Winnebago : la première fake news de l'histoire du camping-car
C’est une histoire qui circule depuis deux décennies. Celle d'un Américain qui, tout en roulant, se serait levé de son siège pour se préparer un café à bord de son camping-car. Il aurait attaqué la marque Winnebago qui ne l'a pas prévenu qu'il fallait rester au volant, en raflant au passage, 1,75 million de dollars. Sauf que ce n'est qu'une légende urbaine.
L’histoire est trop belle pour être vraie, et pourtant, aujourd’hui encore, elle fait les beaux soirs des bivouacs et des aires de repos ou se réunissent camping-caristes et autres vanlifers qui se la racontent en boucle. Et ils ne sont pas les seuls à s’en nourrir. La presse américaine, des associations de consommateurs et même Courrier international, en 2003, ont plongé, et donné du crédit à cette légende urbaine, jusqu’à ce que, tout de même, quelques journalistes s’en aillent vérifier sa réalité, et n’ont jamais trouvé le moindre document officiel pour l’accréditer.
Une association de consommateurs et des médias embrayent
C’est au début des années 2000 qu’une association de consommateurs américains raconte, dans l’une de ses publications, qu’un brave homme, Merv Grazinski, s’offre, pour son départ à la retraite, un magnifique camping-car Winnebago, une marque qui, comme le frigidaire chez nous, est devenu un nom commun pour désigner toutes les maisons roulantes.
Ravi de son achat, il décide de prendre l’autoroute depuis le concessionnaire local jusque chez lui. Sur la highway, il enclenche le régulateur de vitesse à 70 miles, l’équivalent de 110 km/h, pour rester dans une parfaite légalité. Il fait beau et la route est droite, alors Merv décide de quitter le siège conducteur pour s’en aller se préparer un petit café à l’arrière, dans le coin cuisine prévu à cet effet.
Et ce qui devait arriver arriva. On n’en était pas encore à compter les niveaux d’autonomie 2 ou 3 des véhicules modernes et le Winnebago quitte la route tout naturellement, pour finir sa course dans le fossé. Il est entièrement détruit mais fort heureusement, Merv est indemne. Il ne s’est même pas ébouillanté avec son café.
L’homme est d’ailleurs tellement sain de corps et d’esprit, ou presque, qu’il saisit la justice, qui lui donne raison quelques mois plus tard. Son avocat obtient 1,75 million de dollars de dommages et intérêts de la part de Winnebago fautif de ne pas l’avoir prévenu du danger de se lever en roulant. En plus, ne reculant devant aucun sacrifice, l’entreprise lui offre même un camping-car flambant neuf, en insistant pour qu’il ne quitte pas son siège en conduisant, et surtout, en modifiant tous ses manuels d’utilisation de la machine, pour que de futurs clients n’aient la même idée farfelue que Merv.
Sauf, qu’évidemment, toute cette histoire est entièrement fausse, comme l’a révélée en 2003, le Sarasota Herald Tribune. Trop tard, elle s’est répandue dans le monde entier, jusqu’en France, car les belles histoires ont la vie tenace et, comme le faisait dire John Ford à l’un de ses personnages journaliste de L’homme qui tua Liberty Valence, « quand la légende est plus belle que la vérité, on imprime la légende ». Et l'on pourra toujours continuer à se raconter celle de Merv Grazinski, le soir au bivouac.
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