L'Agence européenne pour l'environnement (AEE) est le principal organisme public ayant pour objectif de fournir des informations opportunes, ciblées, pertinentes et fiables aux décideurs et au public, de soutenir le développement durable et de favoriser l'amélioration significative et durable de l'environnement européen. L'AEE a effectué une étude sur les zones urbaines européennes. Elle indique qu'avec près des trois quarts de sa population vivant dans des zones urbaines, le continent européen est l'un des plus urbanisés au monde. L'avenir des villes en Europe est toutefois source de grandes inquiétudes. Plus du quart du territoire de l'Union européenne est désormais affecté par l'expansion urbaine qui menace l'équilibre environnemental, social et économique de l'Europe.
D'après l'Agence, d'ici 2020, environ 80 % des Européens vivront en zone urbaine. Dans sept pays, ce seront 90 % de la population, ou davantage encore. La demande de terrains s'accroît très fortement dans les villes et à leur périphérie. Chaque jour, nous assistons à des mutations rapides, visibles et conflictuelles dans l'utilisation des terres. Les paysages s'en trouvent modifiés et l'environnement urbain et périurbain transformé comme jamais auparavant. Les villes s'étendent. Les distances les séparant s'amenuisent et les temps de déplacement pour les rallier ou les quitter sont toujours plus courts. Cette expansion, dont l'intensité est variable sur le territoire européen, est la conséquence de l'évolution des styles de vie et de consommation. On la qualifie généralement comme un « étalement » urbain. Au cours des 50 dernières années, croissance des villes a rimé avec étalement, comme démontré de manière probante par les données disponibles.
L'AEE explique que l'étalement urbain intervient dans une zone donnée lorsque le taux d'occupation des terres et la consommation de celles-ci à des fins d'urbanisation sont plus rapides que la croissance de la population sur une période de temps déterminée. Ce phénomène doit à juste titre être considéré comme l'un des défis majeurs auxquels l'Europe est aujourd'hui confrontée. Son étude réalisée à l'échelle européenne met en lumière une expansion spatiale rapide et ininterrompue des villes, supérieure à 5 % sur dix ans (Figure 1), comparable à trois fois la superficie du Luxembourg. Les zones les plus visiblement touchées par l'étalement urbain sont localisées dans des pays ou régions à forte densité de population et dont l'activité économique est intense (Belgique, Pays-Bas, régions du sud et de l'ouest de l'Allemagne, Italie du nord, région parisienne) et/ou à croissance économique rapide (Irlande, Portugal, Allemagne orientale, région madrilène).
L'étalement urbain est tout particulièrement évident dans des pays ou régions ayant bénéficié de financements et de politiques régionales de l'Union européenne. De nouveaux foyers de développement peuvent également être observés à la périphérie de villes plus petites ou dans les campagnes, le long des corridors des transports et dans de nombreuses régions côtières généralement reliées à des vallées fluviales. Historiquement, l'augmentation des populations urbaines a été le moteur de la croissance des villes en Europe. Aujourd'hui, le phénomène est autre et même là où la pression démographique n'est que tout au plus faible, divers facteurs accentuent cet étalement urbain. Ils sont ancrés dans le souhait d'adopter de nouveaux styles de vie dans les zones suburbaines, en dehors des centres-villes.
L'AEE souligne que les forces qui animent ces tendances sont notamment micro et macro-économiques. La qualité des systèmes de transport, le prix des terrains, la préférence pour un habitat individuel, les tendances démographiques, les traditions et contraintes culturelles, l'attractivité des zones urbaines existantes sont autant d'éléments permettant d'expliquer le développement des zones urbaines. Un autre moteur important de ce phénomène est la mise en œuvre de politiques d'aménagement au plan local comme au niveau régional. Dynamisée par les fonds structurels et de cohésion de l'UE favorisant les développements des infrastructures, l'étalement urbain a été accéléré par l'amélioration des liaisons de transport et par une plus grande mobilité personnelle. Les villes, par nature, sont des espaces aux dimensions réduites et dans les limites desquels de très nombreuses personnes se concentrent. Les avantages pour le développement économique et social sont manifestes. À certains égards, cela peut même être bénéfique pour l'environnement.
L'utilisation des sols et la consommation énergétique tendent ainsi à être moindres dans les zones urbaines que dans des zones à population disséminée. Le traitement des eaux usées et des déchets urbains bénéficie d'économies d'échelle. La population urbaine souffre encore, néanmoins, de graves problèmes environnementaux localisés, tels que l'exposition au bruit, les pics de pollution atmosphérique lourds de conséquences, la gestion des déchets, la disponibilité réduite d'eau douce et un manque d'espaces ouverts. Le mouvement actuel en direction de zones urbanisées qui s'étalent s'accompagne cependant d'une augmentation de la consommation. L'espace utilisé par habitant dans les villes en Europe a plus que doublé au cours des 50 dernières années. On a assisté au cours des deux dernières décennies à une augmentation de quelque 20 % de la surface des agglomérations dans de nombreux pays d'Europe occidentale et orientale, tandis que la population n'a augmenté que de 6 % environ dans le même temps.
L'Agence précise que les transports (la mobilité), en particulier, constituent toujours un défi primordial dans la gestion et l'aménagement urbains. L'infrastructure des transports influe de diverses manières sur le paysage. La mobilité et l'accessibilité sont des facteurs clés dans la cohésion territoriale européenne. Ce sont également des éléments primordiaux de l'amélioration de la qualité de vie des communautés de vie. Le nombre de kilomètres parcourus par la route dans les zones urbaines devrait augmenter de 40 % entre 1995 et 2030. Les taux de possession de véhicules dans l'UE-10, toujours inférieurs à ceux de l'UE-15, laissent à penser qu'il convient de prévoir une forte croissance à terme dont les impacts seront majeurs. Si rien n'est fait, la congestion routière devrait s'accentuer lourdement d'ici 2010 et les coûts imputables à cette congestion augmenter pour atteindre environ 1 % du PIB de l'UE.
L'AEE met en avant qu'on ne peut toutefois simplement penser l'infrastructure des transports en kilomètres de routes ou de voies ferrées ajoutés. Ces infrastructures devraient être comprises dans une approche globale tenant compte de l'incidence réelle des investissements consacrés à la création et au soutien d'économies locales et urbaines. Elles devraient donc faire partie d'un développement équilibré et polycentrique des territoires visant à réduire les atteintes portées à l'environnement. Les stratégies et instruments de contrôle de l'étalement urbain dépendent toutefois grandement des réalités d'aujourd'hui, à savoir d'une gouvernance multiple et éclatée, au plan local comme au niveau européen. Ceci est particulièrement vrai pour ce qui est des flux financiers majeurs qui façonnent les budgets de l'aménagement.
L'AEE conclut qu'à l'heure actuelle, les politiques d'aménagement suivent souvent la logique du marché. Elles devraient davantage se faire le reflet d'une vision du développement urbain et prévoir une intégration complète des considérations environnementales et sociales à tous les stades du cycle décisionnel, de l'identification des problèmes à la conception des politiques.
Source : AEE Photo : eea.ouvaton.org
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