Le plastique c’est fantastique et, en plus, il se transforme en carburant
Une start-up française a décidé de revenir aux fondamentaux du plastique : le pétrole dont il est issu. Un recyclage destiné à transformer les millions de tonnes de déchets qui polluent la planète en gazole, sans puiser dans les ressources naturelles de la même planète.
Ça tombe sous le sens. Qu’est-ce que le plastique après tout, si ce n’est du pétrole transformé ? Du coup, pourquoi ne pas utiliser les 11 millions de tonnes de déchets que le monde rejette chaque année pour le retransformer en pétrole ? C’est la belle et bonne idée de deux hommes qui ont créé une association en 2018. Les hommes en question sont François Danel et Samuel Le Bihan. Le comédien de Capitaine Conan et le dirigeant du monde associatif ont fondé Earthwake qui est, désormais, une entreprise dotée de 2,2 millions d’euros destinés à son développement.
Un carburant de transition
Le projet repose avant tout sur une machine baptisée Chrysalis. Par le truchement de la pyrolyse, les déchets sont ainsi transformés en gaz, puis en carburant. « Nous avons choisi de produire du gazole, plus compatible avec notre système » explique François Danel. Produire du mazout à l’heure ou, en Occident, ce carburant risque d’être mis au ban rapidement n’est-il pas un projet un peu vain ? « On a encore un besoin de gazole pour les poids lourds comme les engins de chantier chez nous, et c’est toujours une réelle nécessité pour tous les moyens de transport dans les pays émergents. Même si c’est, évidemment, un carburant de transition ».
Mais Chrysalis est énergivore. Pour que l’usine à gaz qui transforme les bouteilles et emballages en plastique en gazole fonctionne, la matière produite doit être chauffée à plus de 400 degrés. Earthwake a trouvé la solution. « En fait, nous ne consommons de l’électricité qu’au cours de la première phase. Ensuite, c’est le gaz produit qui chauffe la matière obtenue, jusqu’à la transformer en carburant liquide. Ce qui représente 80 % de l'énergie nécessaire au processus ».
Ce principe a convaincu plusieurs investisseurs qui, de l’armateur CGA – CGM à la fondation Rotschild en passant par le Crédit Agricole, ont investi 2,2 millions d’euros dans la start-up pour lui permettre de se développer. Car le chantier reste immense pour passer du stade artisanal au niveau industriel. Et pas seulement pour construire des Chrysalis géants, mais aussi et surtout pour collecter les déchets plastiques, puisque la planète en déverse près de 11 millions de tonnes dans les océans chaque année, et que seules 16 % de ces matières polymères sont recyclées pour le moment.
Mais d’ores et déjà, des commandes sont engrangées, car le prix de revient estimé par François Danel n’a rien à voir avec celui de l’e-fuel de Porsche de près de 2 euros du litre. « Nous sommes aux alentours de 90 cts ». Dans les Alpes Maritimes, une communauté de communes fait fonctionner ses camions de collecte de déchets grâce au gazole Earthwake. La CMA CGM entend faire tourner ses engins portuaires au même carburant et se charge d'une partie de la collecte. En Tunisie, des bateaux de pêcheurs fonctionnent déjà grâce à lui. La start-up entend dégager 44 millions de chiffres d’affaires d’ici 2027, avant de vendre ses licences à des groupes industriels qui en feront la demande.
Bien sûr, ce gazole de recyclage pollue autant que le diesel traditionnel, mais, puisque c’est un carburant de transition, autant qu’il soit issu du recyclage, beaucoup moins dévastateur que le traditionnel pillage des ressources naturelles.
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