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La disparition de Raymond Levy

Disparu à l’âge de 91 ans, Raymond Lévy a joué un rôle déterminant dans les grandes mutations de Renault dont il fut le président de 1986 à 1992. Notamment dans le secteur du design. 

La disparition de Raymond Levy

Raymond Haïm Lévy est arrivé à la tête de la Régie Renault dans un contexte tragique. Au soir du 17 novembre 1986, Georges Besse, président de Renault, est abattu devant son domicile parisien. L’assassinat est revendiqué par Action Directe, mouvement extrémiste qui s’inscrit dans un terrorisme international représenté par les Brigades rouges en Italie et la bande à Baader en Allemagne.

Pour Renault, les années 1980 ont été pavées de déconvenues. Après une période de prospérité sous la gestion de Bernard Vernier-Palliez (1975-1981), la situation s’est dégradée pendant le mandat de son successeur, Bernard Hanon (1981-1985).

Georges Besse a été appelé pour redresser une conjoncture financière devenue alarmante avec un chiffre d’affaires en chute libre, des pertes abyssales et un endettement vertigineux. Il instaura une politique d’austérité draconienne, mais n’eut pas le temps de mener à bien son œuvre.

Raymond Lévy, le successeur

En décembre 1986, Raymond Haïm Lévy succède à Georges Besse et applique son plan d’assainissement. Né le 28 juin 1927 à Paris, Raymond Lévy a fait ses études au lycée Jacques-Decour, puis à l'École polytechnique et à l’École des Mines.

Il a débuté sa carrière aux houillères du bassin du Nord-Pas-de-Calais, puis la poursuivit dans l’industrie pétrolière, chez Elf-Aquitaine (1976), et la sidérurgie, chez Usinor (1982) et Cockerill Sambre (1984).

L’une des premières mesures prises par Raymond Lévy consiste à désengager Renault du marché américain en cédant à Chrysler les parts détenues par l’entreprise française chez American Motors, ce qui inclue le profitable label Jeep.

Ce que l’on sait moins, c’est que Raymond Lévy va donner une impulsion décisive dans la modernisation de l’image de Renault. Durant les cinq années de son mandat, il s’investit en faveur de la qualité totale, prépare l'entreprise à son retour dans le secteur privé et donne un statut inédit à la création.

La disparition de Raymond Levy

En octobre 1987, Raymond Lévy engage Patrick le Quément qui symbolise le changement d’ère et de mentalité. D’emblée, la compréhension s’est installée entre les deux hommes. « Vif, cinglant, caustique, le petit homme fait trembler toute l’entreprise, mais je le perçoit comme un pince-sans-rire », se souvient Patrick le Quément. "Raymond Lévy reconnaît qu’il n’entend rien au design ; enfin presque : lors d’une entrevue dans sa maison de Vaucresson, il me signale fièrement qu’il a acheté une balayette futuriste à la Foire de Paris… " . Au-delà de son apparence austère, Raymond Lévy manie le second degré avec délice.

La confiance dans le design

C’est un homme ouvert. Il accepte que le style ne soit plus subordonné à l’ingénierie, qu’elle soit directement rattachée à la direction générale. Il accorde une confiance totale à Patrick le Quément et adhère à son projet de transformer la désignation du style. "Toutefois, il rechigne à lui octroyer un patronyme à consonance anglo-saxonne ; alors, il décide d’y adjoindre le qualificatif industriel ". En remplaçant sa Direction du Style par une Direction du Design industriel, Renault bascule dans une ère nouvelle.

Raymond Lévy interdit à qui que soit de s’exprimer sur le design avant le responsable du… design. Ce qui permet aux designers d’imposer des concepts dérangeants, contestés par les membres du produit et du marketing les plus conservateurs. C’est le cas de la future Twingo. Patrick le Quément explique que cette voiture atypique "doit se percevoir comme un animal familier que l’on a envie de prendre sous le bras pour le poser devant la cheminée !" Métaphore osée pour un polytechnicien que l’on devine rationaliste. Mais Raymond Lévy, usant de son humour à froid, comprend et acquiesce. Il soutiendra le projet jusqu’au bout.

Quand on lui soumet le nuancier qui ne comprend que quatre coloris, Raymond Lévy émet une réserve sur le bleu, qu’il perçoit comme un violet, la couleur du deuil dans la religion juive. Pour surmonter cette gêne et rendre acceptable le coloris sans en changer la tonalité, il suffira de le rebaptiser bleu outremer…

En mars 1990, quand la direction générale présente au conseil d’administration les résultats financiers du groupe pour l’exercice 1989, le ton est à l’optimisme : stabilité du bénéfice, progression du chiffre d’affaires, augmentation des investissements, désendettement… Raymond Lévy a gagné la partie engagée par Georges Besse.

En mai 1992, il passe le relais à Louis Schweitzer.

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