Au Salon de Francfort, l'accélération des paradoxes
À Francfort, il y a les beaux discours écolos, mais il y a aussi la réalité du marché et les attentes d'un public qui a encore envie de rêver devant des sportives.
Évidemment, quand on regarde le plan du Salon de Francfort édition 2019, on ne peut que tiquer face à la courte liste des présents. Mais voyons le verre à moitié plein. Ceux qui sont là ont l'envie de nous offrir un beau spectacle. La liste des nouveautés reste fournie. Jouant à domicile, les allemands ont forcément mis le paquet, avec en star incontestée la Volkswagen ID.3.
Avec elle, on ne peut trouver meilleure illustration de la transformation du secteur automobile, notamment germanique. Lui-même très symbolique, Volkswagen n'hésite pas à faire de l'ID.3 un jalon de son histoire, après les Cox et Golf ! D'ailleurs, la huitième génération de la compacte a été priée d'attendre pour se montrer et ne pas voler la vedette.
La Golf 8 sera dévoilée en octobre et arrivera dans les concessions sans passer par un grand salon. Une situation qui semblait impensable il y a peu pour une telle star ! Mais elle peut justement s'en passer. Cela ne l'empêchera pas de rester le best-seller de Volkswagen. VW a beau avoir des objectifs ambitieux pour l'ID.3, le volume restera assuré par des modèles comme la Golf ! C'est l'un des premiers paradoxes du salon, entre la promesse très écolo de l'exposition et la réalité des ventes.
Le service marketing de VW pourrait dire qu'un salon sert à mettre en avant les solutions d'avenir. On peut aussi penser qu'on s'y montre de manière arrangée. L'événement attirant encore tous les types de médias, notamment les généralistes, mieux vaut exposer l'électrique, plus médiatique par les temps qui courent. D'autant que chez VW, l'ID.3 est là pour faire oublier le Dieselgate et montrer que Volkswagen a changé depuis l'éclatement du scandale.
Pareil chez Porsche. La Taycan a déjà des carnets de commandes bien remplis, mais les Macan et Cayenne continueront de représenter la majorité des ventes. C'est d'ailleurs un autre paradoxe, plus que jamais visible dans les allées de Francfort. Les SUV sont toujours plus nombreux alors que leurs silhouettes plus volumineuses et plus lourdes en font de mauvais élèves en matière de CO2, ce qui devient un problème à l'approche des sanctions européennes visant les groupes trop polluants.
Mais les constructeurs restent des entreprises commerciales. Ils ne font que répondre à une demande. À tel point qu'un autre paradoxe pointe : alors qu'ils cherchent à rationaliser leur gamme, en gommant les modèles peu diffusés, ils n'hésitent pas à multiplier les SUV, osant se lancer dans des niches hasardeuses (le Volkswagen T-Roc cabriolet) ou dupliquer les offres, quitte à se cannibaliser (le Mercedes GLB, aussi grand que le GLC, l'Audi Q3 Sportback en plus du Q3).
Et ils seraient fous de s'en priver, d'autant que le succès des SUV leur permet de remplir les caisses et de financer les très lourds investissements des nouvelles motorisations électrifiées. L'un n'irait pas sans l'autre. D'ailleurs, l'un va avec l'autre, puisque les deux aspects sont réunis à Francfort. Les baroudeurs hybrides rechargeables s'y multiplient : Mercedes GLE 350 de, Opel Grandland X Hybrid4, Seat Tarraco PHEV… C'est un SUV, oui, mais branché ! Histoire d'expliquer au journaliste lambda que le 4x4 a évolué et sait maintenant bien se tenir.
Le discours écolo est donc partout. Reste qu'à l'applaudimètre du visiteur, les nouveautés les plus acclamées au salon pourraient bien être celles totalement déconnectées des tendances, notamment la BMW M8 et la très attendue nouvelle génération d'Audi RS6. Celle-ci n'est pas un SUV et n'est pas branchée ! Paradoxe ultime.
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