Peugeot, conscient de l'enjeu, fait un gros effort et lance un vaste programme d'essais d'endurance sur le circuit Paul Ricard. Après six séances de simulation de 24 heures, la 905 a surmonté ses problèmes de fiabilité et dépassé les 5000 km sans problème. Spécifiquement préparées pour Le Mans (régime moteur réduit de 1000 t/mn, boîte renforcée, aileron avant supprimé), les trois 905 doivent faire face à une puissante Armada Toyota forte de cinq voitures et à deux Mazda étroitement dérivées de la Jaguar XJR 14, Championne du monde 1991. Dès les essais, les Peugeot affichent leurs ambitions. Philippe Alliot explose tous les records établis en signant la pole à plus de 243 km/h. Dalmas le rejoint en première ligne, alors que la troisième 905 réalise le 6e temps derrière un trio de Toyota. La pluie s'est invitée et au départ, les deux Peugeot respectent les consignes de prudence et conservent leurs positions. Sur une piste détrempée, la Mazda de Weidler se montre très offensive et passe en tête, mais dès le 24e tour, la Peugeot n° 1 de Dalmas-Warwick-Blundell prend le commandement. Elle ne le quittera plus. Retardée d'abord par des soucis de boîte, la n° 2 d'Alliot-Baldi-Jabouille s'empare de la seconde place à partir de 21 heures, alors que la troisième Peugeot navigue assez loin après un accrochage en début de course. Au matin, sur une piste qui s'assèche enfin, l'équipe Peugeot connaît des moments difficiles : Alliot est sorti de la piste à deux reprises et se retrouve 5e à six tours et peu après, la 905 de Ferté-Wendlinger-Van de Poele qui a effectué une belle remontée pendant la nuit, doit renoncer (moteur cassé).
Enfin, l'inquiétude est à son comble, quand la voiture de tête doit elle aussi observer un arrêt au stand pour remplacer toute une batterie de boîtiers électroniques. Warwick repart et rassure tout le monde en adoptant immédiatement une cadence soutenue. Si la n° 1 connaît une fin de course sans histoire, la n° 2 perd à nouveau trois tours sur des ennuis de boîte et devra se contenter de la médaille de bronze derrière la Toyota de Sekiya-Raphanel-Acheson. Vainqueur au Mans, Peugeot s'impose ensuite dans les trois dernières épreuves du Championnat et enlève un titre mondial, hélas, guère significatif. Moribond, le Championnat disparaît est enterré en 1993 et Le Mans demeure la seule épreuve d'endurance européenne au calendrier. Dans ce contexte pourtant peu favorable, Peugeot décide de remettre son titre en jeu face à Toyota, avide de revanche et n'hésite pas à apporter des innovations à ses 905. Outre un surcroît de puissance pour le V10, le montage d'une boîte de vitesses transversale à commande séquentielle s'impose comme la grande nouveauté. Après une longue série de tests d'endurance au Castellet, l'équipe aligne à nouveau trois 905 dont une pour les "jeunes" Christophe Bouchut et Eric Hélary (issus de la filière 905 spider) associé à l'expérimenté Geoff Brabham (fils aîné du triple Champion du monde de F1) détenteur de quatre consécutifs en IMSA. Aux essais, Alliot signe une nouvelle fois la pole, mais un accident au Virage Porsche l'empêche d'améliorer un temps plus modeste qu'en 1992. Il devance la Toyota d'Irvine, alors que les deux autres 905 sont en 3e (Dalmas) et 6e position (Brabham).
Dès le départ, Alliot s'échappe, mais Irvine se montre très rapide et prend la tête jusqu'aux premiers ravitaillements. Pendant deux heures les deux Peugeot d'Alliot et Dalmas et les deux Toyota d'Irvine et Lammers ne seront séparées que par une poignée de secondes. Peu avant 20 heures, la Peugeot n° 2 perd 34 minutes à la suite d'une spectaculaire fuite d'huile et si la n° 1 résiste aux assauts des Toyota, Jean Todt décide de lui apporter du soutien en faisant remonter la n° 3 vers la tête. A 23 heures, les deux 905 sont au commandement et creusent peu à peu l'écart sur leurs rivales japonaises, menées par Irvine. Peu avant 4 heures du matin, la course bascule, lorsque la voiture de Dalmas-Boutsen-Fabi connaît des soucis de transmission. La n° 3 assure le relais au commandement, alors que la n° 2 tournant à un rythme élevé est remontée à la 4e place. Irvine déchaîné bat à six reprises le record du tour, mais il est t toujours 3e à trois tours de la Peugeot n° 1 qui a repris la tête peu après 7 heures. Cette dernière ne va profiter longtemps de sa position : un collecteur d'échappement desserré lui fait perdre un tour et Bouchut-Hélary-Brabham s'installent définitivement au commandement à 9 heures du matin. De leur côté, Alliot-Baldi-Jabouille remontent toujours et lorsque la Toyota d'Irvine perd beaucoup de temps sur des problèmes d'embrayage, elle s'empare de la troisième place. A 13 heures, les trois Peugeot occupent les trois premières places et, hormis une portière envolée sur la n° 2, plus rien ne viendra troubler leur fin de course. Peugeot réalise un superbe triplé et les voitures passent la ligne un peu à la façon des Ford en 1966.
Championne du monde et maintenant doublement victorieuse des 24 Heures du Mans, la 905 ne pouvait pas rêver de plus beaux adieux à la course.
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