Aujourd’hui, c’est à Sainte-Julie, dans l’Ain, que Nicolas Sarkozy a prévu, une nouvelle fois, de défendre le plan pour l’automobile français. Celui-ci fait, encore et toujours l’objet de rudes critiques dans la communauté européenne, taxant, hier encore mais sans citer directement la France, de "protectionniste" ces aides aux entreprises du secteur en échange d’engagements de ne pas licencier ni de délocaliser.
Alors qu’elle est en train d’examiner de près les plans nationaux déposés par l’Allemagne, l’Espagne, la France, l’Italie, le Royaume-Uni et la Suède, sur lesquels elle devrait s’exprimer d’ici deux semaines, la Commission Européenne a une nouvelle fois évoqué hier le spectre du protectionnisme et du "nationalisme économique". Selon Günter Verheugen, son commissaire à l'Industrie, "soutenir le protectionnisme serait la grande plus erreur qu'on puisse faire", tout en poursuivant "nous avons pris la décision de créer un marché unique, ce n'est pas un marché unique simplement pour les ventes de voitures mais aussi pour la production". Critiquant l’ordre dispersé dans lequel agissent les pays de l’Union Européenne, il a rappelé que "l'industrie automobile est européenne, aucune entreprise ne produit dans un seul pays. […]Il ne faut pas que ceux qui peuvent prendre des mesures les prennent et que les autres se débrouillent". Appuyé par Neelie Kroe, la commissaire européenne chargée de la concurrence, ils ont rappelé en chœur que l’éventail de mesures était suffisamment large pour ne pas tomber sur cet écueil, des primes à la casse aux facilités de financement en pensant par le soutien économique de l’innovation dans les technologies vertes.
De son côté, les arguments du président de la république restent les mêmes : le plan français a été lancé parce que l’Europe a mis trop de temps à réagir, et a permis d’empêcher des fermetures d’usines dans d’autres pays européens et pas que sur le seul territoire français. Ce qui laisse une question en suspens : que fait la Commission Européenne pour l’industrie automobile de façon concrète ?
Son aide est avant tout financière, puisque elle a soumis le projet d’un crédit de 4 milliards d’euros à la Banque Européenne d’Investissement pour le secteur automobile, en en demandant 7 autres milliards par la suite. "Ce n’est pas suffisant" selon l’Association européenne des producteurs automobiles, l’ACEA, qui demande surtout un allégement bureaucratique afin raccourcir le temps de mise en place désespérément long des procédures et de donner la priorité des efforts sur l’accès au crédit qui est fortement limité en temps de crise, mais qui est pourtant vital pour entamer une reprise au plus vite.
Mais la Commission Européenne a aussi les Etats-Unis dans son collimateur, voyant d’un mauvais œil les promesses de Barack Obama faites mardi aux constructeurs américains de les défendre jusqu’au bout, ce qui pourrait laisser penser qu’il validerait la rallonge des aides financières de 16,6 et de 5 milliards de dollars que demandent respectivement General Motors et Chrysler. Günter Verheugen aimeraient que ces soutiens "respectent les règles internationales de la concurrence", tout en semblant plutôt pessimiste face à une issue heureuse pour le secteur automobile américain : "le risque de faillite de deux, voire trois gros constructeurs américains se précise chaque jour". Mais faillite ou pas, il tient à ce que tout soit fait dans les règles : "Nous n'avons aucun intérêt à ce que l'industrie américaine s'effondre, mais les aides doivent correspondre aux règles de la concurrence internationale et nous n'hésiterons pas à prendre des mesures si elles ne sont pas respectées."
Toutes ces tensions laissent penser que le sommet européen extraordinaire, qui aura lieu le 1er mars à Bruxelles et où les Etats-Unis ont été cordialement invités à s'exprimer, devrait être une véritable cocotte-minute dont les conclusions seront décisives pour l’avenir, pour l’industrie automobile non seulement européenne, qui emploie 12 millions de personnes, mais aussi mondiale.
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