2. Essai Triumph Speed Twin 900 : la moto la plus schizo du monde moderno rétro ?
Que cette Speed Twin 900 est curieuse. Une véritable schizophrène, capable du meilleur comme du moins bon selon les conditions d’utilisation et le niveau d’exigence. Et cela, nous le découvrons dès les évolutions en agglomération. Le premier lâcher d’embrayage, sur le couple, permet de profiter d’évolutions agréables apportées par la souplesse et la force du bicylindre. On n’en attendait pas moins de la part d’un moteur de 900 cm³, mais la disponibilité immédiate et la poussée musclée donnent à penser que l’on est en présence d’un moteur vaillant. Ce que confirment les premières glisses de l’arrière au premier rond-point puis dans de petits virages, pneus froids ou censés être chauds, route espagnole, certes, avec l’entrée en action douce de l’anti patinage. Un garde-fou apprécié, mais un comportement pour le moins inquiétant tant on ne sait où sont les limites réelles d’adhérence. Les pneus Michelin ne disent rien sur l’état de la route et surtout, ils ne semblent pas trouver l’adhérence optimale pouvant être attendue de leur part. C’est d’autant plus dommage que les dimensions des pneus ne permettent pas d’envisager un large choix alternatif… Aussi lorsque l‘avant se met également à glisser et à danser dans les zones ombragées pourtant négociées à allure lente, se reprend-on en mains. Plouf plouf, on revient sur les bases.
Mode d'emploi simple, mais nécessaire
La roue avant de 18 pouces -et son pneu- a une réelle incidence sur le comportement de la Speed Twin 900, tout comme la hauteur des flancs du Michelin (90 contre 70 sur une roue de 17 pouces). Si la stabilité ne peut être remise en cause en ligne, la vivacité comme le feeling du train avant sur l’angle sont spécifiques, tout comme une petite inertie. Celui-ci réclame de l’attention dans les conditions de route du jour, principalement à l’entrée des courbes. Même sur le sec, on constate le même écueil et une tendance à résister légèrement à l’inscription, mais surtout une nécessité de laisser vivre une direction à laquelle il ne faut pas s’accrocher, faute de quoi l’on transmet toute la nervosité possible et des mouvements parasites. Le cadre est rigide, l’amortissement de qualité et ferme, et la Speed demeure une moto assez vive dans l’absolu, tandis que l’on parvient progressivement à trouver confiance dans le grip des gommes clermontoises, toujours mutiques mais somme toute plutôt confortables et aptes à encaisser de beaux angles.
Reste à ne pas freiner de l’avant non plus de manière insistante ou forte en courbe lorsque l’on roule de manière enlevée : si l’ABS n’intervient pas réellement, tout bien calibré qu’il est, la fourche vrille volontiers et, au choix, relève à la prise des freins ou tombe à la relâche du levier droit. Ça manque d’équilibre et d’un deuxième disque ! Il faut donc un sacré bon dosage et un feeling important pour rester neutre. Et pourquoi pas régler l’écartement sur une valeur moindre. D’autant plus que l’arrière n’apprécie pas outre mesure les poussées moteur au frein interne des plus modestes (on aurait apprécié un peu plus). S’il est possible - et agréable ! - de rouler vite avec cette Speed, cela réclame de bons nerfs et un bagage technique certain une fois que l’on dépasse un cap, notamment en matière de régime moteur ( 6 000 tr/min). Car pour ce qui est du bicylindre, on est aussi sur un double face tranché !
La face cachée de la rouleuse
D’une part il faut compenser une douceur appréciable dans les deux premiers tiers du compte-tours en jouant assez souvent de la boîte à 5 rapports, et compter sur une certaine nervosité, pour ne pas dire une nervosité certaine du moteur et de la partie cycle une fois dans le dernier tiers de l’afficheur. Une zone plus « sportive » dans l’âme, dans les effets, mais un peu moins dans les faits : les 65 ch sont bien là, actifs et motivés, mais les exploiter demande du flegme, notamment lorsque la route se cabosse et se gondole. Les bosses prononcées sont les seules à réellement mettre à mal les capacités d’amortissement très correctes de la Speed si l’on roule fort, déséquilibrant la moto qui se remet automatiquement dans l’axe. Le confort est globalement de mise, mais la fin de course est plus raide, mettant plus à mal les 116 mm de débattement des amortisseurs Piggy Bag que les 120 mm de la fourche. Attention au rebond, donc ! Le reste du temps, lors des évolutions « normales », l’hydraulique revue assainit le comportement et permet de passer correctement sur les dos d’ânes et déformations de bitume. La tenue de cap et de route est conforme aux caractéristiques de la moto, jusque dans l’anti patinage, plus utile pour prévenir des glissades intempestives des pneumatiques sur le gras mouillé que pour juguler la puissance moteur, mais s’actionnant sur l’angle et sur le sec histoire de. Quand bien même la Speed Twin semble titrer plus que les 65 ch revendiqués. La Yamaha MT-07 a démontré que le calage à 270° amplifiait les sensations, cette Triumph le confirme dans un agréable fond sonore : les flûtes d’échappement jouent très juste et dans un registre flatteur à l’oreille.
Du coup, opter pour une conduite coulée est plus qu’une alternative, c’est une façon -plus conventionnelle et plus adéquate- de mener la belle jusqu’à l’hôtel (si l’on est voyageur), notamment sur les routes les moins sinueuses et les plus plates, où l’on est fort aise sur la selle de bonne constitution et plutôt confortable. Encore une fois, les reprises douces profitent du couple moteur jusque sur le 3 ou 4 ème rapport, tandis que la 5 est bien plus véloce et plus encline à cruiser qu’à donner des sensations à partir des 50 à 60 km/h permis. Et si l’on pousse jusqu’au rupteur ? On atteint 88 km/h en première, 122 environ en seconde, et près de 160 en troisième, gage d’une démultiplication longue et de rapports plutôt bien étagés mais s’essoufflant dans la montée en vitesse à partir de la 4 à partir de 6 500 à 7 000 tr/min, justifiant aussi que l’on joue de la boîte douce et verrouillante dans les épingles et les portions les plus techniques, histoire de ressortir sans mollir. La consommation en serait-elle impactée ? Pas le moins du monde : l’instrumentation de notre modèle d’essai affichait fièrement un appétit modeste tournant aux alentours de 4,6 l/100 km (une valeur très proche des 4 l/100 km annoncés), tout en enclenchant la réserve aux alentours de 150 km parcourus bon train, soit une réserve suffisante pour parcourir près de 50 km. Une 900 avec un petit appétit, donc, quand bien même on ne la ménageait guère lors de notre prise en mains.
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