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La voiture électrique à la revoyure

En 2026, l’Europe pourrait opter pour une clause de revoyure sur l’objectif de 100 % de voitures électriques neuves en 2035. À la clef, un sursis ou une grâce pour le moteur thermique, mais cela n’aurait pas grand-chose à voir avec l’écologie…

La voiture électrique à la revoyure

J’adore cette expression « à la revoyure » que se lançaient les vieux à la sortie du bistrot de mon village natal avant de remonter sur leurs tracteurs.

Le bistrot a fermé depuis longtemps, et la revoyure se jouerait dans quatre ans à la commission de Bruxelles, puis au Parlement européen avec la possibilité de reporter - ou annuler - la prohibition du moteur thermique programmée neuf ans plus tard.

Contrairement à ce que l’on a lu et entendu, il ne s’agirait pas d’anticiper le miracle d’une solution alternative au tout électrique qui nous tomberait du ciel et nous permettrait de sauver la planète sans passer par la borne de recharge.

Les carburants synthétiques à base de CO2 et d’énergie renouvelable que nous promet l’industrie allemande seront-ils prêts ? Produira-t-on à grande échelle des bio-carburants avec nos déchets agricoles ou ménagers ? Quatre ans pour de tels prodiges, c’est peu. Et en fait, l’Europe s’en tamponne.

Tout comme de savoir si, en 2026, la réduction des émissions de C02 sera au rendez-vous et le bilan carbone de la watture aussi verdoyant qu’on nous le promet.

Ce qui sera « revoyuré », ce ne sera pas l’écologie, mais l’économie, point. Et à la rigueur le social.

Carlos Tavares a-t-il été entendu ?

La voiture électrique à la revoyure

En clair, si dans quatre ans 1/ L’industrie automobile européenne se fait tailler des croupières par les constructeurs chinois et licencie à tour de bras, 2/ Si nos (projets de) gigafactories de batteries ne tiennent pas leurs promesses ou ne sont pas compétitives 3/ Si les métaux rares et le lithium - un quasi-monopole chinois - atteignent des prix tels que les tarifs des autos restent hors de portée de l’Européen moyen, eh bien, on décrétera que finalement 1/La voiture électrique n’est pas si bénéfique pour l’environnement qu’on le croyait. 2/ que le moteur thermique – une spécialité européenne - n’a pas dit son dernier mot et 3/ Qu’en le faisant carburer au végétal, aux déchets ou à l’essence de synthèse, on fait aussi bien pour le climat qu’avec des accus. Quitte, hélas, à brûler encore un peu de pétrole le temps que ces carburants miracles soient disponibles en quantité suffisante…

Bref, on dirait que Thierry Breton, le commissaire européen au marché intérieur, et Clément Beaune, le ministre français des Transports ont bien lu les interviews de Carlos Tavares, le patron de Stellantis qui entretient un rapport plutôt ambigu à la motorisation électrique, à la fois contre et tout contre…

Et aussi les propositions de Porsche et BMW qui, à l’inverse de Volkswagen, ne sont pas pressés de renoncer aux prestigieuses usines à gaz (d’échappement) qui fondent leur réputation mondiale et sur lesquelles ils continuent d’investir, quoiqu’en pense le parlementaire de Bruxelles. C’est qu’eux, comme Stellantis, ne vivent pas que du marché européen et opèrent sur des continents et des pays où la voiture électrique est encore dans le lointain.

Moins de voitures, beaucoup moins de voitures…

La voiture électrique à la revoyure

L’Europe serait-elle en train de caler sur le défi que représente la conversion de son industrie automobile ? De plus en plus d’indices montrent une hésitation, pas seulement due à des considérations de souveraineté industrielle et de prospérité économique

Le coût de l’infrastructure de recharge notamment, qui ne se résume pas à confier au secteur privé l’installation de bornes de recharge. Il faudra aussi les alimenter, redimensionner des pans entiers du réseau électrique.

Et aussi produire plus d’électricité sans émettre plus de CO2, ce qui n’est pas un mince défi entre la dépendance aux panneaux solaires… chinois, la force du vent dans les pales des éoliennes et la peur qu’inspire le nucléaire.

La guerre en Ukraine a de ce point de vue fait bouger les lignes et les points de vue. D’abord, on réalise que la production électrique est sensible aux aléas du temps. Pas seulement aux pénuries d’énergie primaire comme avec la coupure des robinets du gaz russe, mais aussi, et ce n’est pas un détail, comment une centrale nucléaire – telle celle de Zaporijjia – est vulnérable aux passions humaines.

Ensuite, il semble clair qu’une partie des centaines de milliards que nécessite la conversion électrique seront réorientés dans le réarmement du continent.

Enfin et peut-être surtout, il apparaît que les véritables opposants à la voiture électrique ne sont pas les automobilistes, mais les écologistes eux-mêmes. Le moindre projet d’extraction-raffinage de lithium ou de prospection de métaux rares suscite protestation et mobilisation. On ne produira pas 10 ou 15 millions de voitures par an en Europe sans piocher dans le sous-sol, sans ouvrir des mines, sans inaugurer des centrales nucléaires pour les recharger.

Et d’ailleurs, on entend de plus en plus, chez les verts, un discours disant que ce n’est pas de voitures électriques que l’on a besoin, mais d’abord, de moins de voitures, de beaucoup moins de voitures…

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