Requiem pour la Renault Zoe
Le mois prochain, la dernière petite citadine sortira des chaînes de Flins ou elle est assemblée depuis onze ans. Fin de l'histoire pour la pionnière des voitures électriques européennes qui n'aura pas droit à une deuxième vie.
On la savait condamnée. On ignorait simplement la date de son enterrement. Désormais, c’est officiel : la dernière Renault Zoe quittera la chaîne de montage de Flins le 30 mars prochain. Avec sa disparition, ce sont 11 ans d’une histoire pionnière qui s’achèvent, et 11 ans d’un joli gâchis aussi.
Car cette auto, née d’une idée de Carlos Ghosn (qui n’a pas eu que des projets d’évasion) aurait pu être à la voiture électrique ce que l’Espace fut au monospace et le frigidaire au réfrigérateur. Mais il n’en sera rien, même si l’histoire a très bien commencé, à l’automne 2009, précisément, au salon de Francfort. Le boss de Nissan et de Renault a flairé la tendance électrique avant tout le monde, et présente ce jour-là, entre autres modèles, le projet Zoe. Une première mouture sera dévoilée dès l’année suivante au Mondial de Paris sous la forme d’un concept car. Zoe Review est son nom et son design global est furieusement proche de l’auto de série qui est lancée en 2013.
Un succès qui tarde à venir
Le carton annoncé par Carlos Ghosn n’est pas vraiment au rendez-vous, du moins pas tout de suite. Le patron espérait 150 000 ventes européennes par an pour la citadine électrique alors seule au monde, elle ne les atteindra jamais. En revanche, parler de bide pour la Zoe et justifier ainsi son arrêt de mort est pour le moins exagéré. Même si sa montée en température est plus proche du diesel que de l’électrique. Car les immatriculations ont progressé, poussées, il est vrai par les aides gouvernementales, mais aussi régionales, à l’époque.
Les 11 000 ventes de 2014, sont devenues 100 000 en 2020, avant que la dégringolade ne commence. Pas vertigineuses au début, puisqu’un an plus tard, la Zoe a tout de même trouvé 75 000 preneurs, avant de dévisser totalement : l’an passé, seules 6 000 petites citadines ont été vendues. C’est sur ce piètre score que la Zoe va quitter l’usine de Flins, remplacée bientôt par la future R5 tout aussi électrique.
Comment en est-on arrivé là ? Non pas en prenant de mauvaises décisions, mais plutôt en n’en prenant pas. Par manque de volonté de la direction et par manque d’enthousiasme du réseau, la Zoe s’est étiolée, la pionnière s’est effacée du paysage et aujourd’hui, plus personne ne pense à elle au moment de choisir sa petite électrique qui accuse ses 11 ans d’âge. Elle s’est laissée doubler par des plus jeunes qu’elle, des Fiat 500 e et autres Peugeot e 208. Même en interne, la Twingo électrique lui est passée devant le capot.
Bien sûr, elle a été restylée en 2019, et son moteur renouvelé, comme sa batterie. Une phase 2, c’est bien, mais une vraie nouvelle version, c’est mieux. Elle n’y a pas eu droit. La Zoe deuxième du nom était dans les cartons. Mais Luca de Meo n’en a pas voulu. À la place, il a préféré exhumer une vieille auto des années 70 : la R5. Sans doute une volonté de rejouer le coup le plus marquant de sa carrière, puisque la résurrection (avec succès) de la Fiat 500 en 2007, c’est lui, alors qu’il était directeur du marketing de la marque.
Est-ce dans les vieux pots qu’on vend les voitures à succès ? Le boss de Renault semble le penser, puisque, outre la R5, la R4, la Twingo et le Scenic renaissent. Mais un coup de poker comme la 500 n’est pas gagnant à tous les coups. Et il n’est pas sûr qu’en abandonnant le nom de Zoe qui a été, en son temps, la voiture électrique la plus vendue en Europe et continue de vivre sa petite vie en occasion, il ne perde pas un emblème. Les bons plats ne repassent pas toujours deux fois et la R5 n’a pas forcément l’aura d’une Fiat 500.
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