France 2 instruit à "charge" contre Renault et la voiture électrique : ont-ils raison ?
Samedi dernier passait sur France 2 un reportage intitulé "Faut-il passer à la voiture électrique ?". Au menu, décortiquer les avantages et inconvénients de la voiture électrique, tester la promesse de Renault concernant l'autonomie de la dernière Zoé, et faire un bilan écologique de la voiture électrique. Cela nous a semblé légèrement à charge contre Renault et l'électrique. Voici pourquoi.
Le reportage commence en faisant la démonstration des économies réalisées en roulant à l'électrique, face à une voiture thermique. Avec pour l'exemple choisi, une division par deux du budget "carburant". Fort bien, c'est un constat fait par tous ceux qui sont passés à la voiture électrique. Entre la consommation moindre, et les économies réalisées sur l'entretien, le budget global est en baisse, c'est une évidence, y compris pour ceux qui louent leur batterie.
Mais la question de l'autonomie arrive rapidement. Et là, ça coince. Le reportage évoque les propriétaires qui revendent leur électrique, lassés par les contraintes d'autonomie et d'organisation. Et décident de tester la promesse de Renault, qui parle dans ses publicités des 400 km d'autonomie promis par la nouvelle batterie de la Zoé.
La journaliste se rend donc aux essais presse de cette auto, auxquels nous avons également participé. Elle choisit une ville à 200 km de son lieu de départ et espère ainsi faire l'aller et le retour sans devoir charger. Sans succès, puisqu'elle tombera en panne au bout de 196 km.
Puis le reportage évoque les impacts écologiques de la voiture électrique. Lors de sa production, de celle des batteries. Avec un constat : la production d'un véhicule électrique entraîne des rejets de CO2 plus importants que pour celle d'une voiture thermique (6,5 T contre 3,7 T en moyenne). Et l'interview d'un opposant à la voiture électrique, membre de l'Observatoire du nucléaire, enfonce le clou. La voiture électrique n'est pas une voiture propre.
Lien pour regarder le reportage : http://www.france2.fr/emissions/tout-compte-fait/diffusions/07-01-2017_537977
Un reportage à "charge" ?
Tous ces éléments mis bout à bout nous ont semblé être comme une instruction à charge contre la voiture électrique. C'est pourquoi nous avons tenu à replacer le curseur peut-être un peu plus au centre, moins dans l'exagération télévisuelle habituelle.
Premièrement, en effet, non le véhicule électrique n'est pas la panacée. Oui, il pâtit encore de soucis d'autonomie. Mais les Français, et les vendeurs des différentes marques présentes sur le marché ne sont pas dupes. Depuis des années, ils répètent, et la presse en général, que le véhicule électrique est un véhicule citadin. Une deuxième voiture pour faire les trajets domicile-travail, les courses et aller chercher les enfants à l'école. Personne n'a jamais affirmé que partir en vacances ou en week-end avec était possible sans une grande organisation ou du temps devant soi.
Le test de la Zoé : pas si catastrophique
Pour revenir au test de la Zoé. Premièrement, la publicité qui cite les 400 km d'autonomie s'accompagne, comme pour les voitures thermiques quand on indique leur consommation ou leur autonomie, d'un astérisque qui précise bien qu'elle est obtenue selon le cycle NEDC, toujours particulièrement favorable.
Qui aujourd'hui croit aux 3 litres/100 km d'une Peugeot 208 ? Clairement, tout le monde sait que dans la "vraie vie", ce sera plus. Concernant Renault, durant les essais, notre journaliste Pierre Desjardins peut en témoigner, Renault a d'entrée de jeu précisé que les 400 km seraient impossibles dans la vraie vie, et que l'autonomie serait comprise entre 200 km en hiver et 300 km en été. Ce qui est déjà une performance. N'est pas Tesla qui veut, surtout quand on vend une voiture 4 fois moins cher. La journaliste de France 2 a donc réalisé 196 km. Oui, mais en roulant quasi exclusivement sur autoroute. La pire configuration pour une voiture électrique, car il y a très peu de récupération d'énergie à la décélération ou au freinage. Dans ces conditions, les 196 km sont en réalité une belle performance pour la Zoé.
Pour information, notre propre journaliste, en faisant attention, et sur un parcours urbain et petites nationale, a fini sur 360 km d'autonomie, contre 170 km "à fond" sur autoroute. On le répète, finalement une belle performance.
Alors oui, la promesse n'est pas respectée, mais aucun constructeur ne la respecte, surtout pas avec les autos thermiques, quand il annonce les consommations ou l'autonomie. Nous l'avions déjà vérifié avec la publicité qui annonçait 1 700 km d'autonomie pour la Renault Mégane, souvenez-vous.
La voiture électrique vraiment plus "sale" que la thermique ?
Par ailleurs, France 2 nous laisse entendre qu'une voiture électrique serait finalement plus "sale" qu'une thermique, si l'on tient compte de sa production. Un sujet qui a déjà fait débat. Nous avons réalisé nos propres petits calculs, et c'est bien plus compliqué que ça. L'expert de France cite 6,5 T de CO2 émis pour la fabrication d'une électrique, et 3,7 T pour une thermique. Partant sur ces chiffres. La voiture électrique a donc 2,8 T à "rattraper". Sachant qu'elle émet 0 g de CO2 par kilomètre (aucune émission locale), il lui faudra théoriquement 28 000 km avant de devenir plus "propre" qu'une thermique, si l'on se base sur des émissions moyennes (optimistes d'ailleurs) de 100 g/km pour une thermique.
Ah mais non ! Car l'électricité qui sert à recharger l'électrique n'est, elle, pas 100 % propre. Si l'on va par là, le carburant mis dans le réservoir non plus ! En France, selon les sources, l'équivalent en CO2 par km pour une électrique est au pire de 20 g/km. Pour une thermique il faut ajouter, selon ces mêmes sources, entre 27 et 110 g en moyenne ! Si l'on prend les chiffres les plus favorables pour l'essence, et les plus défavorables pour l'électrique, on arrive au chiffre de 27 000 km environ. C'est-à-dire qu'au-delà de 27 000 km parcourus, le véhicule électrique devient moins émetteur de CO2 au global que le véhicule thermique. Pas vraiment un chiffre élevé !
Sources : http://www.smartgrids-cre.fr/index.php?p=vehicules-electriques-bilan-carbone
http://www.expert-ve.fr/voiture-electrique-bilan-c02.html
http://www.avem.fr/index.php?page=ve&cat=bilan_co2
Cela ne vaut que pour la France, grâce à son parc nucléaire. Dans d'autres pays, effectivement, le VE ne devient jamais plus propre (dans ceux à centrale électrique à charbon par exemple). Car l'équivalent CO2/km est supérieur à 100 g.
Dans tous les cas, pour la France, il est faux de dire que le VE est plus sale au final que le thermique, d'un strict point de vue des émissions de CO2.
De notre point de vue donc, et pour la France du moins, le VE n'est pas une mauvaise solution pour répondre à une "certaine forme" de mobilité.
Déposer un commentaire
Alerte de modération
Alerte de modération