En Suisse, le Conseil fédéral doit déterminer si les solutions choisies pour diminuer les émissions de CO2 sont adéquates afin de respecter les engagements pris dans le cadre du Protocole de Kyoto. Le gouvernement se prononcera en septembre 2007 dans un contexte de surenchère électorale sur les dossiers climatiques. Le journaliste Ron Hochuli du journal suisse "Le Temps" s'est penché sur le sujet épineux suivant : la taxe sur les carburants, une solution éventuelle. Et le débat est vif la concernant ! Il souligne que depuis décembre 2006, c'est une certitude : une taxe CO2 sera bel et bien prélevée sur les combustibles fossiles tels que mazout, gaz naturel, charbon. Les carburants ne sont pas logés à la même enseigne. Comme l'a imposé la droite parlementaire qui ne voulait pas d'une seconde taxe, ils sont frappés par un centime climatique. Prélevé à la pompe (1,3 ct par litre d'essence), ce centime climatique doit générer quelque 720 millions de francs qui seront réinvestis dans des programmes de réduction de CO2. La Fondation centime climatique, créée par l'industrie pétrolière, soumettra dans quinze jours son business plan au Conseil fédéral. Il dira s'il atteint les objectifs ou s'il faut également introduire une taxe CO2 sur les carburants.
Le socialiste suisse Roger Nordmann (PS/VD) affirme : "Tout le monde parle du Protocole de Kyoto. Ce traité est certes important : il s'agira bien de réduire, d'ici à 2012, les émissions nocives de 8% par rapport à 1990. Mais plus importante encore est la loi sur le CO2, votée en Suisse, et qui arrivera à échéance en 2010. Cette loi, entrée en vigueur en 1999, contraint la Suisse à réduire ses émissions de 10% par rapport à 1990. Comme le spécifie l'article 2, les émissions dues aux combustibles doivent être réduites de 15% et les émissions issues des carburants de 8%. Or, ce résultat ne sera pas atteint. Nous en sommes loin dans le domaine des carburants. Donc, une taxe CO2 s'avère indispensable. L'article 3 de la loi sur le CO2 stipule que si les mesures librement consenties se révèlent insuffisantes, comme le centime climatique, la Confédération perçoit une taxe CO2."
Le journaliste évoque le point de vue politique
A en juger par les propositions étudiées actuellement, tous les partis - hormis l'UDC - paraissent inquiets face à l'évolution des émissions de gaz. Le PDC est en train de développer un modèle : à la différence de la taxe sur les combustibles, les recettes ne seraient pas intégralement reversées à la population (via une légère réduction des primes maladie) et aux entreprises (à travers une baisse des cotisations AVS). Elles serviraient en partie à des programmes de réduction de CO2. La gauche appuie une solution de ce type : "Une taxe doit financer des projets précis. Et son montant doit avoir un effet incitatif. Or, une hausse de 1,3 centime (équivalent du centime climatique) n'a aucune incidence sur la consommation. Le but de l'industrie pétrolière est d'ailleurs de conserver son marché intact."
Le Vaudois a développé une autre variante : selon lui, il faudrait augmenter le prix du litre d'essence d'environ 10% (16 centimes). Près de la moitié des recettes de la taxe servirait à financer le développement des transports publics qui bénéficieraient ainsi d'une manne de 4 milliards de plus entre 2009 et 2018.
Les radicaux, eux, se sont ralliés au principe du pollueur-payeur. Ils rejettent toujours, comme les milieux routiers et pétroliers, l'idée d'une taxe CO2. Mais la modification de la loi sur l'imposition des huiles minérales fait actuellement l'objet d'une consultation interne au parti. L'idée est de majorer le prix de l'essence d'environ 20 centimes. En contrepartie, les taxes cantonales sur les véhicules à moteur, forfaitaires, seraient abrogées. Les automobilistes verraient ainsi leurs coûts fixes baisser. Problème : la modification de la loi serait sujette à référendum. Or, remplacer une ponction cantonale par une imposition fédérale ne recevra jamais l'aval des cantons.
Ron Hochuli conclut que l'introduction d'une taxe CO2 sur les carburants ne nécessiterait qu'une simple décision du Conseil fédéral. Le ministre de l'Energie et de l'environnement Moritz Leuenberger a insinué, ces dernières semaines, son scepticisme à l'égard du centime climatique. Et ses services envisageraient l'introduction d'une taxe pour assurer le respect de la loi sur le CO2. Mais le gouvernement a déjà refusé une première fois le principe d'une taxe. La proximité des élections, en septembre, pourrait-elle le conduire à changer d'avis? Rien n'est moins sûr : la Suisse devra bel et bien payer des pénalités si elle n'atteint pas les objectifs du Protocole de Kyoto. Mais rien de tel n'est prévu en cas de violation de sa propre loi sur le CO2.
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