C'est quasi confirmé : les prix des péages autoroutiers augmenteront une nouvelle fois plus vite que l'inflation, pourtant quasi nulle (évaluée à 0,06 % seulement). Selon le barème des hausses moyennes, révélé ce mardi matin dans Les Échos et présenté la semaine dernière par l'administration au comité des usagers des autoroutes, les revalorisations à prévoir iront carrément jusqu'à 1,63 % chez ASF.
Selon ce tableau prévisionnel, que Caradisiac s'est également procuré (cf. ci-dessous), la hausse moyenne des tarifs, qui rentreront en vigueur au 1er février prochain, dépassera ainsi 1 % sur les réseaux des sociétés privées d'autoroutes (ASF, Escota et Cofiroute du groupe Vinci, APRR et Area du groupe Eiffage, puis Sanef et SAPN du groupe espagnol Abertis). Quand les réseaux 100 % publics que sont l'ATMB et la SFTRF, qui gèrent notamment les tunnels du Mont-Blanc et du Fréjus, devraient se limiter à suivre l'inflation (+ 0,06 %).
Hausse maximale autorisée en 2016 | |
Société d'autoroutes | Hausse moyenne sur les tarifs classe 1* |
APRR | 1,23 % |
AREA | 1,27 % |
ASF | 1,63 % |
COFIROUTE | 0,82 % |
ESCOTA | 1,18 % |
SANEF | 0,86 % |
SAPN | 0,86 % |
ATMB | 0,06 % |
SFTRF | 0,06 % |
*Classe 1 correspondant aux prix applicables aux véhicules de tourisme |
Mais attention, contrairement aux autres sociétés dites historiques, dont les tarifs des péages ont été gelés par le gouvernement en février dernier, ceux de l'ATMB et de la SFTRF ont bel et bien été revus à la hausse cette année. Officiellement, l'ATMB s'est limité à une hausse moyenne équivalente à l'inflation, alors estimée il y a un an à 0,38 %. Tout dépend pour autant des tronçons. Car, selon notre calculette, sur l'autoroute A40 et sous le tunnel du Mont-Blanc, la hausse moyenne a carrément atteint les 2,17 % pour les véhicules de tourisme ! Et pour ce qui est de la SFTRF, la hausse moyenne des prix s'est établie à 1,79 % cette année, selon les autorités elles-mêmes. C'est dire combien l'État ne s'est pas gêné...
Quant aux prochaines revalorisations, attendues pour le 1er février 2016, elles n'ont rien d'une surprise, contrairement à ce que pourraient laisser croire les déclarations de la ministre de l'Écologie interrogée sur le sujet au micro de RTL ce matin. « Je ne suis pas au courant », a ainsi répondu Ségolène Royal, en précisant même qu'une telle progression était « exclue », puisque « l'engagement qui avait été pris était de ne pas dépasser l'inflation et même d'être en dessous compte tenu du pactole que les compagnies autoroutières avaient déjà accumulées dans le passé ». Sauf que ce n'est pas vraiment cela qui a été négocié...
Ce qui a été convenu, c'est notamment que le gel des tarifs de cette année, décrété de manière unilatérale – et pour des raisons a priori électoralistes – par le gouvernement, ne soit pas compensé dès l'an prochain. Car, en effet, ce gel sera forcément rattrapé, a-t-on compris depuis, à l'euro près par les sociétés d'autoroutes... Et c'est à compter de 2019, jusqu'à 2023, que cette compensation interviendra, ce qui représentera une hausse annuelle pouvant aller jusqu'à 0,4 %, en plus des revalorisations tarifaires disons « normales ».
Alors pourquoi en 2016, les tarifs des péages augmenteraient déjà plus vite que l'inflation ? Principalement, parce qu'il s'agit de faire supporter une autre compensation ! Celle qui vient d'une hausse d'impôt, soit celle de la redevance domaniale décidée il y a un peu plus de deux ans. Sujet déjà de querelles entre le gouvernement et les sociétés concessionnaires d'autoroutes (SCA).
Cette redevance domaniale correspond alors au « loyer » que les SCA, entre autres, paient à l'État pour l'occupation du domaine public. Or, en vertu des contrats de concession ultra-avantageux aux SCA, toute hausse de la fiscalité peut être compensée par ces dernières, autrement dit répercutée dans les hausses tarifaires annuelles aux péages... Une répercussion qui représentera en l'occurrence une hausse pouvant aller jusqu'à « 0,8 % » durant trois ans, « entre 2016 et 2018 », avait reconnu Alain Vidalies, le secrétaire d'État aux Transports devant l'Assemblée nationale au printemps dernier. Difficile ainsi d'imaginer que Madame Royal n'était pas, de son côté, au courant !
En outre, le document présenté au comité des usagers des autoroutes la semaine dernière reprend certes les hausses calculées par les sociétés autoroutières, mais il n'en reste pas moins un document concocté en interne par les services du ministère de l'Écologie, soit ceux précisément de la ministre Ségolène Royal. Or, page 8 de ce document (reproduit ci-dessus), le « Rappel du contexte » est on ne peut plus clair : l'accord trouvé entre le gouvernement et les sociétés d'autoroutes il y a quelques mois ne stipule aucunement que les tarifs ne pourraient « plus dépasser l'inflation », malheureusement pour les usagers.
Surtout, le document conclut que les tarifs présentés « tiennent compte » de ces négociations... Et donc qu'ils les respectent. Espérons dès lors que le gouvernement s'abstienne d'imposer un deuxième gel consécutif des tarifs pour calmer la grogne des usagers ! Car, pour finir, ce sera bien de toute façon à eux qu'il incombera de payer, en plus de tous les reports, hausses d'impôts et autres augmentations annuelles !
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