notre jeunesse descendra de façon drastique. »

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