Dieselgate : le procès du scandale débute en Allemagne
Il y a fort à parier que quelques têtes vont tomber. En effet, aujourd'hui s'ouvre en Allemagne le premier gros procès du scandale du dieselgate. Il ne s'intéressera paradoxalement pas à la triche ou à la pollution, mais au sort des actionnaires de Volkswagen, qui ont perdu beaucoup d'argent, et qui réclament 9 milliards d'euros de réparation.
Ce lundi s'ouvre au tribunal régional de Brunswick en Allemagne un des plus gros procès qui va concerner le scandale du dieselgate. Pourtant, il n'y sera aucunement question de pollution ou d'émissions non conformes, aucunement question d'informatique et de logiciel truqueur.
Car ce procès n'est pas celui du Volkswagen tricheur-pollueur, mais celui du tricheur-menteur-dissimulateur.
Bref rappel. Il y a presque 3 ans jours pour jours, le 18 septembre 2015, les autorités américaines révèlent un scandale de tricherie aux émissions polluantes sur 11 millions de véhicules du groupe Volkswagen, grâce à un logiciel permettant de truquer les résultats lors des cycles d'homologation.
À la suite de cette révélation, et c'est le centre du procès qui s'ouvre aujourd'hui, l'action Volkswagen plonge de 40 % en deux jours, faisant perdre aux actionnaires des sommes colossales ! Or, légalement, une entreprise a obligation de communiquer aux marchés financiers et aux actionnaires "toute information interne" susceptible d'influer sur le cours de l'action.
Ce sont donc 3 560 actionnaires, petits ou gros, qui réclament en ce jour réparation. À hauteur d'un global de 9 milliards d'euros. Représentés par les avocats du fond d'investissement BeKa, ils se fondent sur le non-respect de l'obligation d'information. Selon eux, la direction du groupe était au courant de la fraude et aurait dû la révéler entre 2008 (date de la mise en place du logiciel truqueur) et 2015, date de l'éclatement du scandale.
Qui était au courant, fallait-il prévenir les marchés financiers ?
Ce procès devra donc déterminer le niveau de connaissance de chacun, et spécialement de la direction, par rapport à la fraude et déterminer une chronologie des faits. Les magistrats devront répondre à 200 questions, représentatives et récurrentes chez les actionnaires. Par exemple "l'utilisation d'un logiciel de fraude, développé aux États-Unis dès 2008, devait-elle être communiquée aux marchés ?", ou bien "l'absence d'information était-elle délibérée ?", ou encore "quel dirigeant était au courant, et à quel moment, de la manipulation ?"
À ce titre, on s'intéressera au rôle du PDG de l'époque, Martin Winterkorn, qui a présidé au destin de la marque à partir de 2007. Ce dernier répétait à l’envi qu'il connaissait "chaque boulon" de ses modèles. Les avocats de BeKa soutiennent qu'il a reçu en 2014 un mémo l'informant de la fraude. Les avocats du groupe automobile en conviennent, mais affirment qu'il n'a pas été lu.
Et plus largement, ils se défaussent de la responsabilité en reprenant le même discours qu'au début de l'affaire. Pour eux, cette fraude est de la responsabilité d'une poignée d'ingénieurs, qui n'en ont pas référé à leur hiérarchie. Et après la révélation du scandale, la direction n'en aurait pas mesuré l'ampleur, pensant pouvoir le résoudre à l'amiable. Du côté boursier, ils affirment que "les informations disponibles à l'époque ne rendaient ni pertinente ni obligatoire une communication aux marchés".
Comprendre aussi que communiquer aux marchés une telle information serait revenu à reconnaître publiquement une fraude de grande ampleur. C'était quasi-impossible.
Jusqu'ici, le scandale du dieselgate a coûté à volkswagen près de 27 milliards d'euros en amendes et frais de procédures, ainsi que frais techniques de rappel des véhicules en Europe. D'autres procédures sont en cours, Rupert Stadler, patron d'Audi de l'époque est toujours en détention, et aux USA, deux anciens cadres VW ont été condamnés à de la prison ferme. Certains actionnaires de Porsche SE, actionnaire principal de Volkswagen AG, demandent aussi réparation. Et enfin le gouvernement allemand à ouvert la voie à des procédures collectives, permettant une action groupée contre VW, dont pourraient bénéficier quelque 2 millions de clients.
Bref, le premier constructeur mondial de voiture n'en a pas fini avec ce scandale.
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