Les microcars, une spécialité automobile allemande
Si, à l’heure actuelle, les Allemands sont réputés pour leurs fameux « premiums », les toutes petites voitures ont joué un grand rôle dans l’histoire automobile germanique, surtout dans l’immédiat après-guerre, en permettant à de nombreux foyers de se motoriser.
Allemagne, année zéro. En 1945, le 3e Reich, éliminé, laisse derrière lui un pays en ruines au sein d’un continent sinistré. Tout est à reconstruire, à commencer par l’industrie automobile. Le pouvoir d’achat étant réduit à néant ou presque, il n’est pas question pour les constructeurs de prospérer durant la période de reconstruction en proposant des modèles de luxe. Dans l'ombre de la VW Coccinelle, sont plutôt les tout petits engins qui ont la cote, ce qu’on appelle les « microcars », dont voici un aperçu.
Chose surprenante, ceux-ci ont parfois profité d’une sophistication assez étonnante. Surtout quand ils ont été créés par des avionneurs, comme Messerschmitt qui a lancé la Kabinenroller (KR) en 1953. On a beaucoup dit que cette KR175 récupérait la verrière du sinistre chasseur Me 109, en fait, elle ne fait que s’en inspirer. Avec son monocylindre Sachs, ce drôle d’engin, mélange d’avion et de moto mais doté de trois roues, flirtait avec les 80 km/h, voire 100 km/h dans son évolution KR200. On l’a par ailleurs vu dans le film Brazil.
Heinkel, un autre fabricant d’avions militaires, a lui aussi produit son microcar, très inspiré de l’Isetta italienne dont BMW a fait ses choux gras. La Kabine n’a été fabriquée qu’entre 1956 et 1958, en trois versions dont certaines pointaient à près de 100 km/h, grâce à un monocylindre à quatre temps. Fallait oser !
Toujours inspirée de l’aéronautique, il y a la Gutbrod Superior. Là, on accède une vraie automobile (3,50 m), dont la ligne craquante a certainement inspiré celle de la Nissan Figaro. Sous le capot de cette traction se trouve un bicylindre deux temps de 600 cm3. Apparue en 1950, elle ne rencontre pas initialement un grand succès, mais dès 1952, son moteur bénéficie d’une injection directe signée Bosch. Celle-ci est d’ailleurs similaire dans son principe à celle équipant le Me109. Ainsi, la Superior est-elle la 1re voiture essence de série à injection directe. Malheureusement, la production s’arrête en 1954.
Goliath le dispute à Gutbrod l’inauguration de l’injection directe. Car ce fabricant de microcars, comme son nom ne l’indique pas, a lui aussi commercialisé cette technologie dès 1952 sur sa GP700. Evoluant en GP900 dès 1955, elle connaît plus de succès que la Gutbrod. En 1957, la 1100 arbore un 4-cylindres 4 temps avant de devenir la Hansa 1100.
Goliath et Hansa appartenaient au groupe Borgward, tout comme Lloyd. Vous connaissez ? Contrairement à ce que ce nom suggère, il s’agit d’une marque allemande, qui produit pour le groupe dès 1950 le très bas de gamme, incarné par la toute petite 300. Sa technique rappelle nettement celle de la Goliath : traction à bicylindre transversal 2-temps. 13 ch pour 300 cm3, cela lui suffit pour pointer à 100 km/h. Elle sera remplacée par la 400 en 1953, elle-même supplantée par la 600 en 1957. La marque disparaît en 1961 avec le groupe Borgward, qui a pourtant su rivaliser avec Opel et VW dans les années 50.
Toujours à l’Ouest, Glas produira dès 1954 la minuscule Goggomobil T250, qui rencontrera un succès important. Là encore, il s’agit d’une auto à bicylindre deux-temps, mais monté à l’arrière. Il s’attèle à une boîte 4 alliée en option à une commande électromagnétique. Plus de 200 000 unités seront fabriquées jusqu’en 1969, après que Glas (qui a créé la petite Isard) est passé sous contrôle de BMW (lui-même sauvé par les petites Isetta, 600 et 700).
Les spécialistes de la moto ont, eux aussi, produit des microcars comme Zündapp. Celui-ci commercialise la Janus en 1956, qui est en fait une auto conçue par l’avionneur Dornier. Originale, elle implante son moteur au centre et place les passagers de part et d’autre. Surtout, elle est totalement symétrique ! Malheureusement, chère et peu rassurante à conduire, elle se vendra peu.
On ne peut pas parler de spécialistes de la moto sans passer par DKW. Ce constructeur majeur s’est illustré en produisant avant-guerre quelques-unes des premières tractions de l’Histoire, à moteur 2-temps. En 1950, il sort la F89, animée par un bicylindre de 684 cm3 (23 ch) qui l’emmène à 100 km/h. Malheureusement pour DKW, une partie des ses installation se trouve côté RDA, où l’on va fabriquer l’IFA F9, très proche. Celle-ci connaîtra son petit succès et sera remplacée par la Wartburg 311, bien plus imposante.
Toujours chez les héritiers de DKW, on trouve la marque Zwickau, du nom de la ville où se trouve l’usine. Après avoir produit la DKW F8 d’avant-guerre sous la marque IFA, il sort la petite et improbable P70 en 1955 sur la même base (traction à bicylindre deux-temps) mais arborant une drôle de carrosserie en Duroplast. Cela ne vous rappelle rien ? Bien sûr, la Trabant. D’ailleurs, c’est elle qui remplacera la P70 dès 1958 !
Aujourd’hui, il ne reste rien de ces engins parfois improbables, parfois sophistiqués, car ils ont disparu avec l’élévation du niveau de vie outre-Rhin. Il en va de même pour Rovin en France ou les voitures Vespa en Italie (la fameuse 400, que nous avons connue ici). Mais les sans-permis profitent à l’heure actuelle d’un fameux regain d’intérêt, porté par la minuscule Citroën Ami. Et si elles incarnaient une sorte de voie de salut comme leurs devancières des années 50 – 60, dans un contexte de décroissance ? Espérons… que non !
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