Présentée quatre mois après la Mercedes Classe E normale, au lieu d’un an généralement pour les versions AMG par rapport aux modèles de la maison mère en raison notamment d’un développement conjoint, la E63 sera commercialisée en France en septembre 2009. Elle devrait séduire une vingtaine d’amateurs chez nous (AMG vend chaque année en France tous modèles confondus environ 300 exemplaires), bien moins qu’aux USA qui depuis des décennies reste le marché de prédilection des Classe E revues et corrigées par AMG.

La tenue de sport est un brin plus voyante que pour l’ancienne E by AMG, mais plus discrète que celle de la petite sœur, la C63. On vous laisse juge du traitement cosmétique qui touche à l’extérieur très classiquement les boucliers avant (avec feux de jour à LED) et arrière, les sorties d’échappement, les jantes, les jupes latérales, et en y regardant bien les ailes bombées. Ce n’est pas uniquement pour la galerie, la voie AV est bel et bien élargie de 56 millimètres. Un petit déflecteur de coffre est disponible dans différents packs optionnels, mais on ne sait pas s’il améliore réellement la portance à haute vitesse. AMG reste d’ailleurs peu disert sur les valeurs aérodynamiques de la E 63. On peut simplement espérer que les Cx et SCx excellents de la Classe E de série ne soient pas trop dégradés. Ce qui devrait être le cas puisque avec le pack conducteur AMG (4 000 €), la bridage de la vitesse maximale passe de 250 à 300 km/h.

Essai vidéo - Mercedes E63 AMG : le loup et l’agneau

Même discrétion à l’intérieur, où on trouve bien quelques sigles AMG ici et là, notamment sur les fonds de compteurs (celui de vitesse est gradué jusqu’à 320 km/h), un menu d'informations AMG avec chronomètre Racetimer,

de sobres inserts en frêne noir, un volant Sport AMG à quatre branches, des sièges AV Sport maison multicontours avec fonction massage au maintien impeccable pour tous les gabarits, à sellerie cuir (disponible en noir/gris et moka), et quelques autres signes distinctifs de sportivité sans extravagence. Ce salon roulant reste proche de celui d’une E 500, avec un équipement de série toutefois plus complet. Et bien sûr, avec toujours une bonne habitabilité pour 4 ou 5 personnes, et un vrai coffre de grande routière. Certes, avec la banquette fixe, la seule possibilité de modularité se limite à la trappe à ski optionnelle (230 €, avec sac de protection intégré).

Evidemment, le plus impressionnant reste sous le capot. Il s’agit du magnifique V8 atmosphérique de 6208 cm3, apparu en 2006 sur le ML (510 ch), la E 63 de la précédente génération (514 ch) ou le CLK 63 AMG (481 ch), et aussi adopté par la CLS (514 ch) ou la C63 (457 ch). Plein de caractère, sans la brutalité parfois trop affleurante de la série des 55 compressé, ce moteur est une vraie réussite. Hypercarré contrairement aux V8 Mercedes, il se montre très vif pour un V8 de plus de 6 litres. Ici, le couple maxi reste à 630 Nm à plus de 5000 tr/min, mais il développe 425 ch à 6800 tours (11 ch de mieux que la E 63 de 2006). Ses montées en régimes sont moins démoniaques que celles de la M5 qui culmine au delà de 8000 tr/min, mais au rupteur à 7200 tours il semble encore en pleine forme.

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En revanche, il est plus plein à tous les régimes que le V10 bavarois et rivalise presque sur ce terrain avec le V 10 à double turbo de l’Audi RS6. Avec plus de 500 Nm entre 2000 et 7200 tours, pas très étonnant que le V8 pousse fort tout le temps. Le meilleur des deux mondes. Pour les oreilles, le moteur AMG se fait aussi gratifiant que le V10 de la M5, dans un style différent. Le V8 émet un véritable grondement sourd, puis bien rauque à l'accélération, et comme AMG semble avoir conservé la sonorité à l'échappement de la C63 (avec une légère sourdine?), le résultat devient dément en forte charge. A vitesse stabilisée, la quiétude est de mise et l'ambiance sonore à bord très reposante. Evidemment, le V8 reste très policé aux allures faibles ou conventionnelles. Le meilleur des deux mondes encore. Pour la touche exclusive, on notera que chez AMG, à l'instar d'Aston Martin, chaque moteur reçoit une plaque sur laquelle est gravée le nom du mécanicien qui l'a assemblé de A à Z. Nous avons visité de nuit l’atelier de montage en question. Opérationnel depuis 2002, il est toujours comme neuf et d’une propreté clinique.

