L'Institut National de Recherche sur les Transports et leur Sécurité (INRETS), établissement public à caractère scientifique et technologique (EPST) placé sous la tutelle des ministères chargés de la recherche et des transports, a réalisé une étude intitulée "Consommation énergétique, émission de polluants liés aux transports en Europe : mieux mesurer pour mieux réduire." L'INRETS met en avant que les véhicules consomment moins et polluent moins mais la responsabilité du secteur des transports en matière de dégradation de l'environnement n'en reste pas moins notable : la diminution des consommations et émissions unitaires des véhicules se trouve en grande partie compensée par la croissance continuelle des trafics routiers.
Pour l'INRETS, afin d'agir de façon efficace et coordonnée au plan européen, il importe avant tout de mettre au point des outils pour mesurer avec précision les émissions de polluants. En raison de l'enjeu que représentent de tels outils pour les années à venir, la Commission européenne a décidé, dès 2000, de soutenir un vaste projet de mise au point et d'amélioration des méthodes d'estimation et d'inventaire des émissions de polluants des transports. Le projet ARTEMIS (Assessment and reliability of transport emission models and inventory systems) dans lequel l'INRETS a pris une part active, a ainsi rassemblé 40 laboratoires de recherche européens. ARTEMIS, qui s'est clôt fin 2005, concernait tous les modes de transport en Europe, leurs émissions spécifiques de polluants, leurs caractéristiques d'utilisation et les outils nécessaires à l'estimation de leur impact environnemental. Les outils, construits à partir des nombreuses expérimentations et mesures effectuées dans ce cadre et à partir du développement de méthodes spécifiques, seront prochainement disponibles.
Un apport capital du LTE au projet
Le LTE (Laboratoire Transports et Environnement) s'est fortement impliqué dans ARTEMIS en assumant la responsabilité des travaux sur les émissions des véhicules légers, les caractéristiques de trafic, et en participant activement au développement des approches de modélisation et à la cohérence de l'ensemble des outils. L'équipe a ainsi pris en charge la construction des "cycles de conduite" ARTEMIS, aujourd'hui largement utilisés en Europe. Un cycle de conduite est conçu pour être représentatif des trajets et des conditions de circulation. Il intègre le démarrage du moteur, une phase de roulage et la coupure du moteur pour la mesure des émissions de polluants, en tenant compte d'un certain nombre de paramètres comme la vitesse (maximum, moyenne...), la distance, la température ambiante, etc. L'équipe a également développé des approches de calcul des émissions des voitures particulières, des émissions liées au démarrage à froid, le calcul des émissions à l'échelle de la rue dans diverses situations de trafic. Elle a enfin largement contribué à à la constitution des bases de données d'émissions, grâce à des mesures sur banc d'essai.
Des données d'émission fiables pour tous les véhicules
Ainsi, 130 véhicules légers ont été testés en utilisant les cycles de conduite développés pour reproduire fidèlement et dans leur diversité les conditions de conduite européennes. Une base de données de plus de 3 000 véhicules européens a été constituée. Concernant les véhicules lourds, plus de 100 cartographies d'émission de moteurs ont été mesurées sur banc d'essai et une trentaine de moteur testés. Le modèle obtenu, dit PHEM, permet ainsi de calculer les émissions réelles des camions, autobus et autocars selon leur motorisation et leur homologation (EURO 1 à 4) en tenant compte du chargement, de la pente de la route, du carburant. De même, 115 motos et cyclomoteurs ont été testés afin d'élaborer des fonctions d'émissions correspondantes. Ce vaste projet sera prolongé par plusieurs actions. La première engagera la validation de l'ensemble des méthodes, outils et de leur cohérence, au travers d'exercices d'"application" ou de démonstration. La deuxième visera à constituer des jeux nationaux de données d'entrée (parcs, etc.), notamment pour la France, la Suède, l'Autriche. Enfin, un travail de dissémination auprès des institutions internationales (Agence Européenne de l'Environnement, Commission Européenne DG Environnement et Transports) et des différents pays européens garantira la promotion des résultats du projet et sa durabilité.
Cas particulier de la mise en œuvre en France
Historiquement, la France utilise des outils dérivés de COPERT (COmputer Programme to calculate Emissions from Road Transport) et particulièrement le logiciel IMPACT-ADEME pour connaître les consommations énergétiques ainsi que les émissions de polluants et de gaz à effet de serre liées à la circulation routière. L'utilisation des outils dérivés du projet ARTEMIS exigera inévitablement un effort de prise en main. L'ADEME a déjà expressément sollicité l'INRETS pour :
- effectuer des travaux de validation des méthodes et
outils ARTEMIS ;
- mettre en œuvre les moyens de calcul du parc routier
français jusqu'en 2030 ;
- établir un cahier des charges d'un modèle français
dérivé des outils ARTEMIS afin de disposer d'un outil national à l'usage des bureaux d'études ;
- réactiver un groupe de travail sur les inventaires
d'émissions français et co-organiser des séminaires d'informations destinés aux utilisateurs de l'hexagone.
Mesurer les émissions : d'une voiture particulière au parc de véhicules d'un pays
Parmi les nombreux résultats de mesure des émissions obtenus, l'INRETS note que ces nouvelles données concernent particulièrement les véhicules récents (EURO 2 à EURO 4) qui n'étaient pas couverts par les outils précédents, les conditions réelles d'utilisation, et s'élargissent aux polluants non réglementés (COV, HAP, tailles et distributions de particules, etc.). La taille du consortium et le développement de cycles de conduite et de méthodes de test harmonisées ont permis la mise en commun et l'analyse d'une quantité considérable de données d'émissions. Les approches de modélisation sophistiquées ont ainsi été développées pour calculer plus précisément les émissions à chaud, à froid, les émissions liées à la climatisation, l'impact du carburant, etc.
De même différentes échelles d'application, du macroscopique au niveau d'une région ou d'un pays jusqu'au microscopique à l'échelle de la rue ou d'une "situation de trafic", ont été élaborées en cohérence et en s'appuyant sur des travaux et données jusque là dispersés. Une réflexion menée en amont, sur les données d'entrée (parcs de véhicules, caractéristiques et situations de trafic, conditions de circulation, etc.), permet une meilleure articulation avec les statistiques existantes.
Enfin, une large palette d'approches, de méthodes et d'hypothèses, notamment pour l'estimation des parcs de véhicules routiers et de leurs émissions devient possible grâce à ces nouveaux outils souples, modulaires, évolutifs... Demain, les modes non routiers, comme l'avion ou le train, pourront également être intégrés.
Source : l'INRETS
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