Pollution - Quand l'autophobie nous enfume et nous fait tousser…
J'avais envie de faire un billet rigolo pour la nouvelle année. Je n'y arrive pas, je tousse trop. Et ça me met en rogne cette chape de fumée dans laquelle on baigne depuis un mois. Un quart de siècle de lutte contre la pollution atmosphérique pour arriver à ça !
Si le dossier du chômage avait été géré de la même manière, on compterait 25 millions de sans-emploi dans le pays. Si la sécurité sociale avait été administrée avec le même amateurisme, son déficit égalerait le PIB du pays et l'espérance de vie aurait reculé de dix ans.
En vingt-cinq ans de normes européennes, d'incitations fiscales et de restrictions de circulation, la qualité de l'air ne s'est pas améliorée, on a seulement remplacé des polluants par d'autres. Un énorme fiasco alors que n'ont manqué ni les connaissances scientifiques ni les moyens techniques.
Car cette faillite signe la victoire du politique sur le scientifique, de l'idéologue sur le technocrate. Lutter contre la pollution, ce n'est pas combattre le chômage : si l'économie est une science molle sujette à croyances et complications, la chimie de l'air et la combustion des hydrocarbures relèvent de la science dure : ça ne se débat pas.
Or, la lutte contre la pollution atmosphérique a été captée par des "croyants" qui l'ont confondue avec leur saint combat contre l'automobile, cette chose affreuse qui fait préférer au citoyen les plaisirs égoïstes de la locomotion individuelle au "vivre ensemble" des transports en commun.
Diesel : le promouvoir quand il est sale, l'interdire quand il est propre
A la fin des années 80, on commençait à avoir de sérieux doutes sur la salubrité du diesel et déjà des voix réclamaient l'alignement des taxations de l'essence et du gazole. La réglementation européenne se montrait impuissante à rendre le diesel propre, ne parvenant qu'à réduire la taille de ses particules et faire exploser ses émissions d'oxydes d'azote, les fameux NOx.
Cela, les scientifiques l'ont dit très tôt. Qu'ont fait les gouvernements ? Ils ont laissé une fiscalité criminelle augmenter chaque année la part du diesel dans les ventes. Et cela au détriment du moteur essence qui dans l'intervalle était devenu propre : alors que le Parigot commençait à tousser, Los Angeles se débarrassait de son smog. Puis vint l'apothéose, le bonus-malus qui fit grimper à 75 % la part de marché du diesel, jusqu'à en remplir les centres-villes où il était resté minoritaire. Regardez une carte de la pollution dans une grande ville : les artères principales, marquées de rouge, sont parcourues par des dCi, des TDI, des HDI et des Tdci que trois gouvernements successifs ont subventionnés à hauteur d'un milliard et demi d'euros de déficit pour le budget de l'Etat.
Chute de la blague, quand le diesel, à coups de FAP et de SCR, peut enfin revendiquer sa propreté, se montrant même plus vertueux que le moteur à essence, on décide de l'interdire. Même en cherchant bien, je vois mal comment on aurait pu la jouer plus stupidement, hormis en réhabilitant le gazogène et la locomotive à charbon.
Restriction de circulation : moins rouler pour plus polluer
A Paris, la récente fermeture des quais de Seine à la circulation a poussé la logique jusqu'à la caricature : les quais hauts et tout le centre de Paris ont été transformés en un parking de voitures se déplaçant au ralenti avec des effets jusque sur le périphérique et en banlieue. Et bien sûr une pollution en hausse, car on ne transforme pas impunément un trajet de 30 minutes en cauchemar d'une heure. Cette idéologie qui est à l'œuvre depuis 2001 avec le premier mandat de Bertrand Delanoë est devenue l'alpha (Romeo) et l'(Opel) oméga des politiques de transport urbain, d'Aubenas à Wattrelos. Il s'agit de dissuader le citadin de prendre sa voiture en rendant sa circulation et son stationnement infernaux à coups de rétrécissements de chaussée et de suppressions de places.
Cela pourrait se défendre, il fallait bien sortir du tout voiture des années 70 et 80. Mais il aurait d'abord fallu développer une proposition alternative de transports en commun. Elle n'existe pas en région parisienne où le rail n'a pas suivi l'urbanisation galopante des lointaines couronnes. Résultat, de l'aveu même de la RATP, depuis les premières mesures anti-voitures de 2002, la variable d'ajustement du transport parisien est le scooter, dont le parc francilien a vingtuplé. Sans doute aurait-il fallu dépenser plus pour les transports en commun et moins pour les festivités, événements, décorations et restaurations… Mais les habitants de la capitale de la France veulent-ils payer pour les banlieusards ?
Les pollueurs qui ne font pas tousser
Ce qui donne le plus à penser qu'il ne s'agit pas tant de lutter contre la pollution que contre le véhicule personnel, c'est la totale indifférence des pouvoirs publics vis-à-vis d'autres sources massives de nuisance qui n'ont rien d'automobile. Exemple, les cheminées d'agrément que Ségolène Royal s'est idiotement refusé à prohiber en ville. On sait pourtant que ce mode de "chauffage" à ne pas confondre avec les poêles à bois ou à granulés 10 à 15 fois moins polluants, est non seulement inefficace - 90 % des calories partent dans la cheminée - mais en plus il participe fortement à la pollution aux particules.
Les scientifiques distinguent désormais les particules carbonées d'origine "fossile" (pétrole et charbon) de celles de carbone "récent" du chauffage au bois. Résultat, ce ne sont pas les centrales au charbon allemandes qui nous enfument cet hiver - depuis quand les vents dominants viennent d'Est ? - ce sont les bonnes petites flambées à l'heure de l'apéro. A l'heure où j'écris ces lignes dans ma banlieue pavillonnaire parfumée tous les soirs au feu de bois vert, 40 % des cochonneries qui s'infiltrent dans les poumons des Franciliens viennent, selon AirParif, des feux d'agrément. Dans certaines vallées montagnardes, c'est 80 %. Merci qui ? Merci Ségolène.
Alors, pourquoi ne pas interdire les feux de cheminée les jours de pollution ? Cela ne rendrait-il pas plus service que la circulation alternée ? Sans doute, mais cela ferait-il avancer la cause de l'autophobie ?
Sur ce, je vous présente mes meilleurs vœux pour cette nouvelle année, plein de bons vents d'ouest et pas trop d'anticyclones.
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