Avec le rétrofit, ça fit… mais pas assez vite !
Poussées par la réglementation et la nécessité de verdir leur parc, les entreprises se tournent vers le rétrofit pour réduire les émissions de leur flotte. Une solution écologiquement et économiquement intéressante mais encore balbutiante. Bientôt le grand saut ?
Verdir sa flotte et sans investir dans un véhicule neuf ? Pour nombre d’entreprises, notamment dans le secteur public, la clé de l’équation se trouve dans le rétrofit. Une opération qui permet de transformer un véhicule thermique en modèle GNV, GPL, hydrogène, hybride ou électrique. Pour pouvoir rétrofiter son véhicule, il faut que celui-ci ait plus de 5 ans. Ce qui est généralement le cas des VUL diesel avec plus de 100 000 km au compteur, les principaux modèles visés pour être rétrofités.
« Il y a plus de 6 millions de VUL qui roulent en France, dont 4 millions sont éligibles au rétrofit » explique Jean-Jacques Serraf, co-président du métier rétrofit au sein de Mobilians et directeur général de Qinomic Mobilities, acteur majeur sur le secteur.
Au niveau européen, les 29 millions de VUL sur les routes émettent à eux seuls près de 30% des émissions de CO2. Une véritable opportunité pour leur offrir une seconde vie, en permettant en même temps le verdissement des parcs. D’un point de vue écologique, selon Jean-Jacques Serraf, « les émissions de CO2 d’un rétrofit sont 56 % inférieures à celles causées par la fabrication d’une voiture électrique neuve. » Enfin, les pièces issues du moteur thermique peuvent être remises en circulation. La parfaite illustration d’une économie circulaire. Au final, un véhicule transformé permet de réduire jusqu’à 80 % les émissions de particules fines dans l’air et jusqu’à 60 % de CO2, par rapport à un modèle identique diesel. Le tout pour un prix bien moins élevé qu’acheter un modèle électrique neuf.
Investissement gagnant
En moyenne, la conversion d’un véhicule coûte entre 20 000 et 25 000 euros (en fonction du type de batterie) quand le ticket d’entrée d’un Citroën e-Jumpy ou d’un Renault Trafic E-Tech dépasse les 35 000 euros, voire les 37 000 euros pour la marque au losange. Avec les aides et les primes à la conversion, l’écart en faveur du rétrofit s’accroît encore. S’ajoutent également les incitations des collectivités pour aider les entreprises à investir dans la conversion des motorisations thermiques en électriques. Grenoble Alpes Métropole, propose par exemple jusqu’à 12 000 euros de subvention pour les TPE et PME locales. Fiscalement l’entreprise bénéficie des mêmes avantages qu’avec l’achat d’une voiture ou d’une camionnette électrique neuve, et notamment du suramortissement qui lui permet de déduire de sa base imposable 120 % à 160 % du prix d'achat ou de location du véhicule. En plus, en cas de rétrofit de leurs véhicules, les entreprises conservent les configurations et aménagements intérieurs et extérieurs de leurs engins. Pas besoin de les transposer ou d’en réaliser d’autres pour le nouveau véhicule. Un gain d’argent, mais aussi de temps. Lors de l’achat d’un véhicule neuf, plusieurs mois s’écoulent entre la commande et la livraison. « Faire un rétrofit d’un véhicule existant demande quelques semaines d’immobilisation » confirme Jean-Jacques Serraf. Le tout avec des pièces et une garantie constructeur.
Les constructeurs s’impliquent
Renault et Stellantis, se sont positionnés sur le créneau. Le premier en liant un partenariat avec l’entreprise Tolv afin de transformer le Master en électrique dans l’usine « Re-Factory » de Flins. Stellantis à quant à lui fait alliance avec Qinomic, pour rétrofiter la gamme K-0 du groupe (Peugeot Expert, Citroën Jumpy, Opel Vivaro et Fiat Scudo). L’avantage de ce partenariat est de travailler en liaison étroite avec les fabricants de véhicules est de bénéficier de la traçabilité de l’approvisionnement des pièces. « Le moteur, les batteries sont des pièces constructeur. C'est un gage de qualité, et de garantie sur l'ensemble de la prestation » explique Jean-Jacques Serraf pour Qinomic. Et de souligner que les véhicules rétrofités bénéficient « d’une garantie pour la batterie d'au moins 8 ans » identiques à celle des véhicules électriques neufs de Stellantis. Il est même possible, si le client le désir, « d’upgrader les véhicules en leur donnant de nouvelles fonctionnalités comme l’aide à la conduite, de la connectivité… ».
La carrosserie aussi peut bénéficier d’une réfection si besoin. De quoi intéresser les gestionnaires de flottes. Mais la demande est bien supérieure à l’offre. Tolv prévoit par exemple de produire et livrer « 350 Master en 2024 et 650 en 2025 ». Seulement 1 000 à 2 000 véhicules ont été convertis en 2023, d’après l'Association des Acteurs de l'industrie du rétrofit électrique (AIRe). Une quantité infinitésimale par rapport à l’objectif fixé de 120 000 VUL et 74 000 VP rétrofités en électrique d’ici à 2028. Jean-Jacques Serraf ne le cache pas. « Il y a de l'engouement, simplement l'offre est très faible. Aujourd'hui c'est une filière qui commence. » Il faudra qu’elle accélère sérieusement le tempo pour répondre aux attentes des entreprises avec leurs milliers de VUL diesels en bout de course.
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