Le rendement énergétique n’est pas mal non plus. AMG annonce une consommation en baisse de 12% par rapport au modèle précédent, malgré la puissance accrue. Cela tient à la transmission, à l'aéro en progrès, et à quelques modifications dont les frictions internes du moteur réduites ou l’adoption d’un alternateur avec récupération d’énergie au freinage. La consommation atteint quand-même un respectable 12,6 l/100 en cycle mixte. En pratique, notre conso a oscillé entre 15 et 24 l/100 sans jamais rechercher l’économie et la moyenne devrait tourner autour de 17 litres, équivalente à elle d'une M5. C’est plus d’un litre de moins que la E55 AMG de début 2003 (qui disposait d’un V8 5.4 litres à compresseur de 476 ch et 700 Nm et d’une bvm5 Speedshift).

Les émissions de CO2 atteignent des sommets avec 299 g par kilomètre. C’est toutefois un peu plus raisonnable que ses rivales teutonnes (331 g pour la RS6 et 344 g pour la M5). Si la E 63 s'abonne malheureusement au super malus annualisé de 2 600 € (pour les particuliers), les acheteurs se consoleront en se disant que la E 500 de 388 chevaux n’y échappe pas non plus (256 à 261 g). Pour un amateur fortuné, le pire n'est pas là, mais bien dans le rayon d'action de cet avion de chasse.

Si les concurrentes n’offrent pas une autonomie extraordinaire avec leurs réservoirs d'environ 70 litres, la E63 fait encore moins bien avec ses 64 litres. Pour situer le problème, sur un Bale/ Berlin (850 km) rapide en moins de 6 heures (à 141 km/h de moyenne alternant les portions limitées à 120 km/h et quelques chevauchées à 250), obligée de ravitailler trois fois (17 l/100), l’AMG arrivera après une E 350 CDi au réservoir de 80 litres qui achèvera elle le trajet avec son premier plein (13 l/100). Un peu énervant, tout comme le rayon d’action en conduite réellement sportive sur route de montage limité à 270 km, et pis sur circuit.

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La boîte de vitesses sport à 7 rapports « Speedshift » MCT spécifique à cette version apporte un agrément en conduite sportive appréciable. Dépourvue de convertisseur hydraulique, remplacé par un embrayage humide, et avec une gestion appropriée en mode S et S+ (25 % plus speedée que la S), elle apporte une réactivité et une rapidité dans le passage des rapports (plus à la montée qu’au rétrogradage toutefois, ce dernier étant ponctué d’un double embrayage automatique) dignes des meilleures transmissions du marché. De quoi être dégoûté de la 7G-Tronic classique de la E 500 (et des E à six cylindres). Tout en restant parfaitement adaptée à une conduite apaisée en mode « C » (Controlled Effiency). En revanche, le mode M (manuel) avec palettes au volant ne semble pas apporter grand chose, même si AMG mentionne un gain de 100 millisecondes.

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Si la E63 AMG se conduit au quotidien avec la facilité d'une Golf, elle sait aussi faire parler la poudre. A 1 775 kg en poids constructeur sans le conducteur, la nouvelle E63 pèse à peine quelques kilos de plus l’ancienne et une poignée de moins que la M5, ce qui lui permet d’afficher un rapport poids/puissance flatteur de 3,5 kg/ch. Le 0 à 100 km/h est abattu en 4,5 secondes selon AMG, ce qui en fait une des plus véloces berlines 4 portes de la place. Nous n’avons pu vérifier ce chrono lors de ce premier essai réalisé en majeure partie sous la pluie, mais il paraît presque réaliste (si on se réfère aux 4,9 secondes pour une CLS 63 de 514 ch). C’est un ou deux dixième de moins que la RS6 ou la M5, la première considérablement plus lourde, et l’autre moins puissante (et surtout moins coupleuse). Il faut donc chercher quelques spécimens rares comme la méchante Cadillac CTS-V ou la nouvelle Porsche Panamera Turbo pour trouver mieux.

La vitesse maxi est limitée électroniquement à 250 km/h, mais comme nous l’indiquons précédemment une option 300 km/h est possible. Comme de jour il est quasiment impossible de dépasser les 240 km/h en toute sécurité sur les autoroutes allemandes (et dans la plupart des autres pays européens), il ne nous paraît pas vraiment impératif d’opter pour ce débridage. Pour en finir avec les perfs et l’agrément de ce dragster, il va de soi que les reprises sont ébouriffantes, bien aidées en cela par le couple camionesque du V8. Sur le gras, cette cavalerie demande d'ailleurs un pied droit de ballerine dès que les réglages "sport" sont sélectionnés.

Reste à vérifier au chapitre suivant si le formidable potentiel de la E 63 réussit à s’exprimer sur la route.