Ce n'est pas être grand clerc que d'affirmer que notre Etat, dans une conjoncture exsangue, va devoir encore rogner son troupeau fiscalisé et de plus en plus famélique pour atteindre des objectifs budgétaires européanisés. Or, la marge est ténue, ce qu'a bien compris un ministre délégué au budget qui jure ne pas nourrir la moindre intention d'une augmentation d'impôts pour parvenir à ses objectifs.
Alors comment faire ? La Cour des comptes, sous couvert de préoccupation écologique et sanitaire, vient de mettre sur la table la solution : taxer davantage le diesel pour augmenter les recettes. Et les voix s'élèvent au sein du gouvernement pour porter le message à l'unisson. La ministre de l'Écologie, Delphine Batho, a ainsi jugé «incontournable» l'alignement de la fiscalité des deux carburants. Mais plus pour des raisons de «santé publique» que «fiscales», même si, en la circonstance, l'utile se conjuguerait parfaitement avec l'agréable.
Bref, on a du mal à ne pas se persuader que le débat ainsi ouvert par tant d'autorités avec tellement de bonnes raisons sur fond de crise budgétaire n'est pas tout simplement une préparation de nos esprits à ce qui semble inéluctable : la fin de ce qui est aussi qualifié en Europe d'« exception culturelle française » dans un pays où 80% des voitures fonctionnent au diesel. L'écart de taxation entre l'essence (60 centimes d'euro par litre) et le gazole (42 centimes) est certes dans le collimateur depuis que le Centre international de recherche sur le cancer avait classé les gaz d'échappement de diesel cancérogènes, et que leur coût sanitaire annuel avait été estimé entre 20 et 30 milliards d'euros.
Par ailleurs, l'idée de remplir des objectifs environnementaux et d'assumer une transition énergétique poussaient encore un peu plus à la roue d'une fiscalité révisée à la pompe. Une tendance loin d'être anodine pour les constructeurs, les automobilistes, les agriculteurs, les pêcheurs ou les routiers, ce qui avait poussé jusque là nos dirigeants à la grande prudence sur le sujet. Mais ça, c'était avant l'impératif annoncé des 6 milliards d'euros de recettes à trouver pour 2014...
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