Après l'annonce hier d'une augmentation de l'aide accordée aux constructeurs français, le Gouvernement s'estime être de son bon droit de mettre le nez dans leurs affaires pour s'assurer que l'argent va au bon endroit. C'est à dire dans des usines françaises, pas dans les poches des actionnaires et encore moins dans celles des patrons qui voudraient s'octroyer des superbonus.

Hier, lors de son discours en ouverture des Etats Généraux de l'Automobile, le Premier Ministre François Fillon a donné une estimation du montant de l'aide financière, que l'Etat apportera à ses constructeurs automobiles en difficulté, Renault et PSA, qui devrait être de 5 à 6 milliards d'euros, probablement sous la forme de prêt direct. Mais une telle implication ne se fera pas sans condition: « Il n'est pas question que l'Etat vienne en aide à un constructeur qui déciderait de fermer purement et simplement un ou des sites de production en France ». Ni fermeture d'usine, ni délocalisation donc.

Mais ça n'est pas tout, puisqu'il y est aussi hors de question pour l'Etat que cet argent aille aux dirigeants et aux actionnaires en fin d'année, sous forme de bonus et de dividendes, comme Christine Lagarde, ministre de l'Economie, l'a encore clairement rappelé ce matin sur l'antenne de RTL :"Il me paraîtrait insensé qu'on mette de l'argent de l'Etat et qu'avec cet argent les conseils d'administration décident d'attribuer des superbonus », en ajoutant ensuite : "Je pense qu'ils auront un sens suffisant de la responsabilité pour prendre eux-mêmes ces mesures".

Ce n'est pas la première fois que l'Etat impose de telles conditions à son aide, puisque, pas plus tard qu'hier, les dirigeants des banques françaises ont accepté de renoncer à leur bonus afin de bénéficier des 10,5 milliards d'euros d'aide publique. Mais si les banques ont cédé à ces requêtes de l'Etat, en sera-t'il de même pour les constructeurs automobiles ?

Si Renault, par la voix de son PDG Carlos Ghosn, ne s'est pas montré hostile à ces prises de positions, demandant aussi une suppression de la taxe professionnelle et un allégement des charges pour être plus compétitif face aux pays de l'est, PSA s'est montré hier moins enthousiaste. Lors des Etats Généraux de l'Automobile hier, après le discours du Premier Ministre, Christian Streiff, patron du groupe Peugeot Citroën, a déclaré qu'il trouvait en effet envisageable une augmentation de l'aide de l'Etat, mais «dans des conditions qui ne modifient pas la répartition de notre capital, notre indépendance et notre liberté d'action».