Fusion avec Fiat : est-ce risqué pour PSA ?
PSA et Fiat ont officialisé leurs discussions en vue d'un rapprochement. Mais le français ne se met-il pas en danger en fusionnant avec un groupe italo-américain moribond ?
On prend les mêmes et on recommence ! Car si FCA (Fiat Chrysler Automobiles) a tenté de se marier avec Renault au printemps, l'idée d'un rapprochement avec PSA a d'abord été évoquée en début d'année. Il n'y avait toutefois rien eu d'officiel. Cette fois, les deux parties y mettent les formes. Dans un très bref communiqué de presse, le français a confirmé les discussions, "en vue de créer l'un des principaux groupes automobiles mondiaux".
L'an dernier, PSA a écoulé 3,9 millions de véhicules dans le monde. De son côté FCA, en a livré 4,8 millions. Ensemble, les deux parties formeraient le quatrième groupe automobile, derrière Volkswagen, l'Alliance Renault-Nissan-Mitsubishi et Toyota.
Le raté de la fusion avec Renault invite à la prudence, même si le contexte est différent. Dans le dossier du Losange, l'État a ralenti les discussions, souhaitant que Renault s'accorde avec Nissan sur ce sujet pour ne pas faire exploser l'Alliance. Un problème qui ne se pose pas avec PSA, même si le gouvernement aura de nouveau son mot à dire.
Et trouver un accord reste difficile. Au début de l'année, la famille Agnelli, qui détient 28 % du capital de FCA, n'avait pas envie que le rapprochement se fasse via des échanges d'actions. Cet été, après l'échec Renault, John Elkann est venu à la rencontre de Carlos Tavares et Louis Gallois, respectivement président du conseil du directoire et président du conseil de surveillance de PSA, mais l'italien a jugé le prix de l'opération trop élevé. Selon le Figaro, il est revenu à la table des négociations ces derniers jours.
Le retard technologique de FCA
Voilà qui prouve que PSA intéresse FCA ! Mais cette fusion n'est-elle pas risquée pour le français ? Cela fait des années que l'italo-américain cherche à se rapprocher d'un gros partenaire, et cela n'a jamais abouti. De quoi inciter à la méfiance. Il est vrai que la mariée a des aspects peu désirables. FCA est plutôt moribond. Si le groupe est tiré vers le haut par Jeep et Ram, le reste n'est pas en forme : Fiat se recroqueville sur la 500, Alfa Romeo n'a pas réussi à se relancer avec les Giulia et Stelvio, Lancia est quasiment mort, Chrysler est plongé dans le coma ! Et en dehors de Jeep et Ram encore, l'avenir des labels reste flou.
FCA a de plus un gros retard technologique, aussi bien en matière d'équipements que de technologies. Le groupe a d'ailleurs un énorme handicap : un mauvais bilan CO2. Or, les firmes trop polluantes seront sanctionnées en Europe, avec de grosses amendes à la clé. Pour l'éviter, Fiat a déjà prévu de payer Tesla pour lui acheter des crédits CO2, à prix d'or ! Le groupe va heureusement réagir, avec le lancement de modèles hybrides rechargeables et électriques en 2020.
En face, on a un PSA qui se porte plutôt bien, avec des stratégies claires pour l'ensemble des marques, un calendrier d'électrification des gammes bien défini, des finances dans le vert… Bien sûr, tout n'est pas parfait. Le groupe souffre notamment de sa très forte dépendance à l'Europe, où il réalise 80 % de ses ventes. Une situation qui a été dégradée par l'arrivée d'Opel et la dégringolade en Chine. Fusionner avec Fiat représente un risque sur ce domaine, car dans le nouvel ensemble, cela fera une marque généraliste puissante en Europe en plus. D'ailleurs, l'un des points de friction en début d'année a été la condition de ne pas toucher aux usines et aux emplois en France. Fiat avait toutefois tenu à rassurer sur ce sujet quand il s'est approché de Renault. Autre danger si le nouvel ensemble est créé en fusionnant : la famille Agnelli restera l'actionnaire qui a le plus de poids. Toutefois, il est déjà envisagé que Carlos Tavares prenne les commandes.
L'accès au marché nord-américain
On peut quasiment se dire à ce stade : "Mais que va faire PSA dans cette galère ?". Il y a des risques, mais heureusement il y a des avantages. Le premier est la coopération technique. D'ailleurs, PSA et Fiat sont déjà associés sur le marché des utilitaires, ils se connaissent donc bien ! Le français peut espérer faire des économies avec le partage des éléments techniques existants (plate-forme, moteur...) et des coûts de développement des nouvelles technologies ! Les coopérations sont d'ailleurs facilitées par le fait que les deux groupes ont deux grands marchés en commun : l'Europe et l'Amérique Latine.
Le gros atout de FCA pour PSA sera la porte d'entrée au marché nord américain. Peugeot travaille à son retour aux États-Unis, mais ne veut pas se précipiter. Une fusion avec Fiat faciliterait grandement le projet. Elle pourrait d'ailleurs permettre d'envisager à DS de franchir aussi l'Atlantique.
Côté technique, si Fiat a un grand besoin des moteurs hybrides et électriques de PSA, il pourra apporter de son côté les transmissions intégrales, la plate-forme propulsion et le V6 d'Alfa Romeo. FCA est aussi bien avancé en matière de conduite autonome, grâce à une collaboration avec Waymo, filiale de Google.
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