DESIGNERbyBELLU - Albrecht Goertz, le père d’une icône, la BMW 507
Soudain, une icône apparaît sur l’itinéraire de BMW : la 507. Elle doit sa notoriété à une ligne très personnelle qui se démarque à la fois du style américain et de la carrosserie italienne. Elle est l’œuvre isolée d’une personnalité atypique, Albrecht von Goertz.
Dans le domaine du style, les années 1950 foisonnent de créativité car elles sont dominées par deux tentations contradictoires : d’une part l’arrogance du « styling » américain, qui attire les créateurs fascinés par l’American way of life, d’autre part la grâce et l’élégance prônées par la carrosserie italienne.
Les voitures américaines traduisent l’opulence d’une nation auréolée par son action déterminante au cours de la Seconde Guerre mondiale. Portée par ce prestige, l’Amérique influence l’Europe et lui inflige une acculturation qui révolutionne le cadre de vie. De son côté, la carrosserie italienne fait souffler un vent de renouveau sur l’industrie automobile.
En marge de ce courant italien et de l’influence américaine, il existe une troisième voie empruntée par quelques individualités. Au Salon de Francfort 1955, BMW tire un véritable feu d’artifice. Pas moins de trois modèles inédits font leur apparition à côté des rondouillardes berlines 501 et 502 : la limousine « 505 », destinée aux cérémonies officielles, le cabriolet « 503 », aux lignes austères, et le roadster « 507 » qui va entrer au panthéon du style automobile. Comme nombre de sportives européennes apparues à la même époque, la BMW 507 est née d’une suggestion de l’insatiable Max Hoffman.
Quand on évoque les voitures les plus désirables des années 1950, le nom de Max Hoffman est toujours cité. Le marché américain, il le sent, le pressent, le comprend. Il sait comment séduire un yuppie de Wall Street comme une starlette de Hollywood. La 300 SL, c’est Max qui l’a réclamée à la direction de Mercedes-Benz. La Giulietta Spider de Pinin Farina, c’est Max qui l’a choisie. C’est aussi lui qui a orienté le choix du designer pour la BMW 507. En l’occurrence, il propose le nom de Albrecht von Goertz, né à Brunkensen, en Basse-Saxe, d’un père allemand, aristocrate, et d’une mère juive.
Après avoir commencé une carrière de banquier qui ne le passionne pas, Albrecht von Goertz décide de se retirer en Grande-Bretagne quand le nazisme s’installe en Allemagne. En 1936, il émigre aux États-Unis et ouvre un atelier de préparation pour les Ford Model T et A. Puis, sur la base d’une Mercury, il crée le prototype Paragon qu’il présente à l’Exposition universelle de New York en 1939.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, Albrecht von Goertz s’engage dans l’armée américaine. Au lendemain des hostilités, il rencontre fortuitement Raymond Loewy, l’un des personnages clés du design américain de cette époque, qui lui propose un poste dans le studio de design qu’il gère pour Studebaker.
Les illustrations de la BMW 507
En 1952, Albrecht von Goertz ouvre son propre studio de création à New York : Goertz Industrial Design Inc. Ses clients viennent de tous les horizons : de la photographie (Agfa), des arts ménagers (Rowenta), de la hi-fi (Saba), de l’écriture (Mont Blanc) ou encore de l’automobile…
La BMW 507 ne laissera donc pas le souvenir d’une création avant-gardiste sur le plan technique. Le principal attrait de la 507, c’est son style. Sa ligne est simple, sensuelle, marquée par des longues courbes, caractérisée par une face avant fine et ambitieuse, soulignée par des moulures qui fuient des passages de roues, signée par un joli motif intégré dans l’aile avant. Malgré ses qualités, l’élitiste BMW n’atteint pas son but. Elle ne rencontre que 251 acheteurs, dont seulement 39 aux États-Unis qui devaient pourtant constituer son marché de prédilection.
Après sa fulgurante collaboration avec BMW, Albrecht von Goertz connaîtra une nouvelle coopération fructueuse dans le même secteur : entre 1963 et 1965, il est consulté par Nissan pour dessiner le coupé Silvia ainsi qu’un projet qui inspirera la Fairlady Z (240 Z à l’exportation) de 1969.
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