La métamorphose compliquée de Volkswagen
Volkswagen a probablement connu plus de changements structurels en 5 ans qu'en 50 ans. Depuis le dieselgate, tout s'enchaîne, et Herbert Diess, le patron actuel, doit faire face au mécontentement d'une partie des salariés et des syndicats.
L'été dernier aurait déjà été mouvementé au sein du conseil de surveillance du groupe Volkswagen, à moitié contrôlé par le comité d'entreprise, lui-même chapeauté par Bernd Osterloh. Ce dernier est un acteur important de la gouvernance du groupe allemand, et s'est régulièrement opposé aux décisions d'anciens dirigeants désireux de se séparer d'une partie du business. Cela avait notamment été marqué par le désaccord entre Osterloh et Diess, qui affichait à son arrivée sa volonté de se séparer des filiales Diesel & Turbo et Renk, qui fabriquent des transmissions. Osterloh avait une nouvelle fois réussi à empêcher la réduction du portfolio Volkswagen, maintes et maintes fois mentionnée dans la presse.
L'un représente les puissants syndicats et l'autre est venu pour métamorphoser un géant tremblant face aux différentes menaces du nouveau monde automobile : la digitalisation, l'électromobilité, les nouveaux services, Tesla...
Forcément, l'entente ne serait pas toujours cordiale. Mais Diess a, pour lui, le soutien de toute une partie de la classe politique et de nombreux investisseurs qui estiment qu'il est l'acteur du renouveau de Volkswagen. Audacieux, ambitieux, innovant, Diess casse les codes chez Volkswagen, quitte à casser des oeufs au passage. Même s'il ne faut pas oublier la part de Matthias Müller, qui avait repris le difficile flambeau de Martin Winterkorn à la suite du dieselgate, Diess est bien l'homme du digital, de l'écologie et des milliards mis sur la table pour faire en sorte que le groupe Volkswagen effectue une transition rapide vers la voiture électrique.
Tensions et inquiétudes, problèmes de qualité
Trop rapide, peut-être ? C'est ce que pensent les syndicats, Osterloh en tête. "Quand j'ai pris mes fonctions, j'ai fermement décidé de changer le système VW. Cela signifie briser les anciennes structures incrustées et rendre l'entreprise plus agile et moderne. La transformation réussira. Malgré la forte culture d'entreprise de Volkswagen", avait annoncé Diess au Handelsblatt.
Malheureusement, en juin dernier, Diess se retrouvait quelque peu désavoué. C'est à ce moment là qu'il perd la direction de la marque Volkswagen, transférée à Ralf Brandstätter, sur un fond de conflits internes et de tensions. Diess est donc le patron du conseil de surveillance, mais ne dirige aucune marque : une situation que les Allemands ont qualifiée de "roi nu".
Pression sur les lignes d'assemblage pour la Golf 8 et l'ID 3, erreurs stratégiques, Diess a fait l'objet de nombreuses critiques au sein de son propre groupe. Les syndicats avaient notamment décrit dans une lettre tous les problèmes rencontrés par les nouvelles autos électriques ID, et par la dégradation de l'image de marque et les baisses de qualité.
Il n'empêche, l'objectif de Diess reste inchangé : devenir le principal acteur de la voiture électrique abordable, investir massivement dans le développement logiciel (avec plusieurs milliers d'experts informatiques travaillant dans l'écosystème VW.OS), et atteindre les 200 milliards d'euros de capitalisation boursière, contre 80 milliards à l'heure actuelle. C'est cinq fois moins que Tesla. D'ailleurs, Diess parle souvent de son concurrent californien : il avait même invité son patron, Elon Musk, à venir essayer l'ID 3.
Une chose est sûre : si la capitalisation atteint effectivement cette somme, ce n'est pas la famille Piëch/Porsche (détentrice de 53 % des actions) qui s'en plaindra. Cette dernière avait d'ailleurs appelé au "calme" pendant l'été et à un appaisement des conflits pour avancer.
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