Le nouveau permis de conduire s'est adapté à son époque pour devenir un bilan de compétence, plus qu'un examen couperet où la moindre erreur est éliminatoire. Mais ce permis plus « subjectif » n'est en rien plus facile pour le candidat qui se voit au moins aussi souvent qu'avant refuser son sésame.
La semaine dernière, très vite, le message du gouvernement fut de préciser avec force « qu'accès plus facile » ne signifiait pas « obtention plus facile ». Il n'était pas question pour le secrétaire d'Etat aux Transports Dominique Bussereau de chagriner les associations de Sécurité Routière très sensible sur le sujet, surtout que l'intention première n 'allait pas dans ce sens même si beaucoup voyait là une solution au désengorgement de la filière.
En ce qui concerne le code, si les questions ont été reformulées et renouvelées pour coller à l'époque (citoyenneté et environnement sont des sujets abordés), il faut toujours obtenir au moins 35 bonnes réponses sur 40 questions.
Idem pour le permis qui, si l'examen a changé en profondeur, n'est vraiment pas plus facile. Bien au contraire selon plusieurs moniteurs ayant participé aux opérations test durant 2 mois :
« Les candidats s'attendaient à plus d'indulgence, mais en réalité on en a moins qui réussissent depuis la réforme. Le système de notation peut bien changer, les inspecteurs continueront à sanctionner les erreurs comme ils le souhaitent. Et l'impression que j'ai, c'est qu'ils sanctionnent plus. »
«L'inspecteur pourra toujours mettre les points là où il veut les mettre, donc ça ne change rien. Enfin si, c'est pire. La nouvelle grille est plus complexe, ça n'a aucun sens. On navigue à vue. »
Selon certaines organisations, les premières statistiques montreraient une baisse du taux de réussite de 15 à 30% mais pour l'instant rien d'officiel, juste le constat d'un véritable changement qui demandera certainement un peu de temps avant d'être digéré par le secteur. C'est le constat des syndicats d'inspecteurs qui préfèrent mettre cette tendance à la baisse (qu'ils confirment donc) sur le compte de la nouveauté et de l'ampleur de la réforme :
« Il faut une phase nécessaire d'adaptation. Après chaque réforme c'est pareil, les taux commencent par baisser. »
Ils confirment aussi que l'examen est tout sauf plus facile :
« Mais les candidats qui ont attendu la réforme pour passer le permis en pensant que ça serait plus facile risquent d'être déçus, parce que ça n'est absolument pas le cas. Les erreurs restent sanctionnées et il n'est pas question pour les inspecteurs de "donner" des permis pour gonfler artificiellement les chiffres.»
« Les candidats qui ont attendu la réforme pour passer le permis en pensant que ça serait plus facile risquent d'être déçus »
Le problème est que le gouvernement emporté par son habituel enthousiasme pré-réforme a affirmé vouloir atteindre un taux de réussite de 66% alors que celui-ci n'est aujourd'hui que de 57%. Là est le quiproquo.
Le nouvel examen qui réclame d'obtenir au moins 20 points sur 31 possibles ne permet plus aux candidats moyens de réussir l'épreuve. L'autonomie et la compétence du conducteur étant désormais la règle (sur les 25mn d'examen, l'élève devient autonome durant 5mn. Il doit choisir sa route et effectuer de lui même une manœuvre), les conducteurs « limite » ne faisant pas de fautes grossières n'obtiennent plus les faveurs de l'inspecteur autorisé à juger globalement la conduite de l'examiné. Et qu'on se le dise, les points bonus obtenus en adoptant une éco-conduite ou en étant courtois au volant (faire un geste à un passant pour lui indiquer de traverser par exemple) ne sont pas vraiment supportés par les examinateurs. En effet, le point de courtoisie au volant peut être considéré comme une vaste fumisterie de com' tandis que l'éco-conduite engendre de tels décalages avec ce que doit être une conduite « normale » qu'elle en devient très souvent dangereuse et sanctionnée comme telle.
Cette réforme du permis est pour une fois réellement réformatrice, elle n'est même pas critiquable sur le fond, il y a simplement que les objectifs qui lui étaient assignés n'étaient pas les bons. De meilleurs conducteurs, c'est apparemment le cas, plus de conducteurs, c'est beaucoup moins sûr. Qualité rime rarement avec quantité.
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