Lancia Stratos : le devoir de mémoire
Quelle étrange époque tout de même. Alors que l’on nous promet la fin du plaisir automobile remplacé par un amour platonique avec une voiture autonome, tandis que le politiquement correct veut biffer de la mémoire collective une passion mécanique maintenant estampillée liaison aussi dangereuse que coupable, voilà, qu’avant de sombrer dans le doux coma du renoncement, les constructeurs nous rappellent leur gloire passée. Alpine a ainsi retrouvé sa 110 et, aujourd’hui, un nom nous a provoqué un réflexe post-mortem. Celui de Stratos… Ouvrez le ban !
Si, à l’énoncé de véhicules de compétition routière légendaires, le citoyen lambda s’égare parfois dans les méandres de sa rétive mémoire, il en est un qui ne souffre pourtant que très rarement la confusion. Stratos est son nom, Lancia de son prénom.
La Lancia Stratos est ainsi ce que l’on peut définir comme l’archétype de l’icône, celle que tout le monde connaît et instinctivement respecte. La conséquence d’une ligne reconnaissable entre toute et d’un palmarès en rallye long comme un jour sans pain…
L’histoire commence au stand Bertone du salon de Turin 1970. Le coup de crayon de Marcello Gandini fait mouche et le public accueille avec enthousiasme cette commande du service marketing Lancia. Le prototype est animé par le quatre cylindres 1 600 en V de 130 ch de la Fulvia HF. C’est indirectement de là que la Stratos va trouver sa raison d’être.
Cette Fulvia HF, c’est Cesare Fiorio qui s’en occupe en compétition. Or, le chef de la Lancia Squadra Corse ne peut plus donner la réplique aux Alpine et autres Porsche qui taillent des croupières à la vieillissante HF.
Il prend son bâton de pèlerin et s’en va convaincre la Fiat, nouveau patron depuis 1969, de l’impérieuse nécessité de faire de cette œuvre mondaine une terreur de compétition. Gian Paolo Dallara pour la technique et Michael Parkes pour la mise au point s’engagent dans l’aventure.
Pour donner du coffre à cette architecture toute tendue vers la course, le V6 2.4 litres de la 246 DINO s’installe en lieu et place du 1-600.
En 1971, la Stratos se présente de nouveau au salon de Turin, mais cette fois, elle expose le travail de tout ce qui œuvre derrière le sigle HF ; 3.71 mètres de long, 1,75 de largeur, 1,11 de haut, 860 kg, moteur en position central/transversal, 240 ch, la Fulvia peut aller prendre une retraite bien méritée.
La première course qui voit la Stratos débarquer est le Tour de Corse 1972. Une apparition furtive qui s’arrête sur un bris de suspension arrière. Munari abandonne. La deuxième tentative au rallye "Costa Del Sol" connaîtra la même conclusion.
Le mal est résolu pour 1973, année qui marque le début de la marche victorieuse. Première victoire au rallye Firestone en Espagne, puis le Tour de France Automobile. Les 500 exemplaires sont produits, voilà la Stratos homologuée en Groupe 4. Elle peut s’élancer officiellement à l’assaut des titres.
1974, Munari et Andruet engrangent les succès au San Remo et Tour de Corse. Puis c’est la déferlante : 4 victoires en 1975, qui voit Darniche arriver, autant en 1976, qui font que la Stratos enlève les championnats du Monde de ces trois années.
Puis, Fiat décide de privilégier la 131 Abarth. La Stratos continuera à glaner des succès, aux mains de Darniche notamment, Munari et Alen participant aussi à la légende. La carrière routière prend fin en 1981, au Tour de Corse, avec Darniche. Avec une victoire en guise de sortie.
Au bilan, c’est trois titres de championne du Monde, autant d’Europe, 17 victoires en mondial, les divers succès nationaux approchant les 70 unités.
La Stratos a aussi connu les circuits, avec un turbo l’amenant à quelque 330 ch d’abord pour atteindre 480 ensuite. Elle mettra ses pneus aux 24 h 00 de Daytona et fera le tour d’horloge dans la Sarthe, avec un l’équipage de charme Dacremont-Hoepfner… Fermez le ban !
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