La première portion de "route qui recharge" est entrée en service en France
Pierre-Olivier Marie , mis à jour
Sans le savoir, des milliers d'automobilistes français empruntent chaque jour la première portion d'"autoroute électrique" au monde. Une expérimentation prometteuse, même si elle suppose des investissements colossaux.

C’est un petit tronçon de 1,5 km sur l’A10, en amont du péage de Saint-Arnoult dans le sens Paris-Province, et sur lequel passent des milliers de véhicules chaque jour. Ici s’écrivent peut-être, en toute discrétion, les premières lignes d’un projet qui pourrait remodeler la mobilité électrique de demain.
Depuis le mois d’avril, Vinci Autoroutes, en partenariat avec Electreon, Vinci Construction, l’Université Gustave Eiffel et Hutchinson, teste en conditions réelles une portion de "route qui recharge". Le principe est celui de l’induction: disposées une dizaine de centimètres de la surface, quelques 900 bobines de cuivre (600 par kilomètre), alimentées par un puissant dispositif électrique en bord de route, alimentent les batteries de véhicules électriques expérimentaux par l’intermédiaire de récepteurs placés dans les châssis. "Le système inductif installé est capable de transférer en toute sécurité des puissances instantanées supérieures à 300 kW et des puissances moyennes supérieures à 200 kW", précise ainsi Vinci Autoroutes.


Les "véhicules-cobayes" – un poids-lourd, un bus, un utilitaire et une voiture – ont donc multiplié les passages ces derniers mois, de façon à démontrer la viabilité technique du dispositif. Et ce mercredi 22 octobre, lors de la conférence de presse à laquelle ont été invités Caradisiac et une poignée de médias, les premières conclusions incitent à l’optimisme : les batteries récupèrent bien de l’énergie au moment du passage sur le court tronçon, avec une efficience de l’ordre de 85%, confirmant les premières constatations faites à l’issue des phases de test validant ainsi le principe du "Charge as you drive" (rechargez en conduisant, NDLR).
Quitter l'autoroute batterie pleine
C’est "le premier projet au monde sur une autoroute en circulation", souligne Pierre Delaigue, qui pilote le projet pour Vinci Autoroutes et énumère les principaux avantages que représente un tel procédé : meilleure gestion des ressources du fait de l’inutilité des onéreuses batteries à grande capacité, autonomie quasi-illimitée et temps de trajets fortement réduits, à quoi s’ajoute une réduction potentielle de l’empreinte foncière grâce à des stations de charge moins nombreuses et/ou moins étendues. « En 30 minutes, une pompe à essence peut alimenter 6 voitures thermiques qui vont ensuite parcourir 500 à 600 km. Dans le même temps, une borne électrique va recharger une seule voiture qui couvrira deux fois moins de kilomètres. D’où l’intérêt de solutions complémentaires telles que la route électrique. Avec une puissance de l’ordre de 200 KW, on peut gagner un kilomètre d'autonomie par kilomètre parcouru pour un poids lourd et deux à trois kilomètres d'autonomie par kilomètre parcouru pour un véhicule léger.»

Et si le coût d’installation, estimé par les pouvoirs publics à 4 millions d’euros par kilomètre (toutes les voies seraient concernées, sauf celle de gauche), est élevé, il serait amorti en une trentaine d’années par le jeu du prolongement des concessions, vital par nature pour les sociétés comme Vinci Autoroutes et, bien sûr, par la revente de l’électricité aux usagers. Et Vinci Autoroutes de préciser qu’il faudrait 36 milliards pour couvrir 9000 km de linéaire d’ici 2035 : "A l’échelle européenne, 40 à 50 000 km feraient le job."
Des perspectives alléchantes, donc, même si cette innovation ne concernerait dans un premier temps que les poids lourds, lesquels "représentent 15% du trafic mais 45% des émissions polluantes", rappelle Vinci Autoroutes. Reste notamment à convaincre les pouvoirs publics de l’intérêt d’investir massivement dans cette "route électrique", et les constructeurs de véhicules d’équiper leurs modèles du système permettant cette recharge par induction. En attendant, Vinci Autoroutes aimerait pousser l’expérimentation plus loin, idéalement sur un axe Saint-Arnoult-Orléans qui correspond à une grande partie du trafic des camions sur son réseau.
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