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Le limiteur intelligent rendra-t-il bête ?

Le limiteur de vitesse automatique ne sonne pas la fin de nos libertés ni l’avènement de Big Brother. Mais il est un pas de plus en direction des bras rassurants de Big Mother.

Le limiteur intelligent rendra-t-il bête ?

Cette innovation-là, elle ne vient ni d’Allemagne, ni du Japon, ni des États-Unis, mais de France. Mais je sens que personne ici n’a envie de crier Cocorrico !

Il y a 22 ans en effet, en 1999, le projet LAVIA (Limiteur s’adaptant à la vitesse autorisée) était lancé par la DSCR (Délégation à la sécurité et à la circulation routière) qui dépendait alors du ministère des Transports.

L’idée était déjà là : coupler le limiteur de vitesse aux informations de limitation de vitesse fournies par le GPS.

Seule différence avec le dispositif qui sera bientôt généralisé sur nos voitures (et fort bien décrit dans notre enquête), ce projet qui fut testé sans grand succès en 2006 dans les Yvelines ne prévoyait pas, en complément des informations GPS, de caméra de lecture de panneaux. Et surtout le LAVIA n’était pas « facultatif » : on pouvait « forcer » le limiteur en enfonçant la pédale d’accélérateur, mais pas le déconnecter à l’inverse de celui qui nous sera imposé.

Autre différence notable, l’appellation du machin. Il faut reconnaître que ISA (intelligent Speed Assistance ou en français AIV, Adaptation intelligente de la vitesse) évoque la bonne copine qui aide à lever le pied quand LAVIA sonne comme une marque de poire à lavement, ce qui peut prêter aux métaphores douteuses.

ISA ne va pas provoquer d’émeute

On peut grogner, hurler, y voir la fin des libertés fondamentales et l’avènement de Big Brother, promettre un effondrement du marché automobile comme dans les trois cent soixante (360 !) commentaires de l’article cité plus haut, je parie que sorti des cercles étroits de la passion automobile, le machin ne va pas provoquer d’émeute.

Et même qu’il sera fort bien accepté par l’immense majorité des automobilistes, ceux qu’excèdent les incessants changements de limitation, ceux qui passent tous les jours la frontière séparant un département à 90 km/h d’un autre à 80 km/h, ceux innombrables qui se font sans cesse flasher pour 1, 2 ou 3 km/h de trop alors qu’ils s’efforcent de rouler à l’allure réglementaire.

Le limiteur intelligent rendra-t-il bête ?

Pour eux, ISA sera une innovation utile et vite indispensable.

En attendant, qui se donnera la peine de le déconnecter pour s’épargner ses alertes sonores et lumineuses en forçant la bride de la pédale ? Bien sûr, les abonnés à la file de gauche des autoroutes, ceux aussi qui sur départementale dépassent avec 20 ou 30 km/h de plus. Mais ils ne sont pas si nombreux.

Et le seront de moins en moins à mesure que le dispositif se diffusera et que s’effaceront les minuscules écarts de vitesse entre ceux qui roulent à la vitesse compteur, ceux qui roulent à la vitesse GPS et ceux qui roulent à la vitesse GPS + les 3, 4 ou 5 km/h de marge de tolérance du radar. Car avec cette homogénéisation des allures, se formeront de véritables trains de voitures qu’il sera périlleux de dépasser.

Le facteur humain sonne toujours trois fois

Reste que tout ne sera pas forcément merveilleux dans le meilleur des mondes de Chantal Perrichon.

D’abord, il y a la fiabilité du système. Les actuels limiteurs « intelligents » se prennent parfois les pieds dans les panneaux de voie de décélération ou ceux destinés aux seuls poids lourds.

Même l’humain se trompe : un jour, dans une longue descente de l’A1, j’ai failli percuter un conducteur qui a freiné brutalement devant un panneau 70 dont le petit rectangle portant le logo d’une caravane était masqué par une barrière anti-éblouissement. Dix ans après, le défaut n’a pas été corrigé.

Quelle information sera privilégiée par ISA, celle de la signalisation ou du GPS ?

Et à propos de facteur humain, il est certain que beaucoup de conducteurs mettront à profit ISA pour abaisser encore un peu plus leur niveau d’attention, pour avoir encore moins les yeux sur la route, et davantage sur l’écran de son téléphone. Déjà, avec les régulateurs intelligents, les alertes de franchissement de ligne et les « redresseurs » de volant, certains n’ont plus d’autres motifs de regarder la route que d’y chercher panneaux de limitations et radars.

Ensuite, même question qu’avec les futures voitures autonomes : qui sera responsable en cas d’accident causé par une décélération ou un freinage intempestif ? Le conducteur de devant ? Celui de derrière ? Le constructeur ? Le gestionnaire de voirie ?

La question légale vaut aussi pour les PV de ceux qui se feront flasher « de bonne foi » malgré les bons soins d’Isa. Je parie d’ailleurs que c’est bien pour ceci, autant que pour ne pas dissuader l’acheteur, que le système sera déconnectable, afin que le verbalisé ne puisse opposer la défaillance technique au verbalisateur : comment prouver qu’il n’avait pas désactivé le système ?

Le limiteur intelligent rendra-t-il bête ?

Big mother is watching you

Reste que cette possibilité de déconnexion - en espérant qu’elle passera par un simple bouton et non via un écran à base de menus et sous menus infernaux – clôt tout débat sur l’emprise croissante de Big Brother.

Ceux qui voudront ne pas respecter les limitations le pourront encore et grand bien leur fasse.

Le « Grand Frère », ce n’est pas ISA qui, elle, serait plutôt « Little Sister », Lui, il s’annonce par la boîte noire qui, avec plusieurs aides à la conduite, sera obligatoire dans tout nouveau modèle en mai prochain, et en mai 2024 pour toute voiture neuve.

Le limiteur intelligent rendra-t-il bête ?

Vitesse, régime moteur, angle du volant, action sur les pédales, clignotants ou phares, violence du choc, déclenchement des airbags, position GPS, port de la ceinture, l’enregistreur de données d’événement (EDE) consignera absolument tout juste avant et juste après la collision.

À l’exception, et c’est heureux, de la conversation de l’équipage contrairement à celle de nos avions.

Pour l’heure, il n’y a pas péril : toutes ces données ne seront accessibles qu’aux seules forces de l’ordre puis « anonymisées » avant d’être exploitées pour la recherche en accidentologie. Et, si l’on en croit ce texte du Parlement européen ni l’assureur, ni le pandore ne pourront les utiliser en recherche de responsabilité.

Le limiteur intelligent rendra-t-il bête ?

Il n’empêche, l’outil existe et pourrait très facilement se transformer en mouchard, bien plus intrusif que celui des chauffeurs routiers. Plus besoin de radars, il suffirait au gendarme de brancher un lecteur pour voir défiler les infractions commises. Plus simple encore, la voiture pourrait envoyer, via l’e-call, la liste des infractions commises directement au centre de Rennes.

Là encore, comme pour ISA qui ne fait qu’associer des éléments existants, il suffirait d’un vote au Parlement européen pour instituer cet espionnage généralisé.

Inacceptable et impossible dans une démocratie ? Je ne parierais pas une caisse de champagne là-dessus. Car si Big Brother fait peur, j’ai comme l’impression que de plus en plus de mes concitoyens aspirent à être tenus par la main et maternés par une Big Mother.

 

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