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Plainte pour favoritisme dans les contrats des voitures-radar

Dans Pratique / Radars

Claude Barreau

L’association Anticor qui lutte contre la corruption considère que l’entreprise Fareco, le fournisseur des « mobiles mobiles » depuis 2012, a été favorisée dans l’obtention de deux contrats passés sans appel d’offres. Elle a déposé plainte pour délit de favoritisme devant le Parquet national financier (PNF).

Plainte pour favoritisme dans les contrats des voitures-radar

Anticor a déposé plainte pour délit de favoritisme au Parquet national financier (PNF) dans le cadre des derniers contrats attribués à Fareco, le fournisseur des voitures radar, a révélé L'Express ce mercredi. L'association anticorruption considère que la filiale du 4e groupe de BTP français, Fayat, a été "bénéficiaire de deux marchés publics faramineux, en violation totale de la législation en matière de marchés publics", qui lui ont été attribués notamment "sans publicité, ni mise en concurrence préalable".

Jointe par Caradisiac, la Sécurité routière maintient et assure avec force qu’elle a "appliqué, avec tous les contrôles nécessaires, le code des marchés publics". "J'attends qu'une enquête soit menée le plus vite possible, et nous fournirons toutes les pièces à la justice, afin d'avoir une conclusion le plus vite possible qui me semble ne pouvoir être qu'un classement sans suite", nous a précisé, comme à l’AFP hier, Emmanuel Barbe, le délégué à la Sécurité routière.

Que prévoient ou prévoyaient les deux contrats litigieux pour Anticor ? Le premier, un avenant de 2,67 millions d'euros TTC avait été signé dans le cadre du premier marché – de plus de 28 millions d'euros au total - passé avec Fareco en 2012 pour la fourniture des premiers "mobiles mobiles", ces radars capables de flasher en roulant, dans le flot de la circulation, ce qui était tout à fait nouveau à l'époque. Les seuls radars considérés comme mobiles jusque-là, étaient embarqués dans des véhicules – et éventuellement débarquables à l'extérieur sur trépied – toujours utilisés à l'arrêt.

Plainte pour favoritisme dans les contrats des voitures-radar

Dans cet avenant épinglé par Anticor, il est alors question des prototypes que Fareco a dû fournir au ministère de l'Intérieur pour son expérimentation en Normandie, l'an dernier. Pour rappel, ont été en effet testées six voitures-radar modifiées, c'est-à-dire automatisées, afin d'envisager leur privatisation et le remplacement des deux gendarmes ou policiers à l'intérieur par un seul chauffeur. L’objectif de cette expérimentation était donc de vérifier que les véhicules, ainsi évolués, fonctionnaient correctement.

Or, dénonce l’avocat d’Anticor, Jérôme Karsenti, "non seulement cet avenant a provoqué l'émission d'un bon de commande très tardif, ce qui a de fait permis de prolonger le contrat initial [lequel devait s'achever à l'été 2016, NDLR] de plus d'un an, mais en plus il se trouve que Fareco n'avait même pas les compétences en interne pour procéder à la demande de l'administration !" La filiale de Fayat a donc "dû faire appel à un sous-traitant, la société Sysnav, aux dires même du ministère, ce qui démontre bien que ce dernier aurait dû passer par un nouvel appel d'offres".

Quant au second contrat, il s'agit carrément d'un tout nouveau marché, cette fois de plus de 53,8 millions d'euros, contracté directement avec Fareco l'an dernier. Caradisiac a consulté l'avis d'attribution publié comme il se doit au Journal Officiel de l'Union européenne, et il ressemble à un grand fourre-tout, dans lequel les voitures radar ne sont même pas évoquées…

 Voilà la description succincte que l'on peut lire sur cet avis : "Prestations de maintenance avancée et de fournitures d'équipements de terrain relevant du fournisseur Fareco". Avec cette précision un peu plus loin : "Le présent contrat est un marché de maintenance avancée et de fournitures concernant des équipements de terrain fixes et des équipements de terrain feux rouges pour lequel la société Fareco est détentrice d'un certificat de type sur ces matériels (certificat, attribué à une entité spécifique, qui atteste que le produit a subi avec succès une homologation auprès de l'organisme désigné par le ministère chargé de l'industrie), ce qui rend impossible toute concurrence".

 Une impossibilité de mise en concurrence réfutée par Maître Karsenti pour ce marché qui porterait bien notamment - même si elles sont absentes de l’avis susmentionné - sur les voitures-radar. L’avocat rappelle qu'un marché public "n'a pas à renvoyer comme c'est le cas ici à un prestataire. Le ministère de l'Intérieur devait se contenter de décrire son besoin, et voir si des entreprises étaient en capacité de lui répondre. Point." Mais que dire alors des trois autres marchés attribués de la même façon par Beauvau aux autres fournisseurs de radars ?

1 - "Prestations de maintenance avancée et de fournitures d'équipements de terrain relevant du fournisseur Safran", pour un montant estimé de 66,2 millions d'euros TTC.

2 – "Prestations de maintenance avancée et de fournitures d'équipements de terrain relevant du fournisseur Parifex", pour près de 9 millions d'euros TTC.

3 - "Prestations de maintenance avancée et de fournitures d'Equipements de terrain relevant du fournisseur Jenoptik", pour 4,8 millions d’euros TTC.

La plainte d'Anticor ne les évoque aucunement, pourtant il semble bien qu’ils soulèvent les mêmes questions. S’il devait ouvrir une enquête, le PNF pourrait, lui, s’y intéresser…

Ce n'est pas la première fois qu'Anticor soupçonne un délit de favoritisme dans la passation de marchés publics concernant le système des radars automatiques. Comme le rappelle le président de l'association, Jean-Christophe Picard, "une enquête est déjà en cours au PNF, à la suite d'une plainte pour cette incrimination déposée fin 2015 par Anticor  pour des contrats énormes passés avec le groupe informatique Atos, lequel semblait alors profiter, selon les termes figurant dans un rapport de l'Inspection générale de l'administration, ‘d’une rente de situation pour pratiquer des prix élevés’ ".

 

 

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