Série d'été - Comment va ... Opel
La pause estivale nous permet de dresser un bilan de mi-saison des activités des principaux constructeurs automobiles, sur fond d’électrification et de pénurie de composants électroniques ralentissant la production et les livraisons. Chaque jour durant les trois premières semaines d’août, Caradisiac s’intéresse ainsi aux principaux acteurs du marché français. Aujourd'hui, place à Opel. La marque allemande, passée sous le contrôle de Stellantis en 2017, a connu une belle embellie depuis. Mais elle va devoir faire sa mue électrique d'ici 6 ans. Trop rapidement ?
C'était un matin de printemps 2017 au 75 avenue de la grande Armée à Paris. Ce jour-là, Carlos Tavares président de PSA est aux côtés de Mary Barra, PDG de General Motors, propriétaire d'Opel. Les deux patrons se serrent la main et signent une liasse de documents. En moins d'une heure, la marque allemande devient française. Cinq ans plus tard, PSA n'est plus, le 75 avenue de la Grande Armée est désert, et Opel est aujourd'hui l'une des vingt marques de la galaxie Stellantis.
En une demi-décennie, l'Allemand est peut-être devenu moins germanique, mais son image a été profondément et positivement modifiée, et les trois quarts de ses autos ont été renouvelées. Car souvenons-nous de ce qu'Opel représentait sous l'ère de General Motors, qui a détenu la marque pendant 88 ans. Un groupe qui, à l'heure du bilan, aspirait littéralement les bénéfices lorsque les voyants étaient au vert. Ainsi, pendant plus d'une décennie, l'Allemand a perdu de l'argent, du moins comptablement. Mais lorsque survint la faillite de GM en 2009, la filiale allemande n'était plus bonne qu'à être vendue.
Bien sûr, les Européens continuaient à acheter des Opel (ou Vauxhall en Angleterre) même pendant les années les plus sombres, mais pour des raisons plus pragmatiques qu'affectives, sauf notables exceptions comme la Calbra, la GT ou la Tigra. Les autres modèles ? Ils étaient plutôt solides et plutôt pas trop chers. Et tant pis s'ils étaient bien trop lourds et munis de moteurs aux performances moyennes, aux vibrations au-dessus de la moyenne et à la sonorité très au-delà de la moyenne.
Puis vint le temps ou le suzerain PSA, puis Stellantis a ordonné à son vassal allemand d'utiliser les organes du groupe. Et tout a changé. Une manœuvre qui a d'ailleurs commencé avant le rachat puisque les premiers Opel Grandland X et Crossland X étaient déjà des Peugeot 3008 et 2008 de première génération. Après le rachat, toutes les autres voitures de la gamme sont passées au même régime. La Corsa (dérivé de la Peugeot 208) a ouvert le bal de la renaissance, suivie du Mokka (un 2008 germanique) de l'Astra (cousin de la 308) cette année, en version berline comme break.
Un positionnement façon Volkswagen et Skoda
Un maquillage plutôt réussi puisque Opel a grappillé des parts de marché en Europe. Elles s'établissent aujourd'hui à 2,6 % pour la France et sont en hausse depuis l'an passé, alors que les ventes sont en baisse. Mais la chute est moins prononcée que pour les autres constructeurs. La raison de ce succès, même s'il n'est pas spectaculaire, tient peut-être au positionnement actuel de la marque. Un positionnement, et une séparation de la clientèle entre Peugeot et Opel, finalement proche de celle qui différencie Volkswagen et Skoda. À VW et au lion, le presque premium, qui ravira les fans de technos (et pour Peugeot, les aficionados d'un design affirmé) et à Skoda comme à Opel, une clientèle plus traditionnelle, qui recherche une auto de bonne tenue, un tout petit peu moins chère et pas trop extravagante.
Cette clientèle, un peu plus âgée que celle de Peugeot, apprécie également une planche de bord, et une position de conduite plus classique. En somme, et pour caricaturer, un acheteur qui souhaiterait s'offrir une Peugeot, mais sans l'i-cockpit, sans le volant minuscule à méplat et sans les compteurs illisibles s'il est trop grand, roulera en Opel.
Reste que ce positionnement malin pourrait bien changer. Car la décision a été prise l'an passé : Opel va devenir une marque entièrement électrique. C'est certes le sort réservé à ttous les constructeurs d'ici 2035, mais l'Allemand va devoir devancer l'appel et basculer d'ici 2028. 6 ans pour tout chambouler c'est peu. La route est d'ores est déjà tracée, du moins en connaît-on les premiers contours.
Le prochain Crossland, qui débarque en 2024, sera entièrement électrique, de même que la future Insignia, la berline aujourd'hui thermique et en fin de vie, qui arrivera en 2026. Un grand SUV électrique baptisé Manta, du nom d'un coupé plutôt mythique chez Opel sera lui aussi de la partie cette année-là. Il ne restera plus qu'à convertir aux watts les Opel à fort volume que sont les Astra et Corsa, ainsi que le petit SUV Mokka.
On le voit, Opel s'est vu assigner le rôle précurseur chez Stellantis en matière d'électrification totale, puisque la plupart des autres marques du groupe annoncent plutôt une bascule à l'horizon 2030. Et c'est justement ce rôle précurseur qui pose question. On l'a dit, l'Allemand n'a pas vraiment la réputation d'une marque technophile et semble disposer, avec Citroën, de l'une des clientèles les plus âgées du groupe.
Pourquoi dans ce cas vouloir en faire le pionnier maison de l'électricité ? Peut-être que les services marketing de Stellantis détiennent des études démontrant que les quinquas et les sexagénaires sont plus fans de nouvelles technos que les générations plus jeunes ? À moins que les mêmes services se contentent de considérer (à juste titre) que la clientèle la plus âgée, et également celle qui a le pouvoir d'achat le plus élevé. Et les voitures électriques étant plus chères que les thermiques, CQFD.
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