Quand le gouvernement se prend pour Météo France...

Il faut nous rendre à l'évidence, si les gouvernements de notre beau pays peinent à nous protéger des dangers réels qui nous menacent tous (chômage, désindustrialisation, délocalisations, cambriolages, agressions … etc.), ils sont devenus nos anges gardiens de la route, les St-Christophe que nous n'accrochons plus au tableau de bord de nos voitures. C'est tout du moins ce qu'ils essaient d'être, parfois jusqu'à en devenir ridicule.

En effet, alors que la neige – annoncée – est effectivement tombée en masse hier sur une grande partie Nord du pays provoquant son cortège habituel de difficultés en tout genre, c'est désormais l'apparition du verglas (oh mince comment est-ce possible) qui va retarder le retour à la normale des conditions de circulation. Nous passerons sur le terme de « retour à la normale » alors que nous sommes encore en hiver et qu'il n'y a rien de plus normal que la neige durant cette période, nous passerons aussi sur les personnes bloquées sur l'autoroute gueulant leur indignation de ne pas avoir eu droit à un café (feu Hessel n'a pas fait que du bien) pour nous attarder sur un événement étonnant.

Ce matin, alors que Météo France, sur la foi des indications de leurs puissants ordinateurs (les plus puissants du pays), levait les alertes et la vigilance orange, Manuel Valls, ci-devant Ministre de l'intérieur et Jean-Marc Ayrault, Premier ministre, décidaient en commun et en direct de la « cellule de crise » (et devant les caméras) qu'il fallait absolument réactiver cette vigilance orange, désavouant ainsi les ingénieurs de Météo France invités à aller jouer au Solitaire sur leurs puissantes machines.

De la même façon que l'on nous explique avec force démagogie que la répression routière à outrance (avez-vous noté cette recrudescence actuellement ?) est une mesure de sécurité pour le bien de la nation, le gouvernement s'érige sans rougir en maître du (beau) temps. Bref, quand le gouvernement en arrive à se substituer à Météo France pour donner l'impression qu'il est actif, n'est-ce pas finalement l'aveu d'impuissance ultime ?

Lui demande-t-on réellement ça ? Les efforts de nos élites pour s'exprimer dans des domaines finalement secondaires (oui, la Sécurité Routière n'est plus un domaine prioritaire depuis longtemps, pas plus que la gestion d'une « crise » hivernale qui n'en est pas une) deviennent pathétiques au point qu'on se demande si le stade suivant ne nous montrera pas un ministre d'État au volant d'un chasse-neige pour aller sauver les citoyens en danger. Le domaine de compétences des gouvernements nationaux se résume-t-il à ça désormais ?

Il faut dire que pour combattre les vraies menaces qui nous guettent, décréter une vigilance orange ou rouge ne suffit pas. Et ce ne sont pas une sableuse ou un radar mobile qui serviront à grand-chose non plus. Quant aux automobilistes en panique, rappelons que dans notre pays qui bénéficie d'une vraie variété de climats et dans lequel il est difficile de prononcer une obligation générale de passer des pneus hiver sans faire sourire la moitié sud, une paire de chaînes dans le coffre peut parfois être utile. Et de ce point de vue, le Nordiste et le Parisien ne semblent pas plus évolués que le Marseillais.