Présentation vidéo - Beltoise BT01 : une étonnante GT de course électrique… et française !
En France, on n’a pas de pétrole, ni de batteries, mais on a des idées. Exemple avec Julien Beltoise, qui présente sa première GT électrique destinée à un usage circuit, fer de lance d’un projet ambitieux. Nous sommes allés à la rencontre du pilote et avons testé sa création sur le circuit de La Ferté Gaucher.
Qu’on le veuille ou non, l’automobile va continuer à s’électrifier à une vitesse exponentielle. S’imaginer qu’on pourra, dans ce contexte, vivre sa passion sans rien changer relève de la cécité intellectuelle. On n’a d’autre choix que de s’adapter, sous peine de disparaître, et ça, Julien Beltoise l’a bien compris. Fils du célèbre pilote Jean-Pierre Beltoise, il est investi dans la course automobile et applique la devise de son père : « voir, prévoir, anticiper ». Pour se perpétuer, la course automobile effectue sa transition énergétique. Il devra en aller de même pour les autres activités effectuées sur circuit, comme les stages de pilotage. "Comment voulez-vous que la population, contrainte de passer à l’électrique, accepte de voir des gens s’amuser avec des autos thermiques sur piste ?", nous demande Julien Beltoise.
La solution : une GT de circuit électrique. Et comme elle n’existe pas, il décide d’en inventer une, voici près de 4 ans. Pour ce faire, associé à Gilles de la Rochefordière (un investisseur et ami de longue date qui l’a soutenu quand il était pilote pro), il a monté le bureau d’études Beltoise eTechnology, en Charente-Maritime. Sa première création a été dévoilée sur le circuit de Saintonge en mars dernier, c’est la Beltoise BT01.
Celle-ci se destine à un usage circuit, sous deux formes. D’abord, les stages de pilotage et les activités promotionnelles, dont les entreprises se détournent à cause de l’image négative renvoyée par les moteurs thermiques. L’électrique devrait les séduire, d’autant que les valeurs de base véhiculées par le sport auto demeurent très pertinentes. Ensuite les courses monotypes, GT3 ou GT4, en ouverture d’épreuves nationales ou internationales. C’est très pertinent, car les championnats électriques vont se multiplier ! Avec ses batteries de 46 kWh, la BT01 a une autonomie de 3 heures en usage stage, en pratiquant des recharges de 10 minutes lors des changements de pilote, ce qui permet 20 sessions de 10 minutes par jour ; et de 25 minutes à pleine puissance, en course.
Un démonstrateur certes, mais très abouti
Nous découvrons la BT01 dans le paddock du circuit de la Ferté-Gaucher, et de prime abord, elle étonne par son design très soigné, aux faux airs d’Aston Martin. "Elle a été dessinée en France, explique Julien Beltoise, et fabriquée chez Spark Racing Technology, qui produit des Formule E et des pièces pour la compétition". Pour autant, même si cette entreprise est basée dans l’Essonne, la BT01 ne se compose pas uniquement d’éléments français. Son châssis tubulaire dérive de celui d’une Ginetta G50, une voiture anglaise conçue pour courir en GT4, et les batteries lithium-ion sont fournies par Williams Engineering, émanation de l’écurie Williams de F1. Mais ça va changer…
Pesant 1 200 kg, elle dispose de deux moteurs en position centrale arrière développant un total de 290 kW, soit 394 ch, qui lui permettent d’accrocher les 100 km/h en 4 secondes et d’atteindre 210 km/h en vitesse maxi. Pas des chronos ravageurs, mais de quoi sérieusement s’amuser sur piste. Ce que j’ai l’occasion de faire ! Pour ça, je dois enfiler une combinaison, des gants, des chaussures, un casque et un Hans (Head and Neck Support, une armature soutenant la tête). J’ai d’abord droit à quelques tours de reconnaissance en passager, Julien Beltoise au volant. Le sifflement des moteurs est assez assourdissant à bord, mais, apparemment, l’auto marche fort et profite d’un très bon grip.
