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Violette Morris : l'incroyable vie d'une incroyable championne méconnue

Dans Loisirs / TV

Michel Holtz

Rarement, une vie aura été aussi intense, scandaleuse, haute en couleurs et contradictoire. Cette vie, c'est celle de Violette Morris, championne multisport et pilote automobile qui aura passé sous le drapeau à damiers devant nombre de ces messieurs. Une vie incroyable que retrace un documentaire sur France 5.

Violette Morris : l'incroyable vie d'une incroyable championne méconnue

Elle aura pratiqué tous les sports, à très haut niveau. Elle aura été portée aux nues dans les années 20 et 30. Et elle aura été totalement oubliée après-guerre. L’histoire de Violette Morris, pilote automobile, nageuse, athlète, footballeuse et scandaleuse est aussi intense qu’intrigante et contradictoire. Une histoire qui n’est pas de celles qu’on oublie.

Et pourtant, dès l’après-guerre, elle est renvoyée au cimetière de l’histoire et, depuis, plus personne ne se souvient d’elle. Heureusement, France 5, a eu la bonne idée de produire et de programmer un documentaire, fort justement intitulé Violette Morris une femme à abattre, toujours disponible en replay. Car elle a été abattue par la résistance en 1944 pour son rôle (avéré) de collaboratrice. On ne retiendra alors plus que son surnom de hyène de la Gestapo, oubliant qu’on l’avait tant applaudi avant guerre, oubliant aussi son rôle d’héroïne pendant le premier conflit mondial, et, dans la foulée, l’ensemble de son palmarès sportif, à nul autre pareil.

Championne de France d'athlétisme et membre de l'équipe de France de foot

Car Violette Morris voulait tout gagner, tout de suite, dans toutes les disciplines. Elle est une femme ? Et alors. Elle devient championne de France d’athlétisme. Elle joue dans l’équipe de France de foot féminin. Au javelot, elle est médaille d’or des premiers jeux olympiques féminins, en 1921, à une époque ou Coubertin refuse que les femmes participent à ses jeux à lui, indiquant que leur place « consiste à couronner ces messieurs victorieux ».

Mais ça ne lui suffit pas. Dans un monde ou les sportifs sont des hommes, elle en prend l’allure, pour aller les battre sur leur terrain. En 1927 elle s’inscrit au bol d’or automobile, aux côtés de 18 garçons. Elle les devance, tous, au volant de sa BNC (Bollack, Netter & Compagnie). En 24 heures elle parcourt 1 700 km et remporte l’épreuve, avec trois tours d’avance. 

Aux côtés de Joséphine Baker en 1927.
Aux côtés de Joséphine Baker en 1927.

Mais si son palmarès est excessif, sa vie l’est tout autant. Lesbienne assumée, elle s’habille en homme et perd sa licence de pilote pour « port du pantalon ». C’était en 1927, il y a moins d’un siècle.  Deux ans plus tard, elle convoque la presse et se fait opérer pour procéder à l’ablation des deux seins. Elle explique à qui veut l’entendre que c’est plus pratique pour tenir un volant, engoncé dans son baquet. D’autres procès suivront, toujours pour port du pantalon, manière de contourner juridiquement son statut, assumé, d’homosexuelle.

D’autres frasques s'acculeront  encore, comme le meurtre de ce légionnaire, qu’elle abat en 1937, un acte qui sera requalifié en légitime défense. Qu’importe, elle en voudra à ses contemporains, et à son pays, qu’elle accusera « d’être gouverné par des phraseurs, des magouilleurs et des trouillards ». 

Au service de l'occupant

Est-ce que ces ennuis judiciaires, et le fait qu’elle soit déclarée persona non grata dans le sport automobile en particulier et le sport en général expliquent sa dérive ? En tout cas, après un séjour en Allemagne au moment des JO de 1936, elle se rapproche des nazis. Et lorsque les troupes germaniques occupent Paris, elle se met à leur service, en mettant le garage de pièces automobiles qu’elle a fondé, au service de la Luftwaffe. Elle aurait également appartenu à la Gestapo, ce que plusieurs historiens réfutent. En tout cas, le 26 avril 1944, sur une route départementale normande, elle est abattue, au volant de sa Citroën Traction par un commando du groupe de résistants Surcouf. 

Son tombeau et sa condamnation prendront la forme de l'oubli durant plus de 80 ans jusqu’à ce doc de France 5. Car s’il n’est pas question de pardonner ou de récrire une histoire que l’on ne connaît d’ailleurs que de manière parcellaire, on peut néanmoins se plonger dans l’incroyable vie et la toute aussi incroyable carrière d’une sacrée bonne femme.

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