Un charmant petit coupé qui vient de l’Est : la Skoda 110R
Très finement dessiné, rarissime et doté d’un moteur arrière qui en pimente la conduite, la Skoda 110R constitue un joli objet de collection pour qui aime l’originalité. Dès 13 000 €.
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Les collectionnables sont des autos revêtant un intérêt particulier, donc méritant d’être préservées. Pas forcément anciennes, elles existent pourtant en quantité définie, soit parce que le constructeur en a décidé ainsi, soit parce que leur production est arrêtée. Ensuite, elles profitent de particularités qui les rendent spécialement désirables : une motorisation, un châssis, un design, ou un concept. Enfin, elles sont susceptibles de voir leur cote augmenter. Un argument supplémentaire pour les collectionner avant tout le monde !
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Tout le monde n'achète pas la voiture de collection de papa. Ni celle dont on a rêvé sur posters durant son adolescence. Non. Certains souhaitent des modèles totalement originaux, et pour ceux-ci, soucieux de ne pas tomber dans des clichés roulants nommés Peugeot 205 GTI ou Porsche 911, il y a la Skoda 110R. Rarissime, même en Tchéquie, celle-ci est la garantie d'une originalité totale, qui n'exclut pas un charme fou. Simple et facile à vivre, ce petit coupé promet des sensations très sympas, à défaut de vitesse. Par ailleurs, si on a envie de pousser le snobisme jusqu'au bout, on l'agrémentera d'exemplaire de l'Humanité d'époque et on se passera pour rire des discours de Georges Marchais dans un autoradio à lecteur de cassettes. Ambiance garantie !
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Les nazis sont écrasés comme les fientes qu’ils sont, et Staline s’empare du centre de l’Europe. Il y instaure des dictatures communistes, autant dire que libertés individuelles ne sont pas tolérées, et les économies strictement planifiées. Parmi les pays qui constituent le nouvel empire marxiste figure la Tchécoslovaquie, dont la particularité est de disposer d’une industrie automobile, florissante avant-guerre, grâce à ses marques Tatra et Skoda.
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Autant dire que pour elles, les marchés intérieurs s’effondrent tandis que les collaborations extérieures s’éteignent. Tout devra être développé en interne, avec les moyens du bord, peu de budget et la supervision d’une administration aussi rigide que le rideau de fer qui s’est dressé entre l’Est et l’Ouest de l’Europe. Ce qui ne signifie pas que tout s’arrête, loin de là : les ingénieurs déploieront des trésors d’intelligence et d’astuce pour développer des nouveaux modèles.
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Skoda ne parviendra à abandonner les technologies qu’il avait développées avant 1940 que durant les années 60. La marque passe au tout à l’arrière, une architecture en vogue à l’Ouest depuis la fin des années 40 sur les petites voitures mais qui y connaît déjà un déclin. La marque tchèque a mis au point un nouveau moteur original, non par sa distribution à arbre à cames latéral mais le fait de poser une culasse en fonte sur un bloc en alliage…
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Il équipe la berline 1000 MB, par ailleurs dotée de 4 routes indépendantes, présentée en 1964 : une rivale valable aux Renault 8 et Simca 1000 en France, où elle est exportée. Bénéficiant d’un gros restylage en 1969, elle se renomme 100 ou 110 selon la version, et se décline en un très fin coupé dit 110R. Lancé à la foire de Brno en août 1970, il accueille quatre passagers et s’équipe d’un 4-cylindres 1,1 l développant 55 ch DIN. La production débute fin 1970, et il arrive en France en 1971. Capable de 145 km/h, il n’a pas à rougir face à une Fiat 850 Sport Coupé, dont le 903 cm3 arrière se limite à 52 ch.
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Toutefois, à 10 990 F (soit 13 300 € actuels selon l’Insee), il n’est que 550 F moins cher que son rival italien, très apprécié. Et si on aime les petites sportives à moteur arrière, la Simca 1000 Rallye, à 9 565 F constitue une concurrente dangereuse. Dans ce contexte, la Skoda 110R ne perce pas chez nous. Toutefois, la Skoda est bien équipée : compte-tours, feux de recul, sièges-couchettes, vitres sans encadrement, boîte à gants fermée : pas si courant à l'époque. en Angleterre, en Allemagne ou encore en Suède, il parviendra à se constituer une petite clientèle.
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Par la suite, les évolutions se feront dans le détail : emplacement radio et miroir de courtoisie en 1972, face avant intégrant des projecteurs à longue portée en 1973, année où les sièges, la commande de boîte et la ventilation sont améliorés. En 1974, la boîte est renforcée, les sièges troquent le skaï contre du tissu et des enjoliveurs imitant les jantes Fuchs de la Porsche 911 apparaissent. En 1975, le moteur bénéficie d’une étanchéité améliorée, tant du côté du joint de carter que des pistons, alors que les parechocs sont modifiés.
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En 1976, on adopte le moteur de la 120 L en réduisant la course pour conserver la cylindrée de 1,1 l, alors qu’en 1977, un pont plus long est adopté. En 1978, la lunette arrière chauffante apparaît en option, qui devient en série pour 1979. La production s’interrompt en 1980 : la 110R a été fabriquée à 56 902 unités, dont l’écrasante majorité a été exportée. Son but était de rapporter des devises, et elle a plutôt bien réussi. Sa remplaçante 120/130R ne déméritera pas non plus.
Combien ça coûte ?
Difficile à dire, tant la voiture est difficile à dénicher sous nos latitudes. Disons qu’il faut tabler sur 13 000 € pour un exemplaire en bon état, 16 000 € pour une auto en très bon état et plus de 20 000 € pour un coupé réellement irréprochable.
Quelle version choisir ?
Comme il n’y en a qu’une, choisissez d’abord un exemplaire totalement d’origine et complet.
Les versions collector
Toutes les 110R, même si elles ne sont pas parfaites, tant il est compliqué d’en dénicher une.
Que surveiller ?
Mécaniquement, si la 110R a été bien entretenue, elle est du genre robuste, ne voyant sa consommation d’huile augmenter que passé 100 000 km. Auparavant, on aura dû subir bien des fuites, surtout avant 1976. Problème, le lubrifiant peut couler jusque dans les freins arrière. Côté trains roulants, les étriers de freins avant ont tendance à gripper, alors que la direction prend du jeu. Problème, ses pièces sont difficiles à trouver.
Toutefois, globalement, le principal ennemi de la 110R reste la corrosion, qui attaque les planchers, les bas de caisse, et les ancrages de suspension notamment. Dans l’habitacle, les accessoires sont fragiles, tout comme les revêtements de sièges, et, bien évidemment, rien ne se trouve en neuf… Cela dit, la mécanique et la fabrication globalement simples facilitent l’entretien et les réparations.
Sur la route
J’ai pu prendre le volant d’un superbe exemplaire de 1971 appartenant au musée Skoda. Cette voiture, finement dessinée et bardée de chromes, évoque plutôt les années 60. En tout cas, son charme est désarmant. A bord, la présentation se veut soignée avec le volant à trou-trous et l’instrumentation complète, tandis que l’habitacle est entièrement garni. Honnêtement, la qualité d’assemblage vaut bien celle d’une occidentale contemporaine, malgré des accessoires cheaps, tels les commodos. Surprise, quatre passagers prennent aisément place à bord. Rare sur un petit coupé !
Malgré un pédalier un peu décalé vers la droite, la position de conduite se révèle satisfaisante et le siège acceptable. Surtout, grâce aux montants très fins, la visibilité est panoramique ! Le petit moteur s’éveille dans un bruit très sympathique : en avant. La direction, très douce, révèle une précision étonnante sur cet exemplaire dont la boîte se manie aisément. Plutôt souple, le 4-cylindres fait preuve de bonne volonté, mais pas vraiment de caractère. Il rappelle par son tempérament un Cléon-Fonte Renault, loin de la rage du 903 cm3 Fiat, mais grâce à une boîte très courte, les accélérations demeurent correctes. A 110 km/h, on est presque à 5 000 tr/min, et là, on commence à surveiller l’aiguille du thermomètre d’eau !
A cette vitesse, la tenue de cap demande un peu d’attention, mais en virage, la Skoda se révèle saine dans ses mises en appui, sans prendre de roulis outre-mesure. Pourtant, la suspension, certes ferme, n’a rien d’un bout de bois. Par ailleurs, l’auto n’est pas exagérément bruyante. En somme, on a affaire à une petite GT de l’Est, pas sportive mais homogène. Même le freinage est convenable ! Toutefois, à 8 l/100 km/h, la 110R est assez gourmande.
L’alternative youngtimer
Skoda Fabia RS (2003 – 2007)
Si on veut une petite Skoda sportive déjà un peu ancienne, il faut se tourner vers la Fabia RS, apparue en 2003. Etonnamment, dans sa première génération, elle adopte un moteur diesel, un 1,9 l TDI développant 130 ch. A l’époque, ce type de motorisation était encore plus à la mode que les hybrides aujourd’hui ! Il faut dire que ce TDI garantit à la Fabia des performances élevées (205 km/h au maxi, reprises canons), pour une consommation ridicule, de l’ordre de 5,8 l/100 km. Bien équipée et dotée de trains roulants rigoureux, cette bombinette au gasoil se révèle plutôt efficace. Par ailleurs, son effet turbo marqué rend la conduite plutôt amusante, malgré un niveau sonore élevé. La Fabia RS, légèrement reliftée en 2004, sera retirée en 2007. A partir de 5 500 €.
Skoda Rapid 110R (1971), la fiche technique
- Moteur : 4 cylindres en ligne, 1 107 cm3
- Alimentation : carburateur double corps Jikov
- Suspension : bras superposés, ressorts hélicoïdaux, barre antiroulis, amortisseurs (AV) ; bras obliques, ressorts hélicoïdaux, amortisseurs (AR)
- Transmission : boîte 4 manuelle, propulsion
- Puissance : 55 ch à 4 650 tr/min
- Couple : 86 Nm à 3 500 tr/min
- Poids : 885 kg
- Vitesse maxi : 145 km/h (donnée constructeur)
- 0 à 100 km/h : 8,5 s (donnée constructeur)
> Pour trouver des annonces de Skoda, rendez-vous sur le site de La Centrale.
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