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L’électrique à l’épreuve des élections

Dans Economie / Politique / Politique

Jean Savary

Avec le recul des Verts aux élections européennes, un probable changement de majorité politique en France et la guerre douanière avec la Chine, l’avenir de la voiture électrique peut sembler compromis. Mais la politique ne fera pas tout…

L’électrique à l’épreuve des élections

Europe, France, Chine, il y a du brouillard à tous les étages.

Si on connaît désormais la composition du Parlement européen, on ignore encore quels regroupements y auront lieu et pour quelle politique. En outre, l’inconnue française qui ne sera levée que le 7 juillet vers 20 heures pèse également sur l’Europe : le sort d’Ursula von der Leyen dépend en partie de la majorité qui se dégagera au palais Bourbon, de ce qu’il restera d’influence à Emmanuel Macron et des inclinations du premier ministre qu’il désignera.

À Strasbourg, deux tendances se dégagent néanmoins : les partis écologistes sont en recul (de 71 à 52 députés) et les extrêmes droites en nette progression avec un bon quart de l’hémicycle, soit 131 députés plus quelques dizaines qui pourraient (ou pas) se rattacher à un des deux grands blocs identitaires et/ou souverainistes.

Et c’est là qu’on en arrive à la voiture électrique. Qu’adviendra-t-il en 2035 de la prohibition du moteur à pétrole ? Taxera-t-on les voitures électriques chinoises ? En France, y aura-t-il encore un bonus pour les VE ? Que vont devenir les ZFE ?

L’électrique à l’épreuve des élections

Le 100 % watture en question

À l’échelle européenne, le résultat semble clair : les partisans du 100 % watture ont perdu des plumes tandis que ses adversaires n’ont jamais eu autant de députés. Mais dans les votes, c’est plus subtil. D’abord, les écologistes font bloc et demeurent, sur les questions d’environnement, des alliés incontournables de la coalition toujours dominante (PPE, sociaux-démocrates et libéraux) qui occupe 403 des 720 sièges. C’est de cette coalition qu’est issu le pacte vert européen et son objectif 100 % voiture électrique en 2035.

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À l’inverse, les extrêmes droites, majoritairement hostiles à ce pari technologique et économique, ont beau peser au moins trois fois plus lourd que les Verts, elles restent isolées. Pour être en mesure d’imposer leurs vues lors de la clause de revoyure qui en 2026 statuera sur la prohibition du moteur thermique, il leur faudra trouver suffisamment d’alliés dans les partis de droite voire de gauche. Peu probable…

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Au tapis en plein décollage

Cette revoyure dépendra aussi d’une autre inconnue, elle aussi éminemment politique : les droits de douane étonnamment élevés que la commission européenne veut appliquer sur les importations de voitures électriques chinoises. Atteignant 17 à 38 % ajoutés à l’actuelle taxe de 10 %, ces « droits compensateurs provisoires » seraient notifiés à partir du 4 juillet, mais perçus seulement si des droits définitifs sont instaurés d’ici le 2 novembre. Ce qui laisse quelques mois à l’Europe et à la Chine pour négocier un compromis. Sous la pression de l’industrie automobile allemande, très impliquée dans l’empire du milieu et qui redoute des rétorsions.

Si ce puissant coup de frein aux importations chinoises était acté, la clause de revoyure perdrait son objet, du moins du point de vue de la protection de l’industrie européenne. Pourtant, ces velléités européennes de protectionnisme, je n’y crois pas car à ce jeu, la Chine semble répondre « pile je gagne, face tu perds ».

C’est ce que signifie en tout cas la réponse du ministère chinois des Affaires étrangères à l’annonce des nouveaux droits de douane : « Cela compromet la coopération économique et commerciale entre la Chine et l’UE, tout comme la stabilité de la production automobile mondiale et des chaînes d’approvisionnement. »

Traduction, en plus d’interdire les transferts de certaines technologies de fabrication de batteries et de contingenter les ventes de matières premières raffinées, la Chine pourrait réduire voire stopper l’approvisionnement des constructeurs européens en cellules et en batteries. Or, la plupart de nos gigafactories sont encore à l’état de projet ou de chantier et une fois inaugurées, il leur faudra un à deux ans pour produire en quantité et qualité suffisante assez de batteries pour alimenter les chaînes de montage de Renault, Stellantis, VW, Mercedes, BMW… Autrement dit, la Chine a les moyens d’envoyer au tapis la voiture électrique européenne au moment où elle décolle.

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Deux scénarios

Il nous faudra donc choisir entre deux objectifs et donc deux scénarios :

Soit 100 % de voitures électriques neuves en 2035 dont 30 à 60 % de Chinoises et une majorité de batteries CATL ou BYD, avec pour résultat une industrie automobile européenne affaiblie et quelques millions d’emplois perdus
Soit un développement plus lent mais autonome du VE sur le vieux continent, le temps de sourcer et de pouvoir raffiner les matières premières qui alimenteront peu à peu les fabriques de batterie. La transition électrique en serait ralentie, l’objectif des 100 % de VE reporté d’une décennie au moins, mais l’emploi mieux préservé.

J’ai évidemment une préférence pour le second scenario, mais surtout une certitude : même si cela ira moins vite que le voudrait la commission européenne, la voiture électrique va rapidement s’imposer et éclipser la voiture thermique. Pas seulement parce que nos constructeurs sont trop engagés pour reculer, mais pour une raison bien simple : l’automobiliste la choisira parce qu’elle revient bien moins cher à l’usage et bientôt, à l’achat. Les tarifs du neuf sont en baisse et le marché de l’occasion se développe d’autant plus vite que la LOA, très majoritaire dans le choix d’un VE, accélère la rotation du parc.

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Après la folie du diesel, celle de l’électrique ?

Vous vous souvenez de la folie du diesel des années 2010, quand il pesait les trois quarts des ventes avec pour argument d’économiser 1 à 1,5 litre aux cent d’un carburant à peine moins cher ? Combien fallait-il abattre de kilomètres pour amortir le surcoût d’un TDI, HDI ou dCi ? Beaucoup. Et qu’y gagnait-on ensuite ? Autour de deux euros des 100 kilomètres, soit 240 euros par an pour le conducteur moyen et ses 12 000 km annuels en supposant qu’il n’ait pas déjà changé de voiture.
Avec une électrique, c’est trois ou quatre fois plus : en tablant sur une consommation de 15 kWh/100 km, soit trois euros aux cent kilomètres en recharge domestique, on économise huit euros versus un modèle essence consommant 6 l/100.

Et une fois le surcoût amorti, on ne gagne pas des clopinettes, mais pas loin de 1 000 € par an, et bien plus en comptant l’entretien deux fois moins coûteux. Pour qui parcourt plus de 20 000 km/an, la voiture électrique s’avérera vite incontournable.

D’autant que les obstacles se sont levés les uns après les autres. Les prises et les moyens de paiement se sont standardisés et l’autonomie en long trajet n’est plus un souci. D’abord parce que les autonomies ont progressé et les temps de recharge diminué, mais aussi et surtout parce que, sur autoroute, toutes les stations-service sont désormais pourvues de bornes rapides. Ces bornes on les retrouve aussi sur presque tous les parkings commerciaux et en version moins rapide, pour se dépanner, un peu partout en ville et jusque dans les bourgs.

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Électrifier le parc ou les kilomètres ?

À l’aune de cette évolution, on peut se demander si les forces du marché ne suffiront pas à décarboner l’automobile et s’il est encore utile de subventionner le VE par des bonus et subventions à la prise.

Car après tout, l’objectif ne devrait-il pas être d’électrifier non pas le parc, mais les kilomètres parcourus ? Un gros rouleur n’a pas besoin de prime pour se convertir, cette prime il l’obtient à chaque plein qu’il ne fait pas. Et s’il roule quatre ou cinq fois plus que l’automobiliste moyen, sa conversion a quatre ou cinq fois plus d’impact environnemental. Et dix fois plus si l’on considère que les sommes énormes actuellement consacrées à subventionner les voitures et les bornes - en sous-sol d’immeuble - de citadins qui prennent le métro ou le tramway en semaine et ne conduisent que le week-end seraient mieux employés à d’autres décarbonations : celle des bâtiments, de l’industrie et de l’agriculture en priorité.

Ce changement de paradigme permettrait de rendre moins pressante l’électrification du parc et de permettre à nos constructeurs une transition plus douce et moins périlleuse.

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