Un an après l'affaire Volkswagen, 36 % des Français prêts à abandonner le diesel - Sondage exclusif Harris Interactive pour Caradisiac
Le 18 septembre 2015, le scandale Volkswagen éclatait aux Etats-Unis, générant une onde de choc qui allait se propager au monde entier. Un an après, Caradisiac s’intéresse aux conséquences de l’affaire pour les automobilistes français. Notre sondage exclusif Harris Interactive montre notamment que le scandale incite aujourd’hui 36 % d'entre eux à se détourner des motorisations diesels. Une tendance qui ne manquera pas d'inquiéter les constructeurs tricolores, spécialistes de cette technologie.
Le début de la fin pour le diesel ? Un an après qu'a éclaté le scandale de la fraude aux émissions polluantes organisé par le groupe VW pour certaines de ses motorisations TDI, et alors que des soupçons plus en plus lourds pèsent sur les arrangements avec la réglementation pratiqués par d'autres constructeurs (et notamment Renault), il semble que les automobilistes se détournent de plus en plus des blocs gazole. En Europe, la part du diesel dans les ventes de voitures neuves approche aujourd'hui la barre des 50 %, contre 53,3 % en 2013. En France, si 53 % des voitures vendues depuis le début de l’année carburent encore au gazole, c'est 5 % de moins qu’en 2015 et loin des 77 % atteints en 2008.
Dans ce contexte, Caradisiac a mandaté Harris Interactive pour mesurer l'impact réel de l'affaire Volkswagen sur les automobilistes français, vis-à-vis des motorisations diesel bien sûr, mais aussi d'une marque dont on peut imaginer l'image bien écornée.
Volkswagen a reconnu il y a un an avoir utilisé un logiciel permettant de falsifier les mesures d'émissions de gaz polluants et permettre ainsi la commercialisation de véhicules diesel plus polluants que ne le permet la législation. Diriez-vous que cette affaire vous incite à vous détourner des motorisations diesel ?
Oui, tout à fait |
15 % |
TOTAL OUI : 36 % |
Oui, plutôt |
21 % |
|
Non, plutôt pas |
33 % |
TOTAL NON : 64 % |
Non, pas du tout |
31 % |
|
Ne sait pas |
0 % |
Le scandale Volkswagen entraîne ou amplifie aujourd'hui un phénomène de rejet du gazole chez plus du tiers des automobilistes Français. On observe que ce mouvement est partagé dans des proportions assez proches chez les hommes et les femmes et dans toutes les tranches d'âge. Chez ces "anti-triche", on note que les jeunes apparaissent un peu plus indulgents. Ainsi, du côté de ceux que l'affaire VW ne gêne pas, il apparaît que les moins affectés sont les 18-34 ans (41 % d'entre eux disent que cette affaire ne les incite "plutôt pas" à se détourner du diesel). A l'inverse, cette triche avérée passe moins bien chez les 50 ans et plus (38 % des 50-64 ans et 39 % des +65 ans affirment que l'affaire contribue à les détourner du diesel).
Oui, certainement |
6 % |
TOTAL OUI : 26 % |
Oui, probablement |
20 % |
|
Non, probablement pas |
20 % |
TOTAL NON : 38 % |
Non, certainement pas |
18 % |
|
Pas d’intention d’achat |
36 % |
Si vous avez répondu non à la question précédente, pour quelle raison ?
Parce que ce constructeur a admis il y a un an avoir utilisé un logiciel permettant de falsifier les mesures d'émissions de gaz polluants et permettre ainsi la commercialisation de véhicules diesel plus polluants que ne le permet la législation |
23 % |
Parce que les véhicules Volkswagen ne m'intéressent pas |
47 % |
Pour une autre raison |
30 % |
Près d'un quart de ceux qui pensent acheter une voiture neuve affirment qu'ils ne se tourneront pas vers Volkswagen en raison du scandale. Un rejet plus marqué chez les hommes et chez les 50 ans et plus, alors même que c'est dans cette tranche d'âge que l'on dénombre la plus forte proportion d'automobilistes susceptibles de s'intéresser à VW. Un paradoxe qui montre que le lien de confiance apparaît distendu, voire rompu avec cette marque.
Enquête réalisée en ligne du 13 au 14 septembre 2016. Echantillon de 1 000 répondants représentatifs des Français âgés de 18 ans et plus, issus de l’access panel Harris Interactive et interrogés selon la méthode des quotas (sexe, âge, CSP et région).
Caradisiac revient ici sur le scénario de l'affaire Volkswagen, la crise de confiance qu'elle a engendrée, ses conséquences sur le groupe et sur l'évolution de l'offre automobile dans son ensemble.
Le 18 septembre 2015, l’agence environnementale américaine EPA accusait le groupe Volkswagen d’avoir équipé ses voitures à moteur diesel vendues aux USA d’un système permettant de fausser les mesures d’émissions d’oxydes d’azote (NOx), en violation du Clean Air Act en vigueur aux Etats-Unis.
Volkswagen reconnaissait très vite les faits, et précisait que 11 millions de véhicules équipés d’un moteur de la famille EA189 étaient en réalité concernés, dont 8,5 millions en Europe et près de 950 000 en France. Les marques touchées chez nous sont Volkswagen (574 259 véhicules particuliers et 24 523 utilitaires) Audi (189 322 voitures), Seat (93 388 voitures) et Skoda (66 572 voitures).
D’un point de vue judiciaire, les conséquences sont bien différentes d’un côté de l’Atlantique et de l’autre. Aux Etats-Unis, où 475 000 voitures équipées du bloc 2.0 TDI sont concernées, le constructeur s’apprête à régler une amende de 14,7 milliards de dollars (environ 13,2 milliards d’euros). Cette somme couvre notamment une somme de 2,7 milliards de dollars censée « remédier intégralement » aux conséquences des émissions de gaz polluants de ses voitures aux USA, une somme de 2 milliards de dollars destinée à un fonds de promotion des voitures « vertes » à zéro émission, ainsi qu’une indemnisation financière des clients (jusqu’à 10 000 $ par voiture, règlement en espèces). À cela s’ajoute la possibilité de faire reprendre (rachat ou cessation de leasing) son véhicule par Volkswagen ou de conserver celui-ci pour le faire réparer gratuitement.
Matthias Müller, Président du Directoire du Groupe Volkswagen : "Une crise peut mener aux abysses, mais cela peut aussi marquer le début d'une aventure nouvelle".
En Europe, la démarche est moins spectaculaire: les clients seront invités à une campagne de rappel laquelle consiste en une modification logicielle (à quoi s’ajoute sur les blocs 1.6 TDI l’installation d’un « régulateur de flux » en plastique devant le débitmètre d’air)…et c’est tout.
Or, cette inégalité de traitement est loin de satisfaire la commissaire européenne à la Justice Vera Jourova, laquelle reproche à VW d'avoir enfreint les règles protégeant les consommateurs. « Dans la majorité des États membres, il semble que les règles aient été violées en termes de pratiques (commerciales) déloyales », a-t-elle affirmé lors d'un point de presse à Bruxelles début septembre. Elle estime que VW pourrait aussi avoir transgressé la législation européenne sur les ventes et garanties de biens de consommation, et invite les consommateurs à porter leurs dossiers devant les tribunaux, dans l’espoir que ceux-ci forcent VW à apporter compensation. Une association de consommateurs espagnole, l'APDEF, entend d’ailleurs mobiliser les « victimes » de Volkswagen en Europe. Le quotidien allemand Die Welt, cité par l’AFP, écrit ainsi que « l'entreprise se voit maintenant menacée, après les Etats-Unis, de devoir affronter aussi dans l'UE des milliards d'euros d'amende et une vague de demandes de dédommagements ».
Volkswagen de son côté nie avoir enfreint les codes de la consommation en vigueur dans l'UE et précise qu'une solution technique est déjà disponible pour plus de 50 % des véhicules concernés dans les 28 pays de l'UE. « Nous estimons en conséquence qu'il n'y a pas de place ou de nécessité de compensation supplémentaire », écrit le groupe de Wolfsburg dans la lettre signée par son Thomas Steg.
Des ventes en hausse malgré tout
L’aplomb dont semble faire preuve Volkswagen peut aussi s’expliquer par le fait que d’un point de vue commercial, le scandale a bel et bien fait pschiiit, pour reprendre une célèbre formule de Jacques Chirac. Au premier semestre 2016, le groupe a ainsi fait état de ventes supérieures de 1,5 % par rapport à la même période en 2015 (avant que n’éclate le scandale, donc). La marque VW souffre certes un peu (ventes en baisse de 0,4 % de janvier à août par rapport à 2015, d’après l’Association des constructeurs automobiles européens), mais Audi (+8,7 %), Skoda (+6,5 %) et Seat (+0,3 %) n’apparaissent guère affectées.
Le bénéfice d’exploitation s’est établi à 7,5 milliards au premier semestre, et même si 2,2 milliards en ont été retranchés pour couvrir les dépenses liées au dieselgate (amendes, etc.), « cela montre bien que la capacité bénéficiaire du Groupe Volkswagen reste solide », commente Frank Witter, Directeur Financier du Groupe. « Mais il va falloir continuer à travailler dur pour absorber les effets de la question des moteurs diesel. » De fait, en tenant compte de l'évolution de la situation économique, de celle des taux de change et bien évidemment du dieselgate, le Groupe Volkswagen, prudent, dit anticiper une baisse de 5 % du chiffre d'affaires en 2016 par rapport à 2015. Loin de la catastrophe, donc. D’ailleurs, le sondage Harris Interactive réalisé pour Caradisiac montre que parmi les français qui ont l’intention d’acheter une voiture à l’avenir, 40 % envisageraient d’acquérir un modèle Volkswagen. Un bon score, donc.
Quant à l’action VW, si elle a été chahutée à l’automne 2015 et n’a pas retrouvé ses niveaux pré-scandale elle reste une valeur forte : après avoir dégringolé à 92 € le 2 octobre 2015, alors qu'elle s’échangeait encore 167 € le 17 septembre, elle vaut actuellement autour de 132 €. Bref, Volkswagen fait mieux que résister à la déflagration dont il est la cause.
Cela se vérifie aussi sur le marché de l’occasion : « si l’on observe les volumétries de recherches mensuelles en occasion sur La Centrale, on constate clairement un impact « dieselgate » entre septembre 2015 à mars 2016. Mais un an après qu’a éclaté l’affaire, l’attractivité de Volkswagen est revenue autour de son niveau initial », observe Jérôme Ponsin, Directeur Général du site de petites annonces.
Cap sur l'électrique
D’après le sondage Caradisiac/ Harris Interactive, 36 % des français affirment que l’affaire VW les incite à se détourner des motorisations diesel. En d’autres termes, l’affaire VW accélère clairement un déclin du marché du diesel entamé quelques années plus tôt. Elle a en effet mis l’accent sur les difficultés des constructeurs à répondre à des normes toujours plus contraignantes, au-delà du seul cas de l’Allemand. Renault, Fiat ou Opel sont notamment pointés du doigt pour le fonctionnement des systèmes de dépollution de leurs voitures, lesquels semblent programmés pour assurer leur tâche uniquement quand ils sont soumis aux tests. Aux Etats-Unis, en Allemagne, mais aussi en France avec la Commission Royal réunissant des élus, experts et fonctionnaires, on s'attache à débusquer la triche, à traquer la fraude à la norme Euro 6. Depuis des mois, on ne parle plus que de ça : le diesel n’est plus une « motorisation propre », si tant est qu’il l’ait jamais été.
L’affaire semble par contre avoir des conséquences sur le marché du diesel. En Europe, la part des motorisations gazole dans les ventes de voitures neuves se situe autour de 50 %, contre 53,3 % en 2013. En France, la baisse est plus marquée encore : selon Yann Lacroix, conseiller sectoriel au cabinet de conseil Euler Hermes, « le renforcement et les surcoûts des contraintes d’émissions polluantes devrait ralentir la vente de véhicules diesel. Ainsi, la part des ventes de véhicules diesel dans le total des ventes françaises est passée de 73 % en 2012 à 53 % en 2016. »
Au Mondial de l'automobile, VW dévoilera un concept-car qu'il promet aussi révolutionnaire que le fut la Coccinelle en son temps. Motorisation ? Electrique, forcément.
La dynamique du changement est enclenchée. « Nous allons travailler dur sur notre capacité bénéficiaire afin de gérer les futurs investissement dont nous avons besoin pour transformer le cœur de notre activité automobile et bâtir une entreprise innovante au service de la mobilité. Dans le cadre de notre Stratégie 2025, toutes les marques et divisions vont travailler à améliorer l'efficacité de chaque maillon de la chaîne de valeur » déclare Matthias Müller, Président du Directoire du Groupe Volkswagen. Nouvel objectif du groupe : écouler 3 millions de véhicules électriques par an à l'horizon 2025, soit un quart de ses livraisons totales. "Une crise peut mener aux abysses, mais cela peut aussi marquer le début d'une aventure nouvelle", tranche Müller.
Conscients que cette technologie a atteint ses limites en matière de respect de l’environnement, et craignant d’avoir à régler des amendes au montant démesuré, tous les constructeurs changent leur fusil d'épaule pour mettre l’accent sur les motorisations mixtes essence/électricité ou purement électriques. Tout récemment, un responsable de Renault évoquait l'idée que les motorisations dCi disparaissent de l’offre du Losange d’ici 5 ans, ce qui apparaissait impensable il y a un an encore.
Le Mondial de l’automobile apportera très prochainement l’illustration de ce changement de paradigme, avec des annonces fortes et de nombreux concept-cars autour de la mobilité « zéro émission ». Côté diesel, aucune grande annonce n'est prévue. La page est presque tournée.
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