L’histoire de la transmission intégrale
La transmission intégrale sur une voiture de tourisme fête ses 21 ans. C’est au Salon de Genève 1980 que trônait, sur le stand de la marque aux quatre Anneaux, un coupé un peu massif, dénommé Audi Quattro. Une bombe. Son intérêt résidait dans son nouveau moteur 5 cylindres à turbocompresseur de 200 chevaux et, surtout, dans sa transmission à 4 roues motrices en permanence. L'idée en était venue quelques années auparavant à des ingénieurs de la marque, qui, comme tous les hivers, procédaient à des essais par grand froid au fin fond de la Scandinavie. Ils avaient remarqué que leurs berlines, pourtant à traction avant, étaient laissées sur place par un 4X4 tout-terrain enclenchable (les 4 roues ne pouvant devenir motrices que sur sol glissant, par intervention manuelle sur les moyeux avant ou par commande électropneumatique sur le tableau de bord), pourtant deux fois moins puissant sur route enneigée ou sur lac gelé.
Une innovation technique
Rapidement, l'objectif des ingénieurs de la marque consista à développer une auto qui conserverait en permanence les 4 roues motrices, autant pour éviter des manipulations au conducteur que pour améliorer davantage l’efficacité de l'auto sur sol sec (en particulier sa motricité en sortie de virage, par rapport à une berline à traction avant, puissante), en plus du bénéfice premier d'une l'adhérence incomparable sur sol glissant. La classique solution de l'arbre de transmission entraîné rigidement et en permanence par l'arrière de l'arbre secondaire de boîte ne pouvait convenir.
En effet, dans cette configuration, les roues avant ne peuvent pas tourner plus vite que celles du train arrière, ce qui provoque en virage, sur sol adhérent, d'importantes contraintes à toute la transmission, avec des pneus qui ripent et s'usent à vitesse grand V. Il fallait trouver le truc. Ce qui fut fait par le bureau d'études d'Ingoldstadt, avec un ingénieux différentiel central à deux pignons planétaires. Une fois supprimés le ripage et les tensions dans la transmission, il ne restait plus qu'à installer des blocages de différentiels (central et arrière) pour réduire le patinage des roues en cas de très faible adhérence. Ainsi, après la méritante tentative de la marque anglaise Jensen, avec son coupé Interceptor FF (pour Formula Ferguson), à la production confidentielle au milieu des années 60, la routière intégrale faisait ses premiers pas vers la grande série, sous le nom d'Audi Quattro.
Certes, ces autos n'ont jamais dépassé en France les 1 ou 2 % des immatriculations, même au début des années 90 où Ford, Lancia, Opel, Peugeot, Porsche et Renault sont venus soutenir l'offre d'Audi, BMW et Subaru. Cependant, elles ont sans doute accéléré l'adoption de solutions techniques semblables sur la majorité des véhicules tout-terrain, il y a environ une douzaine d'années.
Les tout-terrain reprennent à leur compte cette technologie
Alors, justement, si la majorité des tout-terrain actuels possèdent désormais également quatre roues motrices en permanence, pourquoi choisir une berline ou un break ? Primo, pour l'économie de carburant, les tout-terrain étant lourds et pas du tout aérodynamiques. Secundo, pour la sécurité : plus lourds, ils freinent généralement moins bien et, sur terrain glissant, leur inertie entraîne automatiquement des distances de freinage plus longues. À ce propos, si une berline intégrale s'arrête sur une distance plus courte, il ne faut jamais oublier qu'elle ne freinera en aucun cas mieux qu'une deux roues motrices – on a parfois tendance à l'oublier, tant le bon grip à l'accélération inspire confiance. Enfin, avec leur centre de gravité plus haut et dotés de pneumatiques moins directionnels, les engins tout-terrain et autres SUV sont non seulement moins efficaces en conduite rapide, mais également moins maniables et précis, lors d'une manœuvre d'évitement par exemple. Voici donc quelques bonnes raisons pour ne pas succomber à leur mode – et celle-ci est bien réelle, puisqu'ils représentent davantage, en parts de marché, que les berlines, coupés et breaks que nous avons retenus ici.
La contrepartie de cette motricité impériale se situe sur le plan de la consommation. Car elle augmente de 10 % en moyenne avec les "vraies transmission intégrales" ou avec les systèmes semi-permanents de type 4Motion de chez Audi/VW, ou Real Time, de chez Honda. Deux bonnes raisons à cela : le poids de la transmission elle-même (de 55 à 150 kg) et les frottements mécaniques supplémentaires. S'il n'y a pas de doute à avoir à propos de la fiabilité des modèles de la précédente décennie, pour Audi, Porsche ou Subaru, on ne peut se prononcer, en revanche, sur les modèles équipés 4Motion, Volkswagen, ou BMW, trop récents mais a priori sans problème non plus. Restez à l'écart de modèles plus anciens comme Espace, R21 TXI ou Turbo Quadra chez Renault, Peugeot 405 4X4 ou BX 4X4, et chez les étrangères Opel Vectra d'ancienne génération et Calibra Turbo 4X4.
Parmi les absents de nos essais, on note la Mercedes Classe E 4Matic, disponible en V6, 2.8 et 3.2, ou avec le V8 de 4.3 litres de 279 chevaux. Présentée début 1997, en même temps que les V6, cette transmission est bien plus séduisante que celle, semi-permanente, développée douze ans auparavant pour la précédente Classe E. Pourvu d'un différentiel central à trains planétaires doubles avec viscocoupleur, le couple entre l'avant et l'arrière atteint 35/65 % . Cette transmission est aussi bien plus légère (87 kg contre 140), le contrôle de motricité délaissant les classiques différentiels autobloquants au profit de l'ETS, qui intervient à partir de l'analyse en continu de la vitesse respective des 4 roues, comme sur le Classe M. Cette 4Matic fait partie des "bonnes permanentes", agréable à conduire et très sûre, le contrôle de stabilité venant en complément de l'ETS. Bref, on dispose de la ceinture et des bretelles. Malgré tout, elle souffre d'un manque de notoriété, et l'absence de Diesel, par rapport aux Audi Quattro, explique qu'elle se trouve difficilement sur le marché français en occasion.
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