Pour la première fois depuis 20 ans, une femme va courir les 24 Heures du Mans ! Cette annonce provoque l’engouement de toute la presse. Seule l’intéressée, Marie-Claude Beaumont, reste indifférente à cette médiatisation. Pour elle, l’épreuve sarthoise ne constitue qu’une étape dans sa carrière, déjà riche de nombreux titres en rallyes…
Cette participation aux 24 Heures du Mans 1971 propulse la jeune pilote française à la une de nombreux magazines. Marie-Claude n’en a cure, même si elle est consciente de faire un métier public : il est hors de question que sa vie privée s’étale dans les journaux ! D’ailleurs, elle éconduit certains journalistes trop pressants : la jeune femme ne manque pas de caractère. Et il en faut un bien trempé pour piloter à 280 km/h sur le circuit du Mans cette Chevrolet Corvette de presque 1 500 kg ! Pour l’aider dans cette épreuve, elle peut faire confiance à son équipier talentueux, Henri dit "Titi" Greder. Marie-Claude le connaît depuis 1965, époque où "Titi" courait en rallyes (trois fois Champion de France) sur une Ford Mustang…
Ouvreuse pour Citroën
Marie-Claude, l’aînée des huit enfants de la famille Charmasson, a toujours baigné dans le milieu du rallye. Son père, qui a participé plusieurs fois au Monte-Carlo (3e en 1953), est concessionnaire Citroën à Gap et chaque hiver, depuis 1960, tout le garage est mobilisé par René Cotton, directeur de l’écurie compétition Citroën, pour assister les pilotes courant sur les voitures de la marque aux chevrons. Marie-Claude fait également partie de "l’assistance-course" du garage et communique aux pilotes leur temps et l’état de la route qu’elle a vérifié auparavant à bord de la Panhard maternelle. A force de la rencontrer, les pilotes de rallye parlent entre eux de la "petite blonde". A la fin du Monte-Carlo 1964, Claudine Bouchet (future Mme Trautmann) lui propose une place de coéquipière pour le rallye des Routes du Nord. Marie-Claude accepte. Sans le savoir, elle vient à 23 ans de mettre le doigt dans l’engrenage de la compétition. Pendant deux saisons, Marie-Claude et Claudine vont faire équipe. Cette période va apporter à la Gapençaise l’expérience de la course, de nombreuses joies et surtout lui permettre de voyager, en France tout d’abord, puis dans toute l’Europe. Elle participe ainsi à des courses exceptionnelles comme le Liège-Sofia-Liège surnommé "l’Enfer yougoslave" : 5 000 km en quatre jours et quatre nuits !
Pilote de rallyes
A la moitié de la saison 1965, Claudine va rejoindre son mari (René Trautmann, champion de France des rallyes 1964) comme coéquipière. Marie-Claude, qui vient de prendre le pseudonyme "Beaumont" pour faire plaisir à son père, est bien décidée à continuer et devient alors coéquipière de "Titi" Greder. Celui-ci lui passe de temps en temps le volant de sa grosse Mustang, ce qui donne à Marie-Claude l’envie de piloter. Les circonstances, en la personne de Pierre Ferry, vont lui offrir cette opportunité. En effet, ce dernier qui fait courir des NSU 1000 en rallyes, lui propose une voiture pour le Critérium des Cévennes. Ainsi, à la fin de 1965, elle se retrouve derrière un volant. Dans les Cévennes, la tempête de neige fait rage et nombreux sont les concurrents qui abandonnent en cours d’épreuve. Or, Marie-Claude tient sur la route, son expérience de la conduite sur neige acquise du temps où elle jouait l’ouvreuse pour Citroën lui profitant pleinement. Ainsi, elle se joue des pièges, passe la ligne d’arrivée… et gagne un volant d’usine pour les trois saisons suivantes !
Sa première année chez NSU se passe comme dans un rêve puisqu’elle termine les quinze rallyes auxquels elle participe. C’est une conductrice très sûre, qui à un sens inné de la trajectoire. Elle le prouve en accumulant les coupes des Dames (elle en obtiendra plus de 60 durant toute sa carrière) et les victoires de groupe. En 1967, elle s’essaye même au circuit et participe aux 24 Heures de Spa avec Christine Beckers. Des trombes de pluie s’abattent sur le circuit tandis que des nappes de brouillard rendent la course pénible. Mais les deux femmes remportent la victoire en tourisme de série (Gr.1) et la coupe des Dames. L’année suivante, Marie-Claude réalise un autre exploit en terminant à la 10e place "scratch" du Tour de Corse. Mais malgré tout, elle ne s’estime pas satisfaite (Greder la surnomme "la jamais contente") : le manque de puissance des petites NSU commence à lui peser et le titre féminin ne lui suffit plus. Il lui faut se battre pour la victoire "scratch" ! Et puis, Gérard Larrousse et Guy Chasseuil sont également pilotes d’usine et quand la voiture de Larrousse n’est pas prête, ils empruntent celle de Marie-Claude qui n’apprécie pas du tout. Voulant piloter des GT, voire des prototypes, elle se confie à Greder.
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