Au volant de la Beltoise BT01
À moi d’en prendre le volant. "Attention au moment de freiner", m’avertit Julien Beltoise. "Certains se sont sortis car ils ont accroché la pédale d’accélérateur en freinant". Entendu. Je me glisse sans trop me contorsionner côté pilote. On m’installe le volant amovible et m’aide à fixer le harnais. Surprise, malgré ma grande taille, je ne suis pas gêné aux entournures, même en hauteur, malgré le casque.
Pression sur le bouton au tableau de bord, le contact est mis, ainsi que l’indique l’afficheur digital situé devant moi. Je m’élance tranquillement du paddock, ayant en tête qu’il s’agit d’un prototype unique qui a coûté 1 million d’euros. La direction, très ferme initialement, s’allège avec la vitesse. C’est-à-dire très vite, car l’auto gratifie de belles accélérations !
La motorisation apparaît très progressive, d’autant que la transmission ne compte qu’un seul rapport, et parfaitement adaptée à l’adhérence disponible, ce qui facilite la prise en main. Cela dit, dans le serré, le volant demande beaucoup d’efforts, un point à améliorer. Toutefois, je constate que l’auto est parfaitement équilibrée, précise et dotée d’une bonne motricité, alors que, électrique oblige, la totalité du couple est utilisable en permanence. Aussi, à mesure que la confiance croît, je hausse le rythme et commence à solliciter sérieusement les freins, en utilisant mon pied gauche. Bizarrement, la consistance de la pédale ne me semble pas constante, et le système manque de mordant.
Après un excès d’optimisme au bout de la ligne droite, je bloque les roues, et finis donc avec le train avant dans le gravier. Oups ! J’effectue une marche arrière, et rejoins les stands à petite vitesse : les cailloux crépitent dans les passages de roues… Ils ne s’en formalisent pas au stand, nettoient la voiture, et je repars.
Plus prudent, je m’applique à freiner de façon mieux dosée, mais voilà, à plusieurs reprises, je me coince le pied gauche entre le pédalier et le plancher ! Compris, je ne me sers plus que du droit, et ça se passe très bien : je peux appliquer du dégressif en appui. J’oublie le bruit désagréable des moteurs et prends un vif plaisir à cravacher cette électrique très physique sur circuit, d’autant qu’elle présente un gros avantage face aux thermiques : on n’y crève pas de chaud.
Avenir prometteur
De retour au stand, je fais part à Julien Beltoise du bien que je pense de son auto, et lui suggère que peut-être, il pourrait en dériver un modèle de route. "Vous n’êtes pas le premier à me le dire. Pourquoi pas dans un avenir lointain, mais pour l’instant, on se concentre sur le circuit". Son objectif est de la proposer à 150 000 € dès 2022 pour un usage stage, et de parvenir à un prix de revient de 10 €/km hors taxe, à peu près comme en Alpine Cup.
Un deuxième châssis 100 % spécifique est déjà l’étude pour cette BT01 conçue avec beaucoup de bon sens. En carbone, il devra répondre aux spécifications FIA pour être autorisé en compétition. On réfléchit aussi à de nouvelles batteries, refroidies non plus par air mais par liquide, et on a de grandes ambitions : produire plus de 150 voitures sur 5 ans. L’électrique a tout d’une chance pour l’automobile de circuit : silencieuse à l’extérieur et non polluante dans son utilisation, elle devrait calmer ceux qui militent pour la fermeture des pistes situées près de leur habitation, tout en donnant une image écologique au sport automobile.
De plus, ces autos zéro émission sont plus simples mécaniquement que les thermiques, donc certainement moins chères à développer pour une fabrication en toute petite série. Aussi, on espère qu’elles permettent à de nouveaux acteurs automobiles d’apparaître en France, à l’instar de Beltoise.
Caractéristiques
- Puissance : 394 ch
- Couple : 430 Nm
- Poids : 1 200 kg
- Batteries : Lithium-ion, 46 kWh
- Vitesse maxi : 210 km/h
- 0 à 100 km/h : 4,0 s
- L x l x h : 4,55 m x 2,05 m x 1,18 m
- Jantes : 19 pouces
- Pneus : Michelin Pilot Sport 4S (stages) ou Sport Cup 2 (compétition)
Photos (21)
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