Pour l’automobile, pas de teuf en 2019
Profitons du moment et des chiffres excellents, car la fête risque de ne pas durer. En France, l’an passé, 2,17 millions d’autos ont trouvé preneurs. Champagne donc. Sauf que le breuvage, aussi pétillant soit-il, est volatil. En France comme partout dans le monde, l’année qui vient ne s’annonce pas bien.
Mazette, quels scores. L’an passé, plus de deux millions d’autos ont été immatriculées chez nous, du jamais vu depuis 7 ans. Renault se pavane en tête, même si le losange recule de 2,5 %, et chez PSA on exulte avec une hausse de 6,2 %. C’est simple, la France aime la bagnole plus que jamais et adore ses constructeurs nationaux comme aucun autre pays. Tout va bien, donc. Les usines peuvent tourner à plein régime, et les réseaux sont assis sur des matelas de bons de commande. Sauf que ce bon temps, c’était avant. Avant le mois de septembre. Une époque de huit mois tellement fastueuse depuis janvier 2018, que la plongée de fin d’année a été effacée. Mais elle n’en est pas moins réelle. Au mois de novembre, les ventes ont chuté de 5 %, et en décembre, de 14,5 %, carrément. La faute aux gilets jaunes ? Sûr que la visite des zones commerciales où se nichent les show-rooms automobiles n’a pas été facilitée par les blocages de ronds-points.
Mais trois autres phénomènes ont très certainement conduit à la baisse de fin d’année. Les grosses ventes du premier semestre ont forcément asséché une partie de la demande, car on ne renouvelle pas son auto tous les six mois. En outre, les nouvelles normes WLTP ont conduit les constructeurs à immatriculer à la hâte des milliers de voitures avant fin août, la date butoir d’entrée en vigueur des nouvelles règles étant fixée au 1er septembre. De plus, nombre d’acheteurs préfèrent attendre 2019 pour passer à l’acte, en raison de la mise en place du nouveau barème des différentes primes à la conversion.
L'Europe au ralenti
Les normes WLTP vont bien finir par être correctement appliquées par les constructeurs et les primes à la conversion booster, un peu, un marché au ralenti cette année. La France pourrait bien limiter les dégâts et même devenir le premier de la classe européenne. Car l’Italie fait grise mine, l’Allemagne tousse, et l’Angleterre n’est pas fière, pour cause de Brexit douloureux.
Heureusement, l’auto est un marché mondialisé et si l’Europe est dans la mouise – un continent ou les gens achètent surtout des petites voitures, avec de petites marges en plus –, il reste deux bons gros marchés qui sauveront les constructeurs, les équipementiers et les salariés de toutes ces grosses entreprises.
La Chine et les États-Unis tirent le frein à main
Il faut donc compter sur les États-Unis et ses 17 millions de voitures annuelles, ainsi que sur la Chine qui en immatricule, bon an mal an, 24 millions. De quoi faire tourner les usines de toute la planète auto et éponger les manque à gagner de la vieille Europe.
Mais ce scénario idéal a lui aussi du plomb dans l’aile. La Chine connaît, pour la première fois depuis trente ans, une érosion de ses ventes. Elle est liée à la fin des aides à l’achat et à la guéguerre larvée que le pays entretient avec l’Amérique de Trump. Résultat : - 3 % au compteur. L’ouest n’est pas beaucoup mieux loti. Si les États-Unis connaissent un marché annuel stable depuis des années, il s’avère quelque peu artificiel, car dopé par des promos jamais vues et des prêts à taux zéro jamais connus. Sauf que ces opérations coûtent cher, et si les ventes des constructeurs locaux, mais aussi des marques coréennes et japonaises sont à la baisse en Chine, ils ne pourront plus recourir à ces méthodes de dumping.
Mais alors, si la Chine est en berne, l’Europe instable et les États-Unis sur le fil du rasoir, dans quel coin de la planète reste-t-il encore un gisement suffisant de clients ? C’est ce que se demande la planète auto en faisant des yeux doux à l’Inde. Car voilà un eldorado qu’il est beau.
Certes, on est loin des chiffres faramineux des empires américains et chinois, mais avec 4,9 millions d’immatriculations en 2018, le sous-continent a progressé de 9 %. Surtout, le pays dispose de 25 voitures pour 1 000 habitants, alors qu’en Europe, on en compte 600 pour le même nombre de quidams, quand les US en détiennent 800.
Alors tous les constructeurs fantasment, rêvent de s’y développer, si ce n’est déjà fait, et se disent que la bouée de sauvetage de cette tempête à venir pourrait bien avoir un petit goût de curry.
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