Les volants carrés ? Ce n'est pas nouveau !
Peugeot a révélé récemment que dès 2026, ses modèles s’équiperaient d’un volant rectangulaire, suscitant une levée de boucliers. Mais qui a dit qu’un volant devait être rond ? D’ailleurs, il ne l’a pas toujours été, loin de là.
Savoir qui, entre les Français et les Allemands, a inventé l’automobile relève du casse-tête. Si le premier véhicule à être mu sans intervention extérieure demeure le fardier de Cugnot (1769), d’autres considèrent que la Benz Patentwagen de 1886, dotée d’un moteur à combustion interne est la première vraie voiture. Mais aucun de ces engins ne disposait de volant : on utilisait pour les diriger des leviers verticaux, longitudinaux (surnommés "queues de vache") ou transversaux. Pas très aisé !
Il faut attendre une dizaine d’années, 1894 exactement, pour que quelqu’un se dise, « tiens, un truc rond pour diriger mon automobile, ça sera plus pratique. » Celui qui imagine ça, c’est le français Alfred Vacheron. Lors de la première vraie course automobile, tenue entre Paris et Rouen le 22 juillet 1894, il installe un volant sur sa monture, qui n’est pas une Benz mais une Panhard&Levassor.
Il ne gagnera pas finissant 4e, un bon score qui ne convaincra toutefois pas le constructeur d’adopter son invention. Une erreur funeste car Emile Levassor mourra des suites d’un accident qu’il a eu en course en 1897 faute d’avoir pu manœuvrer sa voiture correctement. Dès 1898, toutes les Panhard ont un volant de direction. Une innovation majeure qui va ensuite se répandre comme une traînée de poudre dans l’industrie automobile tant elle est ergonomique.
Un volant circulaire, faut-il le préciser, car dès les années 20, un constructeur va introduire une idée qui ne fera florès que bien plus tard. Voisin dote en effet sa C6 Laboratoire d’un volant à double méplat, mais il ne s’agit que d’un prototype.
Quelques décennies plus tard, aux Etats-Unis, dans les années 50, on vit une ère où l'aéronautique effectue des progrès fulgurants et par son influence donne des ailes au design automobile. Tout est alors bon pour se distinguer. Ainsi, fin 1959, Plymouth pousse le bouchon plus loin que les autres constructeurs en installant un volant non plus rond mais pratiquement rectangulaire dans sa Fury modèle 1960, accessoire que l’on retrouvera en 1960 dans l’Imperial Crown et en 1963 dans la Chrysler 300, les trois modèles étant fabriqués par le même groupe. Ce ne sera pas un succès mémorable : dès 1964, le groupe y renonce, sans avoir été copié.
En 1970, c’est au tour de la mythique Citroën SM de renoncer au volant rond, le sien étant ovale… et monobranche. Mais, là encore, ça n'inspirera personne. Toutefois, en 1973, l’Austin Allegro revient, pour sa part, au volant rectangulaire, un peu comme chez Plymouth, qu’elle dénomme Quartic. Vraiment peu apprécié, il ne durera que deux ans et disparaîtra en 1975... comme la SM !
Par la suite, les volants resteront désespérément circulaires, au grand dam des adeptes de l'innovation gratuite. Mais ceux-ci reprendront espoir grâce la série K2000, ou Michael Knight se retrouve à bord d'une Pontiac Firebird remplaçant son volant rond par une commande type aviation. On ne le sait pas, mais cette voiture de télévision sera visionnaire à plus d'un titre, avec sa synthèse vocale, ses écrans, sa conduite autonome et son intelligence artificielle !
Par ailleurs, la Formule 1, à la fin des années 80, se met à son tour à utiliser des volants applatis sur le bas pour des questions de place pour les pilotes. Mieux, en 1999, la McLaren MP4/14 adopte un volant totalement étrange, dépourvu de jante sur ses parties supérieures et inférieures, tout en intégrant des dizaines de fonctions. Mieux que celui de K2000 !
D’ailleurs, en Formule 1, tous les constructeurs recoureront à ce genre de commande, pour des raisons purement fonctionnelles. Néanmoins, on commencera à voir revenir des volants inspirés de la catégorie-reine sur des modèles de route en 2002 avec la Ferrari Enzo. La partie haute de son volant est, en effet, aplatie. Un détail qui, à son tour, va se répandre, d’abord chez Audi, avant que presque tous les constructeurs n’y viennent. Non pas parce que c'est pratique, mais parce que ça fait technlogique, voire sport.
Avec la Model S Plaid, Tesla franchit une barrière en 2021 en introduisant le Yoke en grande série, une sorte de demi-volant carré sans partie supérieure (on en avait déjà vu un en 2020 sur la très exclusive Aston Martin Victor), qui ne fait pas que des émules.
Et en 2024, voilà-t-y pas que Peugeot y va de son annonce. La marque va utiliser un volant bien plus rectangulaire que les autres : dénommé Hypersquare, cet accessoire sera désormais carré et disponible dès 2026. L’ergonomie ? Mais qui s’en soucie ? Dans un monde toujours plus infantilisé, il n'est pas étonnant que l'automobile s'apparente sans cesse davantage à un jouet géant, où des gadgets plus ou moins ridicules prennent le pas sur les fonctions essentielles. Désormais, les jeux vidéos, extrêmement présents depuis une vingtaine d'années, ont une influence directe sur la conception de nos voitures, étrange inversion de valeurs...
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