Lorsque l'accident de François Duval et la gravité des blessures de Patrick Pivato ont été connus, beaucoup d'entre nous, moi le premier, ont rapidement conclu : "une de plus". François Duval traîne une réputation de pilote casse-cou, casseur d'autos. Et comme toute réputation, elle n'est pas totalement justifiée.
Le problème du rallye, c'est que la sortie de route n'est pas un évènement mais un simple fait de course. On a donc vite fait de tirer des conclusions sans connaître vraiment les causes et les conséquences d'une sortie.
Dans le cas de celle de Duval au Japon, qui a failli couter la vie à Patrick Pivato, j'ai voulu savoir. Je vous livre donc ici la vidéo embarquée de l'accident qui nous apprend 2 choses essentielles :
- D'une part, il n'y a pas de sortie à proprement parler. La Focus aborde cette courbe même pas rapide en 3eme et pour compenser le sous-virage qui l'amène légèrement au large (tout au plus 1.50m), François donne un coup de frein à main. Alors que l'on a l'impression que l'auto reprend son cours normal elle s'arrête net et s'éventre.
- Deuxièmement, la cause du choc est proprement inadmissible. Alors que sous couvert de sécurité, la FIA est capable d'exclure un pilote qui n'a pas ses gants, où qui a roulé quelques centaines de mètres sans avoir bouclé son harnais, il est absolument impensable, inimaginable qu'on laisse disputer une spéciale de rallye avec ce genre de piège invisible et meurtrier planté à moins de 2m du bord des routes. Si l'on observe les images, on remarque que la Focus s'empale dans un poteau d'acier ou de béton d'environ 1.20m de haut, si puissamment planté dans le sol qu'il ne plie pas sous le choc. Totalement masqué par les herbes, ces poteaux (il y en a plusieurs alignés apparemment) attendent les pilotes en sortie de courbe comme de véritables lames meurtrières.
Le rallye est un sport qui ne perdra jamais sa dangerosité mais il est possible d'en réduire le degré en faisant en sorte de ne pas envoyer des pilotes jouer les funambules sur des chemins bordés d'obstacles tueurs non protégés. En seulement 2 passages de reconnaissance, je ne sais pas si les pilotes ont vu ces poteaux et s'ils ont intégré le danger potentiel qu'ils représentaient. Le fait est que Duval n'a pas commis une énorme faute de pilotage et que ce genre de sortie un peu large arrive des dizaines de fois dans un rallye de 300 km.
Il m'est apparu nécessaire de faire la lumière sur cet évènement dramatique dont François Duval ne peut porter seul la responsabilité. La plus grosse erreur, ce sont ces poteaux, et l'organisation d'une spéciale à proximité.
Messieurs de la FIA, pourquoi ce genre de manquement grave à la sécurité, inimaginable en F1, se produit-il en Rallye ? Imposer le baquet carbone protecteur est une bonne chose mais la première des précautions est à prendre sur le parcours. Par bonheur, Pivato devrait s'en sortir.. il n'y aura peut être pas de seconde chance.
Le dernier témoignage de François Duval sur cet accident est la raison qui m'a poussé à comprendre :
"Après l'impact j'ai tout de suite demandé à Patrick si cela allait, il m'a répondu que non. J'ai immédiatement compris que c'était sérieux. En fait une barre métallique reliant les poteaux s'était brisée et avait transpercé sa jambe.
Le piquet était rentré jusqu'à la console centrale, détruisant la radio. La seule chose que je pouvais faire était d'attendre que Matthew arrive pour qu'il puisse avertir les secours. Patrick était toujours conscient, je lui parlais sans cesse en attendant l'équipe de sécurité. Les minutes m'ont paru des heures... il a fallu bouger la voiture pour pouvoir extraire Patrick. On n'arrivait pas défaire le harnais, car ses jambes étaient recroquevillées sur son torse.
Il a ensuite été héliporté vers l'hôpital où je ne suis arrivé que quelques temps plus tard. Sur place, une infirmière qui parlait français m'a annoncé que c'était très grave et que je pouvais m'attendre au pire, je me suis évanoui.
Ensuite les jours qui suivirent me paraissait interminables dans l'attente d'une évolution positive de son état. Je me suis rendu chaque jour à son chevet pendant 30 minutes et ce 3 fois par jour. C'était très impressionnant de voir toutes ses machines branchées sur lui.
Quel soulagement de voir Patrick ouvrir les yeux et surtout quel bonheur de l'entendre parler, rire et déconner comme avant.
Patrick sera rapatrié ce mardi 11 novembre et arrivera à Lyon mercredi pour y subir des interventions chirurgicales au niveau de sa jambe droite et du bassin dans un centre hospitalier spécialisé dans la médecine sportive. Il en aura pour 3 mois de convalescence et ensuite s'occupera probablement de la sécurité en rallye. Suite à ce terrible accident Patrick ne souhaite plus remonter dans le baquet de droite.
Quant à moi, je ne sais pas si je participerai au RAC (ndla : il participera au RAC avec Denis Giraudet), car je ne suis pas bien ni physiquement ni mentalement et en plus recommencer avec un nouveau copilote sur ce terrain spécifique n'est peut-être pas une bonne solution. De plus, je me pose encore la question si les risques pris en valent vraiment la peine, sachant qu'il faudra encore une valise bien remplie d'euros pour avoir un bon volant en WRC en 2009."
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