Alors que les constructeurs affichent des bénéfices, le déficit commercial de l'automobile n'en finit plus d'augmenter
Les profits des constructeurs sont, pour certains d'entre eux, flamboyants, mais en parallèle, le déficit du commerce extérieur de la filière s'aggrave. Paradoxe ? Pas vraiment : la réindustrialisation promise tarde à venir et les marques profitent des pays ou le prix de la main-d’œuvre est moins élevé qu'en France. En parallèle, la transition vers l'électrique, qui se traduit déjà dans les ventes, ne touche pas encore les usines.
Même au fond des abysses, on peut creuser encore. C’est ce que fait allégrement la filière automobile française en matière de déficit commercial extérieur. Certes, nos constructeurs affichent des chiffres en vert, avec un bénéfice net plutôt effronté de 16,8 milliards pour Stellantis, tandis que Renault sort enfin des affres financières ou il était plongé. Mais cette euphorie a un prix : le sacrifice de la balance commerciale hexagonale que la filière fait plonger dans le négatif.
Une chute de 12 milliards en 2019 à 17,46 milliards aujourd'hui
Car depuis 2019, le solde en matière d’exportations confronté aux importations est largement en faveur des secondes. Il était à l'épque de 12 milliards et a atteint 15,6 milliards au long de l’année 2022. Mais selon les chiffres livrés par la douane française cette semaine, il culminerait à 17,46 milliards entre le mois de juin de l’année dernière et le même mois en 2023. La faute à qui ou à quoi ? À une tradition franco-française et un gros retard à l’allumage en matière de réindustrialisation des voitures électriques.
C’est que chez nous, on aime avant tout les petites autos pas chères et de marque française (ou presque). C’est une spécialité hexagonale et les Renault Clio, Dacia Sandero et Peugeot 208 forment le trio de tête des ventes depuis des années. Sauf que « pas cher » ne rime pas vraiment avec "made in France". Alors la petite Renault est assemblée en Turquie et en Slovénie, la Dacia est devenue marocaine après avoir été roumaine pendant des années, la 208 a suivi la même destination, même si elle est aussi produite en Slovaquie. L’enjeu des constructeurs est clair : on sacrifie la balance commerciale du pays pour tenir les entreprises à flot (dans le cas de Renault) et engranger les profits (dans le cas de Stellantis).
Des promesses d'un avenir radieux
Évidemment, les usines françaises des deux groupes ne sont pas fermées. Peugeot produit toujours sa 308 à Mulhouse, et son 3008 à Sochaux. Mais cette dernière est en fin de vie, comme la Zoe de Renault assemblée à Flins. Même le Renault Austral, haut de gamme du moment du losange est assemblé en Espagne. Bien sûr, Carlos Tavares pour Stellantis, comme Luca de Meo pour Renault, ont fait des promesses pour un avenir plus radieux, et une réduction du déficit commercial extérieur plombé.
Le premier a promis à Emmanuel Macron de produire 12 nouveaux modèles en France, mais pas la 208 électrique qui vient de filer en Espagne qui devient décidément l’Eldorado de l’assemblage automobile. De son côté, Luca de Meo a fait des promesses lui aussi, assurant que sa future R5 sera bel et bien fabriquée dans l’hexagone, à Douai dans les hauts de France. Mais à quel prix alors que la bataille autour des voitures électriques à 25 000 euros risque de faire rage en Europe ?
Ces autos électriques, qui représentent désormais 15 % de parts de marché, sont elles aussi responsables de la dégringolade du déficit commercial. Car à part la Zoe, elles sont toutes importées. Américaines fabriquées en Allemagne ou à Shanghai (Tesla), Chinoises produites en Chine (MG) ou Franco Roumaines assemblées dans l’empire du milieu (Dacia Spring), elles se contentent de remplir nos rues, mais pas les coffres de l’économie française. Alors que faire ?
L’exécutif y songe. À coups d’aides à la construction de gigafactories en France, et d’appels du pied à Elon Musk pour qu’il installe une usine chez nous, Emmanuel Macron tente d’inverser la tendance et promet 2 millions de voitures électriques assemblées dans l’hexagone en 2030. D’ici là, sept longues années de déficit commercial nous attendent. Voir plus, si la deadline présidentielle n'est pas respectée.
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