Flambée des prix des carburants : la faute aux hausses des taxes et des marges des distributeurs

Nous l'avons évoqué à plusieurs reprises ces dernières semaines, vous l'avez sûrement constaté : les prix des carburants ne cessent de grimper. Au dernier pointage du Ministère de la Transition Écologique, le gazole s'affichait en moyenne en France à 1,4240 €, le sans-plomb 95 à 1,5040 €.

À titre de comparaison, mi-mars, les prix moyens étaient de respectivement 1,3624 € et 1,4469 €. Fin décembre, c'était 1,2866 € et 1,4079 €. Et pour le week-end de l'Ascension 2017, c'était 1,2125 € et 1,3702 €. Que s'est-il passé pour que les tarifs à la pompe s'envolent, au point d'atteindre ces jours de prix jamais vus depuis des années ?

On peut parler du pétrole. Ce qui n'est pas faux, car l'or noir est orienté à la hausse depuis plus d'un an. Début mai, selon le pointage de l'Ufip (Union Française des Industries Pétrolières), il atteignait 75 $. Il était à 45 $ en juin 2017. Si la progression semble régulière, elle cache toutefois quelques soubresauts. Ainsi, en janvier, le pétrole était à 69 $, puis est retombé en février sous les 63 $ avant de remonter par pallier. C'est ce qui explique que les prix à la pompe avaient un peu reculé à la fin de l'hiver, mais augmentent maintenant depuis sept semaines.

L'association de défense des consommateurs CLCV a souhaité pointer d'autres facteurs. Si les prix du pétrole sont à la hausse, elle explique que "son impact a été assez largement amorti par la forte appréciation de l’euro par rapport au dollar". Pour l'association, les conducteurs sont surtout impactés par l'augmentation de la fiscalité et par les marges de plus en plus confortables des distributeurs. Elle demande donc à ces deux parties de faire des efforts pour ne pas assommer les Français.

Côté taxes, si vous êtes un fidèle lecteur, vous le savez : depuis plusieurs années, chaque 1er janvier, l'État ajoute quelques centimes, qui correspondent notamment à la taxe carbone. En 2018, l'addition a été particulièrement salée pour ceux qui roulent avec un diesel, puisque la fiscalité du gazole a aussi été impactée par le début du rattrapage pour aligner les prix à la pompe d'ici 2021. Le gazole avait ainsi pris dans la nuit du Nouvel An 7,6 centimes de taxe. Pour l'essence, c'était 3,8 centimes. La CLCV estiment que ces hausses de taxes, destinées officiellement à pousser les Français à moins consommer d'énergies fossiles, sont surtout "une mesure de rendement fiscal".

En ce qui concerne la distribution, la CLCV rappelle que la France avait il n'y a pas si longtemps les marges les plus basses d'Europe, en raison d'une forte concurrence. Les marges étaient de 6 à 7 centimes d'euro par litre. Mais selon la CLCV, ces marges se sont envolées depuis le début de la décennie, et cela se poursuit : pour l'essence, elle est passée de 11 centimes en 2017 à 13,9 centimes en moyenne depuis le début de l'année. Pour le gazole, c'est passé de 11,2 à 12,6 centimes. Cela s'expliquerait notamment par la chute du nombre de station-service. Il y en a moins de 11 000 maintenant en France, un total divisé par trois par rapport à 1970.

La CLCV tire donc la sonnette d'alarme. Pour elle, le budget carburant des ménages va progresser en 2018 de 100 à 225 euros. Et ces hausses touchent "plus durement les ménages très dépendants de l’automobile notamment situés en milieu rural ou en banlieue". Elle demande aux pouvoirs publics "d'interrompre leur politique d’augmentation des taxes" et aux professionnels "de modérer leurs marges de distribution".

Malheureusement, cela ne va pas s'arranger dans les années à venir. Il est déjà prévu d'alourdir à nouveau la fiscalité, toujours avec la taxe carbone et la fin de l'avantage pour le gazole. De plus, le pétrole pourrait continuer de grimper. La demande pour l'or noir augmente avec la croissance, alors que les principaux pays exportateurs de pétrole ont décidé de limiter leur production quotidienne.