Le gouvernement français a désormais un gros problème d'autoroutes
Maintenant que le fameux rapport étouffé par le gouvernement français sur la rentabilité des autoroutes privées scandalise tout le monde, le ministre des finances Bruno Le Maire cherche un moyen de se faire pardonner en visant les bénéfices ou la durée des concessions des sociétés.
Il y a quelques heures, Caradisiac publiait le fameux rapport de l’Inspection générale des finances de 2021 sur la rentabilité des concessions autoroutières privées. Celui-là même que le gouvernement français a tenté d’étouffer, ses conclusions étant implacables : les sociétés privées gérant les portions d’autoroutes françaises gagnent beaucoup plus d’argent que ce qui avait été prévu initialement lors de la privatisation de ces tronçons en 2006. Après les révélations du Canard Enchaîné en janvier puis notre diffusion de ce rapport complet, le gouvernement français et le ministre de l’économie Bruno Le Maire se retrouvent obligés de montrer qu’ils travaillent sur le sujet : alors que le prix des péages ne cesse d’augmenter (+4,75% en février 2023), il devient socialement difficile de justifier de tels profits sachant que le rapport expliquait qu’il était théoriquement possible de beaucoup baisser les montants demandés aux usagers au péage.
Le patron de Vinci Autoroutes (propriétaire de plus de la moitié du réseau autoroutier français via ses filiales) Pierre Coppey se défend de tout profit exagéré, prétextant que les droits de gestion des autoroutes ont été vendus chèrement par l’état au milieu des années 2000 à ces sociétés privées. Mais la rentabilité interne pour les actionnaires estimée par le rapport de l’Inspection générale des finances, aux environs des 12% pour les plus grosses sociétés alors que le projet de privatisation visait 7,67% en 2006, a beaucoup de mal à passer. « Les actionnaires qui se sont endettés ont largement profité de la baisse des taux d’intérêt », constate l’entourage de Bruno Le Maire d’après les journalistes du Monde. Alors, que peut faire le ministre de l’Économie pour rétablir l’équilibre face à ce qui est devenu un vrai scandale médiatique ? La marge de manœuvre du gouvernement est réduite, sachant que les concessions privées autoroutières ne doivent arriver à échéance qu’entre 2031 et 2036 et qu’il paraît difficile de rompre de tels contrats.
Récupérer une partie des profits ?
Alors que Bruno Le Maire reconnaît une « erreur », le ministre va saisir le conseil d’état pour voir comment il sera possible de récupérer une partie des bénéfices des sociétés autoroutières privées ou de raccourcir la durée de leurs concessions. Le rapport de l’Inspection générale des finances expliquait déjà qu’il faudrait une « volonté politique forte » pour arriver à de tels ajustements, sachant qu’ils pourraient « détériorer les relations entre l’Etat et les sociétés concessionnaires d’autoroutes ». Il y aurait un risque que, confrontées à un durcissement de ces relations et à un raccourcissement de la fin des concessions, ces sociétés décident de ne plus investir dans leurs réseaux autoroutiers et ne les rendent en mauvais état. Bref, l’affaire ne sera pas simple à gérer pour le gouvernement français…
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