Chez Stellantis l'économie circulaire tourne rond
Carlos Tavares et John Elkann, les patrons du groupe ont inauguré hier une nouvelle unité de recyclage sur le site historique de Fiat Mirafiori en Italie. Mais pourquoi cet intérêt récent des constructeurs pour cette fameuse économie circulaire ? Par simple goût du développement durable ?
On l’appelle « économie circulaire », mais dans la vraie vie, c’est de recyclage qu’il s’agit. Et dans la galaxie Stellantis aux 14 marques, c’est en Italie que cette pratique, nouvelle pour le constructeur, va s’implanter. Et pas n’importe où : sur le site emblématique de Mirafiori, l’autre fleuron turinois de Fiat, après le Lingotto. Un fleuron qui n’est pas simplement une énorme usine automobile de 2 millions de m2, mais un pan de l’histoire transalpine, puisque c’est ici, lors des grandes grèves de 1943, que le pouvoir fasciste de Mussolini a commencé à vaciller.
Autant dire que la symbolique de l’endroit est, au moins, aussi importante en Italie que celle de Billancourt en France. Mais si Mirafiori employait 50 000 personnes durant les années 70, elle n’en compte plus aujourd’hui que 5 000 et se contente d’assembler la Fiat 500e et les rares Maserati Levante qui trouvent preneurs.
Alors le mythe va évoluer pour perdurer et devenir, en partie, le premier centre de recyclage de Stellantis. Mais il ne faut surtout pas l’appeler ainsi, puisqu’il s’agit du « hub d’économie circulaire SUSTAINera ». Pas moins. Il recyclera comme il se doit, les batteries, les moteurs et les boîtes des autos du groupe et reconditionnera des voitures d’occasion pour les remettre en vente, rétrofitées ou pas.
Deux milliards à la fin de la décennie
Mais il ne faut pas trop abîmer l'image de Mirafiori pour autant. Alors, pour bien affirmer qu’ils ne transformaient pas le fleuron en casse automobile, et que ce nouvel élan est plein de noblesse et de développement durable, John Elkann, le président du conseil d’administration, et Carlos Tavares, le boss opérationnel, ont fait le déplacement hier pour couper le ruban du nouveau site. Au menu : 40 millions d’investissements, 550 nouvelles embauches, et un chiffre d’affaires de 2 milliards d’euros en 2030.
Reste que les deux hommes ont beau expliquer qu’ils « construisaient le futur à Mirafiori », l’investissement reste faible au regard des capacités du groupe. Pour autant, il est trop important pour n’être qu’une simple opération de greenwashing et de développement durable destiné à flatter l’air du temps. Chez Stellantis, un sou est un sou et pour Carlos Tavares, « pour être durable, l’économie circulaire devra être profitable ». Quant aux 2 milliards de chiffre, il estime pouvoir les réaliser avant l’échéance de 2030. D’ailleurs le patron exécutif de Stellantis prévoit déjà d’installer d’autres hubs similaires, sur chaque continent. « Le prochain sera probablement en Amérique du Nord, puis en Amérique latine et en Afrique et au Moyen-Orient. »
Les classes moyennes en voitures d’occasion
Mais qu’est ce qui justifie cet enthousiasme pour le recyclage de la part de la direction de Stellantis, mais aussi de la part de son concurrent français Renault qui a inauguré ses « refactorys » similaires à Flins et à Séville ? Le prix des voitures neuves évidemment, et surtout celui des voitures électriques. Les constructeurs généralistes prévoient, sans le dire, que leur socle de clientèle le plus large, les classes moyennes, ont de moins en moins accès aux voitures neuves, du moins à l’achat. Alors elles en passent par la LOA. Ces autos se retrouvent sur le marché de l’occasion après 3 ou 4 ans d’usage et sont reconditionnées, par le biais des hubs, avant d’être revendues aux réfractaires du leasing.
Par quels canaux les revendre ? Rien de plus simple : Stellantis détient l’un des spécialistes de la vente d’autos de seconde main (Spoticar) et il est l’actionnaire majoritaire d’un autre (Aramis). Une situation qui change la donne. Auparavant, le marché de l’occasion échappait aux constructeurs qui se contentaient de fabriquer des voitures et de les vendre neuves, leur laissant vivre leur deuxième et troisième vie sans eux. C’est terminé. La boucle est bouclée. Les marques fabriquent désormais des autos, les vendent, les recyclent et les revendent encore. L’économie circulaire prend ainsi forme, grâce à une large part de la population qui ne pourra bientôt plus avoir accès aux voitures neuves.
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