Le Mondial de l'Auto peut-il être délocalisé en province ?
Le Salon de Paris a vu sa fréquentation baisser de 15 %. Les organisateurs évoquent une tendance générale suite aux attentats, le public pointe du doigt le nombre record de constructeurs absents. Et si la localisation géographique posait aussi problème ?
1 072 697, tel est le nombre exact d'entrées au Mondial de l'Automobile 2016. C'est 180 816 de moins qu'il y a deux ans. Une forte chute mais le bilan reste pour autant positif, car les constructeurs présents ont bien vendu, preuve que le salon attire toujours les personnes à la recherche d'un nouveau véhicule.
Pour les organisateurs, la baisse de fréquentation est à mettre au regard d'une tendance similaire pour les grandes manifestations françaises à la suite des attentats qui ont secoué le pays ces derniers mois. C'est recevable mais il faut aussi prendre en compte le grand nombre d'absences, surtout du côté des marques de prestige, forcément appréciées des visiteurs.
Paris est difficile d'accès
Une question nous est venue à l'esprit : dans les raisons qui peuvent expliquer ce petit désamour que l'on espère passager, peut-on mettre Paris ? L'idée n'est pas de pointer le côté autophobe de la ville, même si vous évoquez régulièrement dans vos réactions la position anti-voitures d'Anne Hidalgo et plus largement de nos gouvernants politiques. Mais cette impression que la France n'aime pas la voiture existait déjà lors des précédentes éditions. Non, Paris est ici évoqué plus simplement pour sa situation géographique. Et si le Mondial de l'Automobile avait plus de succès en étant mieux positionné sur la carte de France ? L'idée n'est cependant pas de choisir le village de Bruère-Allichamps, centre géographique du pays dans le Cher !
Il peut sembler évident que le salon international français se déroule dans la capitale. Pourtant, c'est loin d'être une obligation. Ce n'est ainsi pas le cas pour ses équivalents européens. En l'Allemagne, la grande messe de l'automobile est à Francfort et côté Suisse on se rend à Genève. Aux États-Unis, en plus de Detroit, New York et Los Angeles montent en puissance. Nous pouvons donc imaginer un Mondial loin de la Ville Lumière.
D'ailleurs, le show hexagonal se tient Porte de Versailles, un endroit difficile d'accès. Le week-end, les entrées des parkings sont vite débordées, créant des files d'attente sur le périphérique et la semaine c'est ce dernier qui est un enfer. Les aires de stationnement peuvent vite être complètes, obligeant les visiteurs à se débrouiller dans le quartier. Il est évident que l'accès à n'importe quel endroit qui attire la foule demande de la patience, comme les parcs d'attractions, mais le Salon cumule les handicaps avec sa situation en plein cœur de la métropole. Il y a cependant un avantage : une très bonne desserte via les transports en commun.
L'avantage d'une région très peuplée
Ce dernier point est important. Le parc des expositions est situé au cœur d'une métropole de plus de dix millions d'habitants. C'est autant de visiteurs potentiels. La position est d'ailleurs stratégique pour la fréquentation record du Mondial, puisque plusieurs millions de personnes peuvent réfléchir à faire un saut au salon sans que cela ne soit une expédition. En 2016, 55 % des visiteurs venaient d'Ile de France.
Délocaliser en province, ce serait donc prendre le risque de se priver d'une réserve d'entrées conséquente. Mais ce serait aussi permettre à un plus grand nombre de Français de songer à se rendre au Mondial, ceux pour qui Paris est loin et ressemble à un repoussoir. Si la capitale est bien desservie par le rail et les airs, par la route elle reste éloignée pour le public habitant dans le Sud Ouest et le long de la Méditerranée.
L'un des paradoxes du salon est qu'il est organisé dans une zone où le taux d'équipement en automobile est le plus faible du pays. Selon les données du site Data France, en moyenne, en France, 80,6 % des ménages avaient au moins une voiture en 2011. À Paris même, le taux était de 39 %. Dans la petite couronne, il variait entre 60 et 70 %. À l’opposé, les plus forts taux se trouvaient le long d'une diagonale reliant Les Landes à la Savoie.
Pourquoi pas Lyon ?
Déplacer le Mondial permettrait également de le rendre plus européen. L'un des soucis de Paris est qu'il est très franco-français. Si elle n'est pas connue, la proportion de visiteurs étrangers semble assez faible, ce qui peut inciter certaines marques à ne pas venir. C'est l'une des clés du succès du Salon de Genève, qui arrive à faire le plein (de constructeurs et d'entrées) chaque année. Le rendez-vous suisse jouit d'une position stratégique, avec plusieurs pays frontaliers à quelques dizaines de kilomètres à la ronde. Sur les 687 000 entrées de l'édition 2016, près de la moitié venait de l'étranger (dont 30 % de Français et 6 % d'Italiens).
Évidemment, en prenant en compte les différentes remarques, impossible de trouver un autre lieu que Paris qui fasse l'unanimité. Strasbourg est très européen mais dans un coin de l'Hexagone. Pourquoi pas Lyon ? Le centre des expositions de la ville est déjà situé en limite de la métropole, ce qui évite de se coincer dans le centre-ville. À l'échelle de la France, il peut ratisser bien plus large que Paris. Surtout, Lyon est capable d'attirer des publics en provenance de Suisse, Allemagne et Italie. Pour mieux lutter contre le Salon de Genève, et faire revenir les marques de prestige dans « notre » grand salon, pourquoi ne pas situer le Mondial juste de l'autre côté des Alpes ?
Nous avons contacté l'organisation du salon pour connaître son avis sur le sujet. Elle nous a indiqué que si aucune porte n'était fermée, pour l'instant le Mondial reste intimement lié à Paris, berceau du salon. Les bureaux de l'organisation sont d'ailleurs situés non loin du Jardin des Tuileries et à proximité du Grand Palais, deux lieux emblématiques de l'histoire du salon. L'idée d'un déménagement n'est pas à l'ordre du jour.
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