La barre fatidique des 100 $ pour un baril de pétrole va être prochainement atteinte. Conséquence, les tarifs des carburants à la pompe n’arrêtent pas de grimper et ce sont les automobilistes qui trinquent. Alors à qui profite cette situation ? La hausse va-t-elle bientôt prendre fin. Réponses avec François Lescaroux, économiste à l’IFP (Institut Français du Pétrole)
Tout le monde a constaté que les prix des carburants s'envolent. Aujourd’hui, le prix moyen du gazole est de 1,15 € contre 1,33 € pour le SP98 alors qu’il était de 1,01 € pour le gazole et de 1,20 € pour le SP98, soit une augmentation moyenne de 13,4%. Pire, cette inflation ne cesse de s’accroître jour après jour. Bizarrement, le gouvernement ne réagit que très peu alors que le pouvoir d’achat semblait être l’une des priorités du candidat Sarkozy. Les récentes déclarations des ministres concernés sont même à la limite de la provocation. Christine Lagarde, la ministre de l’économie a ainsi encouragé les automobilistes « à prendre leur bicyclette et à modifier leur comportement en roulant moins vite ou en optant pour la marche et le covoiturage afin d'atténuer la facture énergétique ». Facile à dire mais quand on sait que les carburants sont taxés à 74% pour l’essence et 67% pour le gasoil, on aurait espéré un geste de la part du gouvernement. Un espoir très rapidement parti en fumée avec la déclaration d’Eric Woerth, ministre du budget qui a indiqué « On ne peut pas les baisser. C’est une partie des recettes de l’Etat. La TIPP représente 6 à 7% des recettes de l’Etat. Il faut s’habituer à payer un pétrole cher. »
Des affirmations qui risquent bien de mettre le feu aux poudres dans un contexte social relativement tendu.
Qui profite de cette situation ?
En premier : l’Etat. La TIPP est devenue une manne financière indispensable pour notre pays qui a besoin de cet argent pour essayer de boucler son budget. Baisser le prix des carburants de quelques centimes reviendrait à perdre des millions d’euros.
En second : les compagnies pétrolières qui voient leurs chiffres d’affaire croître. Petit bémol, avec la situation actuelle, leurs cours en bourse ne suivent plus. Les compagnies parapétrolières qui conçoivent par exemple les plates-formes ou installent les pipe-lines sont celles qui y gagnent actuellement le plus. Pour essayer de réduire le malaise qui est en train de naître l'UFC-Que Choisir suggère aux pétroliers de partager leurs profits en multipliant les capacités de raffinage pour diminuer les prix à la pompe.
En troisième : Les pays producteurs qu’ils fassent partie ou non de l’OPEP. Ces derniers profitent de l’aubaine pour renégocier leurs contrats à la hausse avec les principales compagnies pétrolières.
Cette augmentation va t-elle durer ?
Depuis quelques années, les variations du prix du pétrole pourraient être comparées au mouvement d'une balle rebondissant dans un ascenseur qui monte : il y a une tendance de fond à la hausse, avec en plus le risque de fortes fluctuations.
L'accroissement de la production de brut devrait demeurer la principale contrainte pesant sur les prix. Pour des raisons tant géologiques que politiques, les compagnies internationales ont de plus en plus de mal à augmenter leur offre et sont obligées de se tourner vers des gisements toujours plus techniques (offshore très profond, pétroles technologiques, etc.), donc toujours plus coûteux. En revanche, les besoins en énergie continuent de se développer dans les pays émergents où l'élévation du niveau de vie permet aux classes moyennes de s'équiper en automobile ou en électroménager.
A l'horizon des prochaines années, il n'y a donc aucune raison d'espérer que la tendance haussière ne s'inverse. On est un peu dans la même situation que lors du premier choc pétrolier en 1973.
Quelles sont les raisons d’une telle hausse des prix à la pompe ?
Il y a deux choses qui peuvent expliquer cette croissance ininterrompue des tarifs :
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Contexte monétaire : plus le dollar continu à se déprécier, plus le prix du baril monte car le carburant est moins cher pour les pays non américains (Chine, Inde, Asie et Europe). Donc la consommation s'élève, ce qui a des répercutions sur les coûts.
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Contexte géopolitique. Toutes les incertitudes politiques, économiques et sociales des pays producteurs entrainent des augmentations du baril. Actuellement, c’est le nord de l’Irak et bien sûr l’Iran qui inquiètent.
Jusqu’où les prix peuvent-ils monter ?
Difficile à dire. Auparavant, on parlait de la barre mythique des 100 $. On est y presque. A l’heure actuelle, on ne peut pas prévoir…On peut donc s’attendre au pire…
Des solutions ?
A courte échéance non.
Réduire les taxes ne serait qu’un placebo passager qui pourrait aboutir à l’effet inverse souhaité c’est à dire à une nouvelle flambée des prix. Les automobilistes vont devoir s’habituer à vivre avec des prix aussi élevés. Il faut donc se montrer particulièrement vigilant à la consommation lors d’un achat de véhicule et l’utiliser avec parcimonie.
Seul point positif, cette situation risque d’accélérer la mise au point de solutions alternatives au pétrole, mais celles-ci dépendent également du bon vouloir des différents gouvernements.
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