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Vignette Crit’air et zone à faibles émissions : pourquoi ça ne marchera pas

Les zones à faibles émissions (ZFE) vont se multiplier en France cette année. Et l’an prochain, les critères d’ancienneté seront durcis et les PV envoyés par des systèmes automatiques. Respirera-t-on mieux ? Hélas, non…

Vignette Crit’air et zone à faibles émissions : pourquoi ça ne marchera pas

L’an prochain, environ 20 % du parc motorisé d’Ile de France sera interdit de circulation en semaine de 8h00 à 20h0 dans le périmètre de l’A86. En effet, avec le ciblage des Crit’air 3, opportunément reporté après les élections régionales, seront bannies les voitures essence d’avant 2006, diesel d’avant 2011 et les motos d’avant 2007.

En France, ces exclusions vont s’appliquer plus ou moins durement à 272 nouvelles villes, faisant passer le nombre de communes classées ZFE de 239 à 511. D’ici 2025, toute communauté d’agglomérations de plus de 150 000 habitants devra s’y convertir.

Bref, la petite vignette de couleur, ce n’est plus seulement un truc de Parigot.

Plusieurs millions de conducteurs seront très bientôt concernés, contraints, s’ils persistent à aller en ville, à monter dans le bus ou à changer de voiture ou de moto.

Une baisse de moitié de la pollution…avant les ZFE

On pourra objecter que la propreté de l’air de nos villes s’est déjà considérablement améliorée depuis une vingtaine d’années. Ce n’est pas moi qui l’affirme mais le ministère de la transition écologique.

On y apprend que depuis l’an 2000, les particules PM10 ont diminué de 51 %, les PM2,5 de 61 % et les émissions de dioxyde d’azote, les fameux NOx, de 56 %.

Et qu’en vingt ans, le nombre d’agglomérations « présentant des dépassements de seuils réglementaires pour la protection de la santé à long terme pour les N0x » est passé de trente-sept à… neuf.

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Malgré ces énormes progrès, la pollution de l’air causerait en France 49 000 décès prématurés par an et près de 7 000 pour la seule Ile de France. Je ne me risquerais pas à contester ces chiffres - ni à souligner l’adjectif « prématuré » - et admets volontiers qu’un tel bilan, guère éloigné quantitativement et qualitativement de celui du Covid, mérite quelques contraintes.

J’affirme en revanche que cet effort que l’on nous demande collectivement, ces millions de conducteurs mis à pied, ces millions de voitures et de motos récentes promises à la casse ou à la braderie, tout cela n’aura que peu ou pas de résultat.

La vignette Crit’air à côté de la plaque

Le classement Crit’air est très pertinent sur le monoxyde de carbone (CO) et les hydrocarbures imbrûlés (HC), mais ces deux polluants, presque éradiqués avec la généralisation du pot catalytique dans les années 90, ne sont plus depuis longtemps une menace pour la santé publique.

En revanche pour les deux polluants qui le demeurent – particules et oxydes d’azote (NOx) – et que les ZFE sont censées réduire, la vignette Crit’air est à côté de la plaque. Les autos qu’elle autorise en émettent généralement autant, voire plus, que celles qu’elle écarte du trafic... Dingue, non ?

Pour comprendre, il faut savoir que la Commission européenne -celle-là même qui met la France en demeure, sous peine de grosse amende, de réduire les taux de NOx et de particules dans nos villes- est aussi celle qui a édicté les normes Euro sur lesquelles se fondent les vignettes Crit’air.

Or, ces normes Euro ont, jusque très récemment, reposé sur des tests très peu représentatifs d’un roulage réel, et en prime très faciles à tromper ou contourner, ce que tout le monde savait.

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Pour tout compliquer, elle a imposé ensuite et parallèlement une diminution des émissions de CO2 qui a favorisé le développement de technologies – diesel à injection directe haute pression et moteur essence turbo injection directe downsisés – fortement émettrices de NOx et/ou de particules.

Pour faire simple, jusqu’à récemment, réduire les particules diesels revenait à augmenter les NOx et réciproquement. Et pour faire court, meilleur était le rendement d’un moteur, plus il en crachait. Cette contradiction entre propreté et rendement, conjuguée à l’alourdissement de voitures toujours plus puissantes et au laxisme insensé des tests d’homologation, a permis voire encouragé les pires aberrations technologiques et sanitaires.

Si cela vous donne mal à la tête, sautez les deux paragraphes suivants et passez directement aux deux derniers. Sinon, accrochez-vous, ça va fumer.

Adieu les particules diesels, vive les particules essence

Prenons les particules. Grâce à la systématisation du filtre à particules (FAP) imposé par la norme Euro 5 de septembre 2009 (nouveaux modèles) puis janvier 2011 (tous modèles), les diesels les ont divisées par cinq comparé à la norme Euro 4.

Finies les particules ?

Pas de chance, du côté des moteurs essence, en 2014 la norme Euro 6b autorisait ceux à injection directe, devenus largement majoritaires, à en émettre dix (10 !) fois plus que les diesels, ce qu’ils faisaient déjà allègrement depuis quelques années mais on ne le mesurait pas.

Des particules ultra-fines qui seraient – les avis divergent – plus toxiques encore que celles des diesels et qu’un FAP basique, bien moins cher que celui d’un diesel, aurait pu arrêter.

Mais moins cher, c’est encore trop cher et la Commission se laissa convaincre par le lobby des constructeurs de les en exempter jusqu’en 2018 pour les nouveaux modèles et 2019 pour les autres. Pourquoi une telle permissivité ? Au nom de la sacro-sainte baisse des émissions de CO2, les tests d’homologation d’alors laissant encore croire que ces petits moteurs étaient 30 % plus sobres.

Aujourd’hui, ces voitures arborent presque toutes les vignettes Crit’air 1 et 2 et vont nous enfumer encore longtemps tandis que les voitures et moto essence Crit’air 3 qui ne crachent que très peu de particules et à peine plus de CO (oxyde de carbone) et HC (hydrocarbures) resteront au garage ou partiront à la casse.

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 Les diesels du scandale Volkswagen rouleront encore

Pour les oxydes d’azote des diesels, c’est encore plus trivial.

La norme Euro 4 de 2005-2006 prétendait les diviser par 2, puis la norme Euro 5 par encore 1,4 et enfin la norme Euro 6 par 2,25. Pendant ce temps, tous les constructeurs adoptaient, pour abaisser consommations et émissions de CO2, des technologies d’injection à très haute pression qui ne pouvaient que les augmenter.

Car les NOx ne sont pas un résidu du carburant que l’on peut filtrer ou oxyder, c’est une dégradation du comburant, l’air qui voit se recombiner, sous l’effet de la pression et de la chaleur, atomes d’oxygène et d’azote. Un polluant lié au rendement, difficile à éliminer sur un diesel qui fonctionne en excès d’air.

Difficile mais pas impossible à condition d’y mettre le prix en préférant le système SCR à injection d’urée (qui ne s’est généralisé que tout récemment) au système LNT et son piège à NOx dont le fonctionnement repose sur deux vannes EGR et n’est garanti – comme le prévoit l’homologation ! – qu’à des températures comprises entre 20 et 30 °, soit de mai à septembre hors canicule et coup de froid.

Vignette Crit’air et zone à faibles émissions : pourquoi ça ne marchera pas

Ce conflit entre normes et évolution technique était la porte ouverte à toutes les tricheries et bricolages, facilités par des protocoles d’homologation particulièrement ingénus. Les constructeurs faisaient semblant de dépolluer, et la Commission européenne, par connivence ou indifférence, semblant d’y croire.

Jusqu’à l’explosion du scandale des diesels truqués de Volkswagen, qui a montré l’étendue de la supercherie avec des taux de NOx plusieurs fois voire dizaines de fois supérieurs aux normes. On a découvert alors qu’un diesel Euro 5 pouvait cracher bien plus de NOx qu’un vieux Euro 3. Pas seulement chez Volkswagen, mais aussi chez Renault-Nissan  Ford, Opel et bien des constructeurs qui ne seront jamais sanctionnés, ni même forcés à corriger leurs voitures, faute d’obligation pour le client de répondre au rappel en ramenant sa voiture au garage pour modification.

Une bonne moitié, et peut-être les deux tiers du parc diesel Euro 5 et 6, est ainsi vérolée. Des millions de voitures qui ont droit à la vignette Crit’air 2 et pourront continuer à nous iNOxiquer tous les jours de la semaine pendant que les diesels Euro 3 puis Euro 4 iront en Afrique ou au broyeur.  

La solution ? Il n’y a pas de solution !

Pardon d’avoir été si indigeste, mais voici pourquoi les objectifs de qualité de l’air des ZFE ne seront jamais atteints, du moins pas avant que la voiture électrique ne se diffuse à grande échelle.

La solution en attendant ? Il n’y a pas de solution.

L’obstacle n’est pas technique : on pourrait facilement établir une discrimination fine des voitures par leur technologie de dépollution, identifiable par leur type mine et leur numéro de série. En clair, frapper d’interdit certaines voitures récentes particulièrement polluantes et en ré-autoriser d’autres, vieilles de quinze ou vingt ans, presque toutes à moteur essence,  pas vraiment propres mais peu émettrices de NOx et particules.

Vignette Crit’air et zone à faibles émissions : pourquoi ça ne marchera pas

Car on sait précisément quels diesels récents explosent, frauduleusement ou malicieusement, les limites de NOx. Et quels moteurs essence ont été dispensés de FAP en étant autorisés par dérogation à rejeter jusqu’à 6x10 puissance 12 particules au km au lieu de 6x 10 puissance 11 comme les diesels. De nombreux tests d’émission en condition réelle, ceux de la commission Royal, de l’Ademe ou de Transports & Environnement, ont démontré le lien entre résultats désastreux et certaines technologies employées. 

Mais quel homme politique assumerait d’interdire de ville des millions de voitures estampillées Crit’air 1 ou 2 n’ayant pas plus de dix ans et pour certaines que trois ou quatre ans ?

Avis aux avocats !

Je ne prétends pas qu’il faille absolument opérer ce tri car après tout, comme dit plus haut, la qualité de l’air s’est déjà considérablement améliorée. Et devrait s’améliorer encore, non grâce aux ZFE, mais par… l’électrification du parc.

J’affirme en revanche que le système Crit’air d’exclusion des véhicules plus anciens ne repose sur aucune base scientifique valide depuis que l’obsolescence et le contournement des normes Euro jusqu’en janvier 2020 ont été établis.

Par conséquent, il est absolument inique et infondé d’écarter de la circulation les voitures essence postérieures à la norme Euro 2 de 1996-1997 comme les motos à partir de la norme Euro 2 de 2003. Les unes comme les autres ne rejettent que des quantités minimes de particules et de NOx, les deux seuls polluants nommément désignés par la Commission européenne et le Conseil d’État pour motiver la création de nos ZFE et qui constituent encore une menace pour la santé publique.

Avis aux associations et avocats, il y a du grain à moudre.

 

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