Airbags Takata : une énorme enquête dresse la chronologie de l'affaire et souligne les retards à l'allumage
L'INFO DU JOUR - L'affaire des airbags défectueux n'en finit plus de faire des remous. Documents à l'appui, la cellule investigation de Radio France révèle que PSA, aujourd'hui Stellantis, était parfaitement informé de la situation, et n’a réagi que fort tard.
C’est un gros pansement au parfum de scandale dont Stellantis ne parvient pas à se débarrasser. Alors que la campagne de rappel touche à sa fin, comme le patron de Citroën Thierry Koskas nous le confiait lors du dernier Mondial de l’auto, l’affaire des airbags Takata prend une nouvelle tournure par le biais d’une énorme enquête de la cellule investigation de Radio France révélée ce 8 janvier.
Pendant des mois, Anne-Laure Barral et son équipe ont remonté la piste des coussins Takata défectueux et en a établi un bilan : au moins quinze conducteurs français ont trouvé la mort en raison d’explosions de leurs airbags. La plupart de ces décès se sont produits dans les territoires d’outre-mer, ou, selon les diverses enquêtes en cours, les mécanismes souffriraient plus de la corrosion qu’en métropole.
Onze ans sans réagir
Ce problème est connu depuis plus de 11 ans, depuis 2013 ou Honda, suivi de Toyota en 2015, ont changé les coussins de certains de leurs modèles. Dans les années qui suivent, toutes les marques clientes de Takata procèdent au plus grand rappel de l’histoire de l’automobile.
Mais pas Citroën. Alors qu’un document interne, que la journaliste a pu se procurer, atteste que les Chevrons étaient au courant du problème dès 2016. Pourquoi cette inaction à l’époque ? Il n'était pas dans l'entreprise à l'époque, mais Stéphane Cesareo est aujourd’hui directeur de la communication de la marque. Il évoque le contexte industriel, précisant « qu’on ne peut pas arrêter une chaîne et mettre les ouvriers au chômage pendant un an pour un changement de pièce. »
Mais si Citroën recule devant l’obstacle à cette époque, l’État français en fait autant. Dès 2017, la Chine, la Corée du Sud, la Malaisie, le Japon et l’Australie obligent les marques concernées à rappeler les autos équipées de Takata. Pas la France.
Chez Stellantis comme au ministère, personne ne bouge. Et pourtant. En 2020, l’hexagone est doté d'un service de surveillance du marché des véhicules motorisés, le SSMVM, qui se saisit du problème. Sa patronne, Catherine Bieth, témoigne : "Dès l'été 2023, nous avons demandé à Stellantis de prendre des mesures suite à un accident survenu en Grèce, puisque nous pouvons considérer le climat du Sud de la France comme similaire".
Citroën en accuse réception et se voit même obligé de coopérer avec la gendarmerie nationale qui enquête sur les différents accidents outre-mer. Mais sur le territoire national, aucune campagne n’est envisagée.
Un stop drive tardif
Elle n’interviendra qu’un an plus tard, le 17 mai 2024. Ce jour-là, c’est le branle-bas de combat à Poissy. Citroën déclenche un stop drive. Une injonction d’arrêter de conduire les voitures incriminées est envoyée à 300 000 propriétaires français de Citroën. La raison de cette action fort tardive ? Un conducteur de C3 a été gravement blessé par l’explosion de son coussin dans les Pyrénées Orientales. Pire : quelque temps plus tard, un conducteur meurt, près de Lannemezan, dans des circonstances similaires.
Ce retard dans l’allumage de Citroën est évidemment dramatique. Mais quid des autres marques ? La cellule de Radio France a fait ses petits calculs et affirme que 500 000 voitures seraient concernées en tout sur le territoire national. Car des airbags Takata au nitrate d’ammonium ont été montés dans des Ford, BMW, Audi, Volkswagen et Seat. Toutes ces marques ont procédé à des rappels. D'une ampleur suffisante ? « Je vous mentirais si je vous disais que j'étais complètement sûre que tous les véhicules ont fait l'objet d'un rappel", explique, prudente la responsable du service de surveillance du marché automobile.
Si du côté de Citroën, les rappels sont dans leur dernière phase, l’affaire des airbags n’en a pas fini de bousculer l’industrie auto. Près de 2 800 plaintes recueillies notamment pat l’UFC Que Choisir sont actuellement en cours d’examen.